Djos Janssens est un perturbateur. Il est connu pour ses installations dans des espaces fonctionnels comme les salles d’attente d’hôpitaux (UZ Gent, Knokke) ou les cafétérias (société Uhoda à Liège) auxquels il donne une humanité, une singularité, une proposition d’imaginaire à base d’images, de couleurs et d’aphorismes. Pas un décor mais "une diversion, un dépaysement" pour nous emmener ailleurs. L’exposition Peintures intérieures est la continuité de ce travail, mais en deux dimensions. Perturbateur du regard, Janssens multiple les interprétations possibles de ses images, instillant des détails, des décadrages, du langage… Des indices à s’approprier.
" On ne parle plus ici de cafétéria, mais de hall d’entrée, de cage d’escalier, de portes d’ascenseur, de salon, de salle de musée " nous dit le commissaire de l’exposition Bernard Marcelis. Ces toiles, composées au départ d'images existantes ou prises par l’artiste dans ses déambulations, n’en sont pas moins des réflexions sur notre société.
Mon travail est toujours lié à ce qui se passe dans le monde
Les phrases dissimulées dans la toile, sur les murs de la galerie (cherchez bien) ou sujet même de l’œuvre interrogent ou commentent, utilisant l’ironie, l’humour et l’aphorisme. " Enjoy your destiny ", " Make philosophy great again " lors de la présidence Trump.
L’escalier représenté dans Upside Down est un de ceux d'un musée. Une flèche au sol indique ART vers la cave et une autre BUSINESS vers les étages. On peut traduire "upside down " par " à l’envers ", signifiant que les priorités se sont inversées entre art et marché, acte gratuit et mise à prix. Une deuxième traduction est " la tête en bas " supposant avec ironie que l’esprit a été, certes, relégué dans les bas-fonds, mais qu’il est bien là.
Ces Peintures intérieures sélectionnées par le commissaire ont été créées durant le confinement et, si l’artiste s’en défend, on ne peut que remarquer la volonté de s’échapper vers le haut, vers les grands espaces. Et toujours les titres "Exit", "Elevation" pour des portes d’ascenseur…
Where are you ECHO est une œuvre sur miroir, un support fréquent chez Djos Janssens où le reflet nous renvoie à notre expérience de regardeur, avec perturbation du regard qui voyage entre l’image sur le miroir et mon reflet faisant abstraction de l’image à regarder. Dans Where are you ECHO, le miroir "interroge" notre espace physique et notre espace mental. Il reflète exactement notre position dans l’espace de la galerie à l’instant T, mais notre esprit, cet immatériel invisible, où est-il ? Peut-être dans cette part d’ombre aux visions étranges évoquées dans les paroles de " The sound of silence " de Paul Simon. Les médias, la publicité, la pop culture sont des ressources inépuisables réinterprétées par le plasticien.
La combinaison des différents éléments : la couleur, l’image, le contexte, le langage, constitue une expérience visuelle et mentale qui exige un (long) moment d’attention (en moyenne on s’arrête à peine 27" devant une œuvre explique Janssens) et de réflexion, pour se laisser toucher (peut-être par un sourire) par la proposition de dialogue entre nous et lui, le créateur.
Peintures Intérieures – Djos Janssens
Du 02/06/2022 au 14/07/2022
Belgian Gallery – 1050 Bruxelles