Chroniques Culture

Le saviez-vous : Nellie Bly avait bouclé un tour du monde en 72 jours, mieux que Phileas Fogg

© Capture d’écran Youtube

Travailler à partir du terrain et aller voir de ses propres yeux, une véritable marque de fabrique pour notre célèbre pionnière du journalisme d’investigation.

Pour en arriver à une telle postérité, Nellie Bly a dû répondre à des défis inimaginables pour une femme de son époque. Une manière de montrer que l’audace, l’aventure et le courage ne sont pas le propre des hommes.

En 1889, elle se lance comme challenge de battre le record de Phileas Fogg, le personnage fictif de Jules Verne, qui avait bouclé un tour du monde en 80 jours.

Être une femme et journaliste

Nellie Bly vers 1890 (H. J. Myers).

Née en 1864 en Pennsylvanie, Elizabeth Jane Cochrane vit une enfance compliquée, marquée par les souffrances de la classe ouvrière qu’elle racontera plus tard dans ses écrits.

Son audace et sa répartie lui valent un poste au journal local Pittsburg Dispatch, en 1885, après avoir réagi à un article intitulé "À quoi servent les filles". La jeune journaliste est alors encouragée à écrire sous pseudonyme : ce sera Nellie Bly, d’après une chanson de Stephen Foster.

Lorsqu’elle commence à travailler pour New York World, piloté par Joseph Pulitzer, qui donnera son nom au Prix, Nellie Bly fait ses premiers pas dans le journalisme d’investigation.

Avide de défis, elle se fait passer pour démente et infiltre le Blackwell Island Hospital. Pendant 10 jours, elle note le quotidien des femmes enfermées sous prétexte d’hystérie.

C’est là un des premiers exemples d’enquête sous couverture du journalisme américain.

Un pari : battre le record de Phileas Fogg, le personnage de Jules Vernes

À l’automne 1889, le journal cherche à mettre en lumière l’inauguration de son nouveau siège par la publication d’un grand article. Bly propose alors de battre le record de Phileas Fogg, le personnage du roman de Jules Verne, qui avait bouclé un tour du monde en 80 jours.

Un projet ambitieux, à une époque sans géolocalisation et surtout, pour une femme. Un argument que le rédacteur en chef de New York World n’a pas manqué de lui rappeler :

"Vous n’y arriverez jamais ! Vous êtes une femme, vous aurez besoin d’un protecteur, et même si vous voyagez seule, il vous faudrait tant de bagages que cela vous ralentirait. En plus, vous parlez uniquement l’anglais. Rien ne sert d’en débattre : seul un homme peut relever ce défi !" (Source : France Culture)

Habituée aux propos discriminatoires, Nellie Bly s’empresse de rétorquer :

"Très bien, lui répondit Bly, que l’homme débute [sa course]. Je commencerai le même jour pour un autre journal et je le battrai." (Source : National Geographic)

Pulitzer se laisse convaincre : c’est bien pour son journal. Le 14 novembre 1889, Nellie Bly embarque à bord du paquebot Augusta Victoria depuis New York. À 25 ans, la journalise s’apprête à parcourir le monde, seule, équipée uniquement d’un sac à main.

Royaume Uni, Egypte, Yémen, Chine, Japon, elle passe également en France, où elle rencontre Jules Verne. L’auteur lui fait visiter le petit bureau d’où sont sortis tous ses romans, sa riche bibliothèque, et commente les étapes du voyage de son héros, Phileas Fogg.

Il lui assure un soutien amical : "Si vous le faites en 79 jours, je vous applaudirai des deux mains" (Source : France Culture) lui lance-t-il autour d’un verre de vin.

Le 25 janvier 1890, Nellie Bly boucle son voyage en 72 jours, 6 heures, 11 minutes et quelques secondes au total. Le quotidien catholique français, l’Univers, écrit ses lignes le 22 février :

"Le canon tonnait, des musiques lançaient de joyeuses fanfares. Quel événement était donc survenu ? Pourquoi cette foule empressée et enthousiaste, cette foule de reporters et de journalistes ? Une jeune miss arrivait par le train du Pacifique, et les chapeaux, les mouchoirs s’agitaient. […] Miss Nellie Bly, rédactrice du journal le World, achevait heureusement son voyage autour du monde." (Source : Geo)

Un télégramme signé Jules Vernes arrivé au New York World : "Amiens, janvier 25. – Jamais douté du succès de Nellie Bly. Son intrépidité le laissait prévoir. Hurrah pour elle et pour directeur du World. Hurrah ! Hurrah !".

Peu de temps après son retour, la journaliste compilera ses aventures dans un roman, "Le tour du monde en 72 jours".

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