Leçon de plan-séquence avec le film ''Boiling Point'' par Cathy Immelen

La définition de ce qu’est un plan et ce qu’est une séquence : un plan, c’est le moment précis entre deux coupures de caméra. Généralement, un film comprend plusieurs centaines de plans, voire des milliers pour certains films d’action hollywoodiens. Une séquence, c’est un passage, une scène d’un film se situant dans un seul et même espace-temps, qui repose sur une action ou un dialogue principal. Un plan-séquence, c’est donc une séquence filmée en continu sans coupure, ni raccord, ni plan de coupe. Le plan-séquence est l’une des techniques les plus difficiles à maîtriser pour un réalisateur. Tout doit être préparé à l’avance ; les mouvements de caméra et des acteurs mais aussi des techniciens pour que la perche son, le matériel d’éclairage ou qu’aucune ombre n’apparaisse à l’écran. Ça nécessite beaucoup de répétition. Il faut voir ce travail comme une grande chorégraphie millimétré parce que la moindre petite erreur oblige à recommencer le tournage de la scène depuis le début.

''Boiling Point'' qui sort ce 26 octobre a été filmé d’une seule traite, en un seul plan. Un seul plan séquence d'une heure trente dont l’action se déroule dans un resto huppé londonien. La mise en scène fait littéralement vivre au spectateur un service en temps réel entre la salle, la cuisine et le coup de feu aux casseroles virevoltantes. C’est tellement intense qu’on est lessivés en tant que spectateur, comme si on avait bossé avec eux. Cette prouesse technique c’est ce qu’on appelle un "On take film", un film "en prise" donc. L’utilisation du plan-séquence est censée rendre le film plus réaliste. L’impact sur le spectateur est très fort car il est littéralement immergé dans le film, à la façon d’un jeu vidéo. Son utilisation est devenue, aussi un argument marketing. Pour moi, tous ces plans séquences virtuoses avec des passages de caméras qui semblent impossibles, n’ont rien de réaliste, ça me trouble et je pense surtout à la préparation et ça me sort de l’histoire.  Je ne suis plus concentré sur ce qui est raconté, mais sur comment c’est raconté. Même si j’ai tout de même beaucoup de respect et d’admiration pour la beauté du geste de tous ces corps de métier où il y a zéro alternative à la perfection totale !

Dans les films récents, voici ceux qui ont utilisé au mieux le plan-séquence. Il y a aujourd’hui deux grands maîtres du plan séquence : Alejandro Inaritu avec ''The Revenant'' ainsi que ''Birdman'' totalement ébouriffants, mais aussi Alfonso Cuaron avec ''Les fils de l’Homme'' et bien sûr ''Gravity'' avec son incroyable plan séquence d’ouverture dans l’espace avec Sandra Bullock et Georges Clooney.

Mais le coup de maitre récent qui m’a le plus marqué c’est ''1917'' de Sam Mendes. Conçu comme un long plan-séquence de deux heures qui nous plonge littéralement dans les tranchées de la 1ère guerre mondiale. Nous suivions en temps réel le destin de deux soldats qui ont pour mission de traverser le territoire ennemi. C’est un faux plan séquence car il y a des coupures, des raccords cachés mais le film reste incroyable. Et petite info service : ''1917'' sera diffusé à la RTBF sur La Une, le lundi 7 novembre.