Les biocarburants à base de soja et d’huile de palme interdits dans les transports à partir de la mi-2022 ! C’est la ministre fédérale de l’Environnement et du Climat, Zakia Khattabi qui a pris cet arrêté royal attendu depuis longtemps par les ONG environnementales. Comme cela se pratique déjà au Danemark, en France ou aux Pays-Bas.
"Dès 2023, le soja sera interdit comme matière première pour les biocarburants pour le transport. Les producteurs de biodiesel doivent s’approvisionner en autres matières premières et évoluer vers les biocarburants des autres générations", a commenté la ministre qui justifie sa décision par le fait que l’utilisation du biocarburant issu de l’huile de palme, a été multipliée par dix sur le marché belge entre 2019 et 2020 pour atteindre 231 millions de litres.
Or, c’est le plus nocif pour l’environnement selon Mme Khattabi : "Ces combustibles, outre qu’ils ne présentent que peu ou pas d’avantages par rapport aux combustibles fossiles classiques du point de vue du climat, entraînent de la déforestation, de la perte de biodiversité, voire des violations des droits humains. Pour produire ce biodiesel pour le seul marché belge, il faut des plantations d’huile de palme d’une superficie totale de plus de 100.000 terrains de football, des études nous montrent qu’au moins la moitié de ces plantations de palmiers à huile a été plantée sur des terres qui ont été récemment déboisées."
Les biocarburants nocifs pour l’environnement
Ce que confirme Noé Lecocq, spécialiste énergie et mobilité chez Inter-environnement Wallonie. "C’est une avancée sérieuse car le soja et l’huile de palme sont les carburants les plus néfastes pour l’environnement. Mais pour résoudre le problème plus global de l’utilisation des biocarburants dans nos moteurs, il faudra aussi réduire le volume total de ces matières premières des agrocarburants qui entrent en concurrence directe avec la production alimentaire et qui souvent s’accompagnent de graves atteintes aux droits de l’homme et à la nature."
Le problème, c’est que la Belgique s’est fixé un objectif dans ce domaine. La loi fédérale impose l’incorporation de 7% de biodiesel dans notre carburant. "Et en 2020, on est même monté à près de 20%", s’insurge Noé Lecocq.
"Mais les raffineurs de biocarburants exercent un puissant lobbying sur les autorités belges. Notre pays s’est fixé des objectifs à travers le Plan National Climat : 17% de consommation d’énergie renouvelable d’ici à 2030. (Ce qui au passage ; est bien en dessous des objectifs fixés par l’UE qui demande d’utiliser au moins 25% d’énergie renouvelable dans les transports). Or les efforts dans ce domaine sont répartis entre les différents niveaux de pouvoir. Si le Fédéral fait moins, ce sera aux régions de compenser. Et cela la Flandre n’en veut pas. Le risque est alors que l’on se tourne vers d’autres biocarburants que le soja ou l’huile de palme. On pourrait alors augmenter la part des biocarburants issus du colza, de la canne à sucre, du blé ou de la betterave. On aura fait alors que déplacer le problème", souligne Noé Lecocq.
Réduire la dépendance à l’auto
Au début des années 2000, l’idée, défendue par tous les écologistes, était de réduire la dépendance au pétrole. Mais on s’est rendu compte qu’en considérant tout le cycle de vie et de production de ces agrocarburants, on en arrive à produire plus de gaz à effet de serre qu’avec les carburants fossiles.
"Il faut donc promouvoir d’autres types de mobilité douce et en tout cas ne pas sacrifier l’alimentaire au profit de la mobilité", conclut Noé Lecocq. Cette initiative est la première depuis l’engagement de la Belgique à l'"Amsterdam Déclaration Partnership" (lutte contre la déforestation).
"C’est un premier pas pour mettre fin aux effets négatifs sur l’environnement de la politique fédérale en matière de biocarburants. Le gouvernement fédéral réduira également la demande de (bio) carburants en se concentrant sur le transport électrique et le transport par train", conclut la ministre Khattabi.