On n'est pas des pigeons

Le textile en bambou : alternative écologique ou greenwashing ?

La culture du bambou est écologique, mais sa transformation en fibre textile ne l'est pas du tout.

© Getty Images

Le bambou est vendu aujourd'hui comme une alternative écologiqueMais les objets à base de bambou sont-ils vraiment écoresponsables ou n'est-ce qu'un argument de vente ?

Des ustensiles de cuisine au textile, en passant par les meubles, les objets en bambou sont à la mode. Une plante qui s'est révélée, au fil du temps, avantageuse vis-à-vis de l'écologie. Elle peut être cultivée dans le monde entier et possède de meilleurs atouts que d'autres matières premières, comme le bois.

Une matière première écologique

La culture du bambou peut être écologique. Pour pousser, cette plante n'a besoin que de soleil et d'eau de pluie. Elle nécessite peu d'entretien. Pas d'engrais, de pesticides ou d'insecticides. Sa croissance est rapide ce qui lui permet d’être récolté quatre à six fois par an. Une fois coupés, les plants les plus vivaces continuent d'ailleurs de pousser, car les racines sont encore dans le sol.

Le bambou limite l'érosion du sol en éliminant certaines toxines et en apportant carbone et oxygène. Il absorbe également plus de CO2 qu’un arbre. Environ 30% en plus. Une bambouseraie est donc un puit de carbone intéressant et permettrait de lutter efficacement contre l'effet de serre.

Une matière première écologique et bon marché, et ça, l’industrie du textile l’a bien compris.

La croissance du bambou est rapide, ce qui lui permet d’être récolté 4 à 6 fois par an.
La croissance du bambou est rapide, ce qui lui permet d’être récolté 4 à 6 fois par an. © Getty Images

Un processus de fabrication controversé

La fibre de bambou naturelle est cassante et rêche. Pour la rendre douce au toucher et agréable à porter, l’industrie du textile la transforme en viscose.

Une transformation chimique pouvant être polluanteElle est modifiée et obtenue par des méthodes de vapeur ou d’ébullition. Sa production nécessite l'utilisation d'acides et d'intrants chimiques néfastes pour l’environnement et pour les travailleurs, comme nous l'explique Emilie César, spécialiste des textiles écologiques à l'Atelier 53La plante est d’abord dissoute dans un bain de soude caustique, puis de disulfure de carbone. Enfin, elle est plongée dans l’acide sulfurique pour former des fils continus. 

Le disulfure de carbone est un perturbateur endocrinien, non recyclable, et toxique pour le travailleur.

La fibre textile de bambou n'est donc plus naturelle mais bien artificielle.

"Le disulfure de carbone est un perturbateur endocrinien, non recyclable, et toxique pour le travailleur. "

Les vêtements en fibre de bambou promettent hygiène et confortSouple, solide et léger, le textile de bambou présente en effet de nombreuses qualités. Respirant et anti-transpirant, il absorbe 3 fois plus que le coton. Il est aussi naturellement antibactérien. Cette viscose est donc principalement utilisée pour les vêtements de sport ou les sous-vêtements.

Des arguments de vente qui plaisent et attirent le consommateur. Emilie César attire l'attention sur les composants de ces textiles en bambou : "On ne retrouve plus de bambou dans le textile fini, le consommateur est donc trompé avec ces logos et dessins "fibres de bambou" qu'on retrouve sur les emballages".

Le bambou, un argument de vente ?

Certaines marques placent le bambou comme une solution miracle dans l’industrie de la mode éthique. Problème, la demande de bambou augmente constamment.

Si la demande est supérieure, on va devoir avoir plus de cultures de bambou et donc, des risques de déforestation.

Les petites exploitations certifiées écologiques ne peuvent faire face à ce phénomène toutes seules, et des productions intensives voient le jour. Cela contribue à la déforestation et impacte la biodiversité, nous explique Elsa Derenne, chargée d'expertise chez écoconso. "Si la demande est supérieure, on va devoir avoir plus de cultures de bambou et donc, des risques de déforestation."

Le bambou n’est pas labellisé GOTS qui garantit un mode de production écologique et socialement responsable. Selon Elsa Derenne, il est davantage recommandé de se tourner vers des fibres qui ont moins d'impacts que le bambou, comme le lin, le chanvre ou le coton bio ou encore la laine. Il est toujours utile de vérifier les étiquettes et d'éviter les entreprises qui pratiquent le greenwashingNombreuses sont les entreprises qui exagèrent le caractère durable de leurs produits. Le but étant d'attirer les consommateurs consciencieux. Autre conseil, méfiez-vous des textiles ou des produits trop bon marché. Un prix trop bas est souvent synonyme de viscose.

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