L'échappée musicale

Le pianiste Lang Lang à la conquête des plus grands classiques de Disney

© Disney / Deutsche Grammophon / Simon Webb · Design : Untold Studios

Xavier Flament nous parle du nouvel album du pianiste Lang Lang dédié aux grands classiques de l’entreprise américaine Disney, qui fêtera ses 100 ans en 2023.

Echappée musicale

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Saint-Nicolas oblige, le pianiste Lang Lang sort son Disney Book. L’occasion était toute trouvée de donner une suite à son Song Book de 2019, qui fut un énorme succès, et où il compilait ses miniatures favorites pour donner envie aux jeunes de se lancer dans l’étude du piano. En 2023, la Walt Disney Company fêtera ses 100 ans, et voilà un double album "deluxe", sorti chez Deutsche Grammophone, qui fourmille de transcriptions des Bandes originales de dessins animés et de films de Disney comme Mary Poppins. Et cela fait frétiller depuis deux mois les 20 millions de followers de Lang Lang sur les réseaux sociaux… ambition affichée : sensibiliser un maximum de jeunes à la musique classique qu’il juge menacée d’extinction.

Le connaissant, on flaire aussi un joli coup marketing. Et à sa décharge, il ne s’en est jamais caché, ne voyant pas pourquoi les marques ne jetteraient leur dévolu que sur les rockstars et les grands sportifs, alors que lui-même rêvait de devenir le Michael Jordan du piano.

Mais l’artiste se joue aussi de son statut de star — la seule vraie star du classique à l’heure actuelle — pour continuer en même temps son exploration du répertoire occidental, au plus haut niveau. Il s’y est employé dès qu’il est sorti de Chine, pour son premier concours international, en Allemagne. Il n’a que 12 ans à l’époque. À 15, il envoie ses 24 Études de Chopin à Gary Graffman, le directeur du Curtis Institute de Philadelphie. En un an, Graffmann lui fait apprendre 30 concertos, lui fait lire Shakespeare, Dumas, Balzac et Victor Hugo.

Il s’attire les faveurs de Christoph Eschenbach et de Daniel Barenboïm, deux chefs-pianistes qui voient plus loin que le bout de leur clavier. D’Eschenbach, il apprend à faire respirer la musique et de Barenboïm, il apprend la structure et la saveur des grands classiques. Nikolaus Harnoncourt le met au pianoforte pour lui montrer comment on joue Mozart. Et Andreas Staier démonte tous ses préjugés sur Bach et la musique baroque qu’il jugeait jusque-là terriblement académique.

Staier lui enseigne comment chanter la polyphonie des Variations Goldberg, sommet de la musique occidentale, et consécration d’une carrière fulgurante, mais qu’il devra attendre 15 mois avant de gravir. Il est blessé au bras gauche en apprenant le Concerto pour la main gauche de Ravel. Un arrêt inattendu mais salutaire pour se frotter à la solitude qu’exige Bach avant de le jouer. C’était en 2020, à 38 ans, dans l’église Saint-Thomas, à Leipzig, à côté de la tombe de Bach. "J’étais au paradis", a-t-il déclaré sur France Musique, tout autant touché par le jeune en pleurs venu le trouver après le concert.

Lang Lang, c’est tout cela mais aussi un sourire qui ne le quitte jamais tout à fait quand il joue et que l’on ne peut ranger dans sa panoplie d’incorrigible cabotin. Le sourire du petit enfant qu’il était dans la ville industrielle de Shen Yang, dans le Nord Est de la Chine, quand il visionnait à la télé les Tom et Jerry se courant après au rythme de la Deuxième rhapsodie hongroise de Liszt.

Ce sourire, il aurait pu le perdre mille fois, à cause de l’exigence de son père, de la terrible "Madame Colère", un prof du Conservatoire central de Pékin, des jurys de concours internationaux, des programmateurs et des auditeurs professionnels de la planète classique. Car sourire en jouant, traduit-il, c’est pour les pianistes amateurs… ce sourire, c’est peut-être le plus beau cadeau qu’il fait à la musique classique, en faisant un pied de nez à son indécrottable conservatisme. Et même s’il faut parfois en passer par des arrangements de Disney… on se serait évidemment bien passé des duos avec Bocelli qui se trouvent sur l’album et de ses propres harmonies sucrées. Mais certaines transcriptions sont de la main de l’excellent pianiste anglais Stephen Hough et tiennent la route. Ouf ! On est sauvé…

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