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Le procès de Sepp Blatter et Michel Platini, pontes déchus du football, s’ouvre aujourd’hui

Michel Platini et Sepp Blatter, à l’époque où les deux hommes s’entendaient encore.

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Par AFP (édité par Alexandre Perniaux)

Après six ans d’une enquête traversée par des soupçons de complot, l’ancien président de l’UEFA Michel Platini et l’ancien président de la FIFA Sepp Blatter comparaissent depuis ce mercredi en Suisse, dans l’affaire de paiement suspect qui a brisé leur carrière en 2015. Le Tribunal pénal fédéral de Bellinzone a ouvert le procès du Français de 66 ans et du Suisse de 86 ans pour "escroquerie", "gestion déloyale", "abus de confiance" et "faux dans les titres", pour une décision attendue le 8 juillet.

Le parquet accuse les deux anciens dirigeants d’avoir "obtenu illégalement, au détriment de la FIFA, un paiement de 1,8 million d’euros en faveur de Michel Platini". Visés l’un comme l’autre par d’autres procédures, en France au sujet de l’attribution du Mondial-2022 au Qatar pour le triple Ballon d’Or et en Suisse pour Sepp Blatter, ils encourent cinq ans d’emprisonnement ou une amende.

Les magistrats devront naviguer entre les époques, depuis la naissance en 1998 de l’alliance Platini-Blatter jusqu’à leur rivalité croissante puis leur éjection conjointe du football mondial, mais aussi distinguer la dimension purement judiciaire du dossier de sa toile de fond politique.

Une rémunération de 2 millions qui fait débat

Les deux accusés vont pouvoir s’expliquer dans l’affaire qui a fait d’eux des parias du football, au moment même où Michel Platini, alors patron de l’UEFA et toujours auréolé de sa gloire sportive, paraissait idéalement placé pour prendre la tête de la FIFA après les scandales qui avaient poussé Blatter à la démission.

Défense et accusation s’accordent sur un point : le Français a bien conseillé Sepp Blatter entre 1998 et 2002, lors du premier mandat de ce dernier à la tête de la FIFA, et les deux hommes ont signé en 1999 un contrat convenant d’une rémunération annuelle de 300.000 francs suisses, intégralement payée par la FIFA.

Mais en janvier 2011, "plus de huit ans après la fin de son activité de conseiller", l’ex-capitaine des Bleus "a fait valoir une créance de 2 millions de francs suisses", acquittée par l’instance du football "avec le concours" de Sepp Blatter, relève le parquet. Pour l’accusation, il s’agit d’un paiement "sans fondement", obtenu en induisant "astucieusement en erreur" les contrôles internes de la FIFA par des affirmations mensongères des deux dirigeants, soit le critère clé de l’escroquerie.

Les deux hommes martèlent de leur côté qu’ils avaient dès l’origine décidé d’un salaire annuel d’un million de francs suisses, oralement et sans témoins, sans que les finances de la FIFA n’en permettent le versement immédiat à M. Platini. "Il s’agit d’un reliquat de salaire, dû par la FIFA, par contrat oral et versé dans des conditions de la plus parfaite légalité. Rien d’autre ! J’ai agi, comme toute ma vie et toute ma carrière, avec la plus grande honnêteté" s’est défendu l’ancien milieu de la Juventus.

Platini, victime d’un "complot" ?

Platini s’estime par ailleurs victime d’un complot pour lui barrer la route de la présidence de la FIFA et dénonce en particulier le rôle trouble de l’actuel patron du football mondial, Gianni Infantino, dans le déclenchement de l’enquête.

Ancien bras droit du Français à l’UEFA, l’Italo-Suisse est visé depuis 2020 par une procédure portant sur trois rencontres secrètes avec l’ancien chef du parquet, dans laquelle un magistrat et l’ex-directeur juridique de la FIFA viennent d’être inculpés.

Mais la justice suisse ayant jusqu’ici refusé de joindre les deux dossiers, les débats devraient rapidement se recentrer sur la réalité de l’accord oral des deux accusés : il leur faudra expliquer la contradiction avec le contrat de 1999, le fait que cette dette n’ait jamais été provisionnée par la FIFA, et le contraste avec les pratiques habituelles de l’instance, qui n’a jamais rémunéré de salarié ou consultant "sans base écrite", assurait son ancienne DRH dans le volet disciplinaire de la procédure.

Partie civile, la FIFA entend se voir restituer le salaire et les charges sociales payés en 2011, "pour que l’argent détourné par les accusés à des fins personnelles soit restitué au seul et unique but auquel il était destiné : le football", a indiqué Me Hohl-Chirazi, avocate de l’instance.

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