Jusqu’à la fin du siècle dernier, la Mer du Nord avait, en effet, plusieurs milliers de km2 de parcs à huîtres le long des côtes. Hein Sas qualifie ces bancs d’huîtres de forêts primitives de la mer. Cet expert néerlandais de Nora (L’Alliance pour la restauration de l’huître plate) . Il nous raconte : " Il y avait une manne d’huîtres avant. A partir de 1850, les huîtres ont été considérées comme des protéines bon marché, en particulier pour la classe ouvrière. D’abord pêchées avec des chaluts à perche sur des voiliers, puis avec des bateaux à vapeur, elles étaient amenées à l’intérieur des terres par transport ferroviaire. Vers 1880, les pays de la mer du Nord pêchaient 200 km2 d’huîtres/an ! Ce n’était pas soutenable. "
Les bancs d’huîtres qui se déployaient au large de nos côtes n’étaient pas seulement une source de protéines, nous explique notre expert, ils filtraient aussi l’eau, la rendaient plus claire et ils offraient un abri et un lieu de croissance pour d’autres organismes.
Ce cercle vertueux est aujourd’hui rompu. Les bancs d’huîtres ont disparu et ont fait place à un fond de sable nu, résultat de décennies de pêche au chalut qui ont littéralement labouré le sol marin.
Mais cet expert est confiant. Les huîtres plates se trouvent encore dans nos fonds marins. Simplement, leurs larves ne trouvent plus les structures pour s’accrocher. Quelques initiatives de réintroduction ont déjà eu lieu aux Pays-Bas et en Allemagne, notamment, comme il nous l’explique : " Vous libérez une population d’huîtres adultes sur un nouveau récif. Il se porte particulièrement bien dans les zones abritées, telles que les criques, et les estuaires, car les larves y restent ensemble avec les populations parentales. Mais, il faudra relâcher plusieurs centaines de milliers d’huîtres et les conserver plusieurs années pour espérer un résultat. Comparez cela avec la création d’une forêt. Avec quelques arbres, vous n’êtes nulle part. Ce n’est qu’avec beaucoup d’arbres que vous parvenez à construire une forêt autosuffisante et en expansion capable, ensuite, d’abriter d’autres espèces vivantes. "