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Les coulisses du pouvoir : diplomatie des otages, que cherche vraiment l’Iran ?

Les coulisses du pouvoir

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Par Nicolas Vandenschrick via

Après la libération d’Olivier Vandecasteele, il reste à se poser cette question. L’Iran, depuis quelques semaines, multiplie les libérations d’otages. Dans quel but ?

Depuis 1979 et la crise des otages, l’Iran pratique régulièrement ce que l’on appelle la diplomatie des otages, ou diplomatie coercitive. Méthode aussi abjecte qu’efficace et qui consiste, très simplement, à procéder à l’arrestation d’étranger présent en Iran, pour ensuite monnayer leur libération. C’est une prise d’otage, dont la rançon ne s’exprime pas forcément en argent.

Ici, dans le cas de l’humanitaire belge, la monnaie d’échange réclamée fut la libération d’un iranien détenu en Belgique, Assadolah Assadi, "terroriste diplomate" condamné à une peine de 20 ans de prison. Autre temps, l’Iran a réclamé des Britanniques qu’ils épongent une dette de plusieurs centaines de millions d’euros. D’autres arrestations – tout aussi arbitraires – ont servi de levier pour tenter d’alléger le régime de sanction qui frappait l’Iran.

Olivier Vandecasteele ne fut donc pas le premier. Il est plutôt le dernier en date à avoir été libéré.

Il y a moins d’un mois, deux ressortissants français étaient relâchés. En février, une chercheuse franco iranienne bénéficiait d’une amnistie prononcée par Téhéran. La France n’ayant pas pour habitude de communiquer sur ce genre d’opération, on saura peu de ce qui a guidé ces libérations. Tout au plus, peut-on noter que les arrestations des Français se sont insérées dans de prétendues mesures de rétorsion orchestrée par Téheran. "Vous avez arrêté un de mes nationaux ? Moi Iran, je fais pareil. Et maintenant discutons !"

Faut-il y voir une forme d’ouverture ?

Si on fait le compte, depuis février, 4 libérations ont été obtenues. Comme si l’Iran soudain cherchait à arrondir les angles. Et probablement, à obtenir quelque chose de plus que le seul échange de prisonnier.

Sur la scène internationale, le gouvernement iranien peut se féliciter de mener une politique étrangère active. Il a, en quelque sorte, repris langue avec deux Etats européens, la France et la Belgique à qui l’Iran a démontré qu’il était possible de négocier.

Pour autant, parler d’ouverture du régime serait aller bien trop vite.

Sur la scène iranienne, le régime en place a vécu une crise interne très forte. Largement contesté par sa population après le décès d’une jeune femme, Mahsa Amini, le pouvoir tente de reprendre le contrôle, et pour y parvenir, il emploie la manière forte. 209 peines capitales ont été exécutées depuis janvier. Les 3 dernières datent du 19 mai dernier. D’ici peu, se tiendra le procès de l’une des journalistes qui a couvert la mort de Mahsa Amini.

L’Iran se trouve donc engagé à la foi dans un processus répressif interne, et dans un mouvement de négociation externe.
Maintenant que le contact a été noué, le pays estime opportun d’aborder la question qui l’intéresse vraiment : la relance des pourparlers sur le nucléaire, suspendus l’été dernier. L’argument est simple : ces dernières semaines, le régime a accepté de libérer 4 personnes condamnées à purger une peine de prison en Iran. En levant l’obstacle des otages, Téhéran s’offre une possibilité de reprendre les discussions.

Message envoyé aux États-Unis : nous pouvons discuter

Parmi les otages encore présents en Iran, il reste encore au moins trois Américains. C’est la limite – ou à l’inverse, le levier dont Téhéran pense pouvoir se servir. Leur libération est une question prioritaire pour les États-Unis, mais le mouvement entamé en février et qui s’est achevé avec la libération du Belge semble indiquer que l’atmosphère pourrait avoir changé.
Le Courrier international cite à l’appui de cette thèse un journal conservateur iranien, Farhiktegan selon qui "il y a une grande similitude entre les récentes libérations d’otages et les échanges de prisonnier – en 2015 –, lors de la conclusion de l’accord historique sur le nucléaire iranien." En guise d’élément supplémentaire, le rôle clef joué dans ces négociations par un sultan d’Oman : Haïtam Ben Tariq, présent à Téhéran pour quelques jours, et dont le prédécesseur – justement – a œuvré sur l’accord de 2015.

Cette présence est-elle un indicateur, une sorte de signal envoyé à l’international ? L’Iran semble prête à reprendre des négociations. Du moins, cela pourrait être l’un des messages envoyés en parallèle de l’échange d’Olivier Vandecasteele.

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