Les critiques d'Hugues Dayez

Les critiques d’Hugues Dayez : "La vraie famille", Mélanie Thierry bouleversante

La vraie famille

© Cédric Sartore

Par Hugues Dayez

Autant l’avouer tout de go : Mélanie Thierry a beau avoir remporté le César du meilleur espoir féminin en 2010, elle n’a pas laissé de trace mémorable dans le cinéma français ces dix dernières années. Mais aujourd’hui, dans "La vraie famille", elle trouve LE rôle qui fait la différence, et qui lui a valu le prix d’interprétation au Festival d’Angoulême et au FIFF.

La vraie famille

L’affiche de "La vraie famille"
L’affiche de "La vraie famille" © DR

Dans ce film signé Fabien Gorgeart, Mélanie Thierry incarne Anna, maman de deux enfants, qui avec son mari a choisi d’être famille d’accueil pour le petit Simon. Le garçon est orphelin de mère, et son père ayant sombré dans la dépression, il a été placé à l’âge de dix-huit mois chez Anna et Driss. Il a aujourd’hui six ans et fait partie intégrante de cette famille. C’est alors que les services sociaux annoncent que le papa de Simon désire récupérer la garde de son fils. Pour Anna, c’est comme si le sol se dérobait sous elle…

La problématique des familles d’accueil a rarement été abordée au cinéma. Fabien Gorgeart, qui a vécu l’accueil d’un petit frère extérieur dans son enfance, a puisé dans ses souvenirs pour trouver le ton juste. Il n’y a aucun manichéisme dans son scénario ; ce n’est pas la "gentille" Anna contre le "méchant" papa de Simon, chaque protagoniste agit selon son cœur et sa meilleure volonté pour le bien de l’enfant. Et c’est pour cette raison que le film émeut tellement, car il dépeint à la perfection le dilemme écartelant que vivent Anne et son mari.

C’est sans doute le plus beau rôle de Mélanie Thierry, et ses échanges avec le petit Gabriel Pavie (qui joue Simon) sont d’une grande justesse. Qui plus est, Fabien Gorgeart réussit une fin à la fois digne, pudique et inoubliable.

La place d’une autre

L’affiche de "La place d’une autre"
Lyna Khoudry et Sabine Azéma dans "La place d’une autre"

La France à l’aube de la Grande Guerre. Nélie, sans le sou, pour éviter de finir comme fille de joie, réussit à se faire engager comme brancardière et va, dès le début du conflit, être envoyée au front. Là, elle fait la connaissance de Rose, une jeune femme qui espère, grâce à une lettre de recommandation de son défunt père, devenir lectrice pour une vieille amie de ce dernier, une riche veuve qui vit à l’abri des hostilités. Lorsqu’une explosion laisse Rose dans le coma, Nélie s’empare de la précieuse lettre et va tenter de prendre sa place auprès d’Eléonore, la dame de bonne famille…

La réalisatrice Aurélia Georges a eu la bonne idée d’adapter un roman peu connu de Wilkie Collins. Cet auteur anglais, ami (et rival) de Dickens, est considéré à juste titre comme un des pères du roman policier moderne, et ses classiques "La pierre de lune" et "La femme en blanc" sont des véritables "page turner". Collins s’est toujours passionné pour les thèmes d’usurpation d’identité, d’imposture et de différences de classe : on retrouve tout ça dans "La place d’une autre", et le transfert de son intrigue dans la France de 14-18 tient la route. La mise en scène d’Aurélia Georges, est sans génie mais esthétiquement raffinée, et le casting adéquat. Lyna Khoudri (vue dans "Papicha", "Hors Normes" et "The french dispatch") est touchante dans le rôle de Nélie, et Sabine Azéma (très discrète depuis la mort de son compagnon cinéaste Alain Resnais) reste très sobre dans le rôle d’Eléonore. Bref, voilà un film qui donne envie de se (re) plonger dans l’œuvre de Wilkie Collins

Le roman "Passion et repentir", adapté par Aurélia Georges est disponible aux Editions Phébus

LA PLACE D'UNE AUTRE d'Aurélia Georges

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Belle

L’affiche de "Belle"
L’affiche de "Belle" © DR

Dans ce film d’animation japonais de Mamoru Hosoda (auteur de "Mirai"), on suit une adolescente timide et introvertie, orpheline de mère, Suzu, qui vit une existence morne avec son père dans une petite bourgade. Tout change lorsque Suzu s’inscrit sur la plateforme de réalité virtuelle U, et s’y invente un avatar, Belle, qui accomplit son fantasme secret de devenir chanteuse. Charismatique, suivie par des millions de fans sur U, Belle est fascinée par un autre avatar, la Bête. Dans le monde réel, Suzu n’a plus qu’une obsession : trouver qui se cache derrière l’avatar de la Bête.

"Belle", c’est un astucieux – opportuniste ? – mélange entre "A star is born" et "Beauty and the Beast" – l’hommage au film d’animation des studios Disney est d’ailleurs très appuyé -, le tout saupoudré d’une pincée de réalité virtuelle et de Metaverse, décidément très à la mode. Sur le plan graphique, le film s’inscrit dans les standards graphiques conventionnels de l’animation japonaise. Comme si celle-ci, après avoir innové avec les films de Miyazaki, se reposait désormais sur ses acquis et n’effectuait plus la moindre recherche pour sortir des sentiers battus. "Belle" est donc un film qui séduira les amateurs du genre, mais qui n’apporte pas grand-chose de neuf à la discipline.

BELLE (Animation, 2021) Mamoru Hosoda

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