Un cycle du raisin raccourci, une teneur en alcool plus importante, une modification des arômes, le climat a un impact sur la vigne comme sur toute culture. C’est un des paramètres qui va jouer sur la qualité du vin.
À Bordeaux, en 70 ans, la température a augmenté d’un degré et demi. Pour continuer à proposer un vin équilibré de même qualité, les vignerons de Bordeaux s’adaptent, et surtout anticipent l’avenir.
Bernard Farges, président du CIVB, le Conseil interprofessionnel du vin de Bordeaux, et Marie-Catherine Dufour, directrice du service technique de ce conseil, étaient invités sur La Première.
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En 70 ans, le climat tempéré de Bordeaux est devenu un climat tempéré chaud, de quoi influencer le végétal, et donc la vigne. Un exemple déjà simplement cette année : les vendanges sont toujours en cours.
Bernard Farges : "Oui, les vendanges sont en cours. Paradoxalement, cette année est une année presque tardive, mais nous savons que les trajectoires du changement climatique nous amènent à récolter de plus en plus tôt. Et par exemple, en 2020, nous avions récolté très tôt, avec des teneurs en sucre des raisins très importantes, et donc des teneurs en alcool plus importantes de nos vins."
Des teneurs en alcool qui sont souvent plus élevées
Le climat est donc vraiment un des facteurs de réussite, avec la qualité du sol et le travail de l’homme. Évidemment, quand il y a plus de CO2, plus d’épisodes intenses de chaleur ou même de grêle, on a des conséquences très visibles ?
Marie-Catherine Dufour : "Oui, effectivement, on a des conséquences avec beaucoup plus d’hétérogénéité entre les millésimes, avec des millésimes qui vont être des millésimes généreux, parce que quand on a plus de CO2, on a plus de photosynthèse, et donc le végétal produit plus, et d’autres millésimes où on aura des épisodes de gel, des épisodes de grêle qui réduiront considérablement les volumes. Il faut donc qu’on s’adapte à cette variation de volume et aussi à une évolution aromatique des vins, avec des teneurs en alcool qui sont souvent plus élevées qu’autrefois et des acidités un peu plus faibles."
Comment s’adapter ?
Marie-Catherine Dufour : "On a beaucoup de techniques agronomiques qui peuvent nous permettre de nous adapter à court terme. On peut retarder la taille pour avoir des stades finologiques plus tardifs. On peut avoir moins de surface foliaire pour justement limiter cette photosynthèse. On peut aussi mettre en place des couverts végétaux qui vont éviter la transpiration du sol pendant l’été. Toutes ces pratiques-là sont des choses que l’on met déjà en œuvre et ce sont des stratégies à court terme".
Mais l’évolution du vin existe depuis des années. Le vin qu’on buvait il y a justement 70 ans n’était pas le même que celui que l’on boit aujourd’hui. C’est plus inquiétant aujourd’hui ?