Le rap a fêté quarante ans de règne, mais qui a commencé ?

Vous avez quelques souvenirs d’enfance sur les rythmes de Run DMC ? Vous possédez même un vinyle que vous aimez brandir comme le Saint-Graal dans vos petites fêtes entre amis ? Lucky you, mais non, pas du tout, ce ne sont pas les origines du rap. On est en 1998, à la fin de la New school. Le groupe aime mixer les influences en tirant vers le rock ou l’électro.

Votre adolescence a été ’Old school’ ? En 1992, vous fouiniez dans les bacs des disquaires à la recherche de ‘The Chronic’ de Dr Dree et Snoop Dog ? Un album qui a marqué l’évolution du genre, classé comme deuxième des cent meilleurs albums des années 1990 par le magazine ‘Rolling Stones’. Pourtant il a été complètement absent de la mise en ligne sur les plateformes de streaming jusqu’en 2020 !

Quarante ans… Ça nous reporte en 1982. C’est l’année de sortie de ‘The message’par le grand maître du scratch et de la culture Hip-Hop, le Grandmaster Flash. Ce récit du quotidien d’un habitant du Bronx deviendra un hymne.

"It’s like a jungle sometimes, it makes me wonder how I keep from going under"

( "C’est comme une jungle quelquefois, je me demande comment je parviens à ne pas plonger" )

Sylvain Bertot, auteur de 'Rap, Hip-Hop, 40 années en 200 albums' paru chez Le mot et le Reste, situe les origines du rap avec en 1979 avec Kool Herc, un DJ Jamaicain qui insuffle un vent de fêtes illégales dans les rues de New-York.

L’étymologie du mot 'rap' prend sa source dans le slang, une forme d’argot. Typique de la transmission parlée, il signifie ‘baratiner, parler ouvertement, franchement'.

C’est Isaak Hayes, le compositeur de ‘Shaft’, qui le premier en 1970 va l’inclure dans son titre ‘Ike’s Rap I’ sur l’album ‘To be continued’. Un monologue soutenu par une boucle délicate de piano et un roulement discret de caisse claire. La partition évolue avec l’introduction d’une guitare, puis de violons, mais jamais l’interprète ne quitte son phrasé. On est dans le ‘spoken word’, le mot parlé associé à un autre art, ici la musique. Cette discipline se décline toujours de nos jours avec d’autres formes artistiques comme la danse, le théâtre, la vidéo.

A l’aube de ces années septante, d’autres performances verbales dans la lignée des griots (conteurs) africains sont immortalisées.

• ‘The last poets’ lancent leur message au son de congas sur un toit à New-york, vidéo sous-titrée en français à voir ici.
• ‘The Watts prophets’ enregistrent un album avec certains morceaux ‘a cappella’, d’autres avec un soutien de quelques lignes de jazz.
• Le jazz toujours pour ‘The revolution will not be televised’ de Gil Scott-Heron, morceau réenregistré en 1971 avec un orchestre complet un an après sa sortie. C’est un pamphlet politique dont le clip tourné devant le capitole cinquante ans exactement avant l’assaut de celui-ci par les partisans de Donald Trump ajoute encore à la perspective.

Alors? Nous y sommes aux origines du rap? C’est sans compter sur les Italiens qui revendiquent le tout premier rap dans ce titre au nom imprononçable de Adriano Celentano : ‘Prisencolinensinainciusol’. Mais nous sommes déjà en 1972, et si le chanteur populaire de la péninsule ose une figure de style très originale pour l’époque, ce n’est pas lui qui devrait remporter la médaille.