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Les coulisses du pouvoir : séisme en Turquie, la nature n’est pas la seule responsable

Les coulisses du pouvoir

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Le bilan humain du séisme du 6 février dernier, en Turquie et en Syrie a dépassé les 50.000 victimes. De plus en plus de voix s’élèvent : la nature n’est pas la seule fautive.

Des séismes d’une magnitude comparable à celui vécu par la Turquie et la Syrie, il s’en produit chaque année. Pourtant, le bilan cette fois est énorme. Et cela ne manque pas d’interroger : pourquoi la population turque paye-t-elle un si lourd tribut ?

Il faut revenir en arrière pour trouver une piste d’explication.

En 1999, la terre tremble et fait (déjà) de nombreux morts. La gestion de l’après-séisme est alors critiquée par un homme : Recep Tayyip Erdogan. Il en fera l’un des arguments menant son parti, l’AKP, au pouvoir en 2002. L’année suivant, 2003, le même prend l’engagement, face à la population, d’offrir un bâti solide et de "nettoyer le secteur de la construction."

Car c’est là un des facteurs expliquant le lourd bilan humain et matériel. En Turquie, le secteur de la construction contourne bien souvent les règles. Au lendemain du séisme, la Justice a délivré des mandats d’arrêts et procédé à l’arrestation de promoteurs tentant de quitter le pays et ouvert de très nombreuses enquêtes (560, lisait-on semaine dernière dans le Figaro.)

Un contre-exemple est à voir dans la ville d’Erzim. A quelque 100 kilomètres de l’épicentre, Erzim n’a enregistré aucune victime, pas de blessés et la destruction seulement de quelques bâtiments anciens. Le Monde rapporte dans une interview du maire local, la lutte active des autorités de la ville contre les constructions illégales, menant parfois à la destruction de bâtiment si ces derniers ont été construits sans respecter la législation.

Ce qui fâche aussi certains commentateurs, c’est le constat que la taxe séisme (impôt adopté en 99 au lendemain du tremblement de terre d’Izmir) n’a pas rempli sa promesse. Le prélèvement existe depuis bientôt 25 ans, mais l’argent récolté n’aurait pas servi à consolider le bâti. A en croire un ancien ministre des finances d’Erdogan, les sous auraient servi à construire des infrastructures civiles, route ou aéroport. Ce serait là à l’œuvre le triste principe qui veut qu’en politique, ce qui ne se voit pas (la construction antisismique) est souvent oublié au détriment du plus visible.

Fait rare, la contestation a repris en Turquie. Ce qui ne s’était plus vu – ni entendu depuis le soulèvement de la Place Taksim en 2013 – et qui, notons-le, trouvait là encore sa source dans une affaire immobilière. Ce week-end, les supporters de deux clubs de foot ont fait entendre leur voix. Dans les tribunes des supporters du Besiktas et de Fenerbahçe, on a entendu appeler à la démission du gouvernement. Trois chaînes de télévision ont aussi été sanctionnées pour avoir critiqué le gouvernement. Parmi les observateurs, certains craignent que le pouvoir en place reporte les élections de mai, au prétexte, forcément, que dans un tel chaos, l’organisation du scrutin est impossible.

 

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