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Les enfants palestiniens en détention militaire : l’expo au parlement belge que des organisations juives contestent

Dans le péristyle du Palais de la Nation, 16 photographies qui déclenchent la polémique.

© D.R.

Les services de la Chambre ont rarement dû affronter une telle tempête. Ils reçoivent depuis une semaine des dizaines de messages, parfois virulents, qui exigent le retrait d’une exposition de photos installée dans le péristyle du Palais de la Nation.

Il s’agit de 16 photographies et infographies illustrant les arrestations et la détention d’enfants palestiniens par l’armée israélienne. Intitulée, "L’intolérable : les enfants en détention militaire", l’expo a été montée par l’aile belge de l’ONG Défense des Enfants International (DEI-B), avec l’appui du député Ecolo Simon Moutquin.

700 enfants arrêtés chaque année

Elle met en lumière ces arrestations dénoncées à de multiples reprises par l’Unicef, des organisations de défense des droits humains et aux Nations Unies. "Chaque année, Israël arrête et poursuit environ 700 enfants palestiniens devant des tribunaux militaires, dans la majorité des cas après les avoir accusés d’avoir jeté une pierre sur un soldat israélien, explique DEI-B. Trois-quarts d’entre eux subissent des violences physiques suite à leur arrestation."

Cette présentation a choqué les principales organisations juives de Belgique qui ont demandé à la présidente de la Chambre Eliane Tillieux le retrait de l’exposition des locaux du parlement belge. La présidente socialiste a rejeté cette demande.

"Diaboliser l’Etat d’Israël et ses habitants"

"Cette exposition contient des allégations volontairement décontextualisées et elle véhicule une vision à l’opposé des valeurs et des principes démocratiques de l’Etat d’Israël", argumente Le Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique. Le CCOJB accuse les organisateurs de l’exposition d’être motivés par un "militantisme haineux et dogmatique" et de se livrer à "une inacceptable importation du conflit très complexe prévalant au Moyen-Orient".

Côté flamand, le Forum der Joodse Organisaties estime que le seul but de l’exposition est de "diaboliser l’Etat d’Israël et ses habitants". La coupole des organisations juives poursuit en affirmant que "les parents palestiniens élèvent souvent leurs enfants dans la haine aveugle d’Israël et des Juifs et les tuent même comme kamikazes".

L’ambassade proteste

L’expo a également déplu à l’ambassade d’Israël en Belgique, qui martèle l’accusation : "Les Palestiniens utilisent systématiquement des enfants pour la terreur et en sont fiers", écrit sur Twitter l’ambassadrice Idit Rosenzweig-Abu, qui interpelle le Parlement fédéral.

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La présidente de la Chambre a répondu à l’ambassadrice en lui rappelant l’importance du principe de liberté d’expression au sein d’une assemblée parlementaire. "Le parlement est le lieu par excellence de la liberté d’expression dans lequel toutes les sensibilités politiques ont le droit de s’exprimer dans le respect des valeurs fondamentales sur laquelle notre démocratie est basée", précise Eliane Tillieux.

Des attaques d’une violence sans précédent

Simon Moutquin, lors du vernissage de l'exposition.

Pour le député qui a invité l’exposition dans les locaux du parlement, ces accusations ont un relent xénophobe. "Ce sont des propos profondément nauséabonds", déplore Simon Moutquin. "J’ai traversé plusieurs fois la Palestine, et je peux dire que les enfants palestiniens sont avant tout éduqués dans une envie de liberté et de pouvoir jouir de leurs droits. Même s’il existe des exceptions, comme partout."

Lui qui est actif sur le dossier palestinien depuis près de 20 ans se dit très choqué par ces attaques "d’une violence sans précédent". Les services de la Chambres ont reçu une avalanche de messages hostiles réclamant la disparition des photos exposées. Le député Ecolo a lui-même été la cible de nombreux appels d’insultes et de menaces.

Soutien du terrorisme

L’exposition avait été approuvée par la conférence des présidents des groupes politiques de la Chambre. La branche palestinienne de Défense des Enfants Internationale (DCI-Palestine) est soutenue de longue date par la Belgique, ce qui a déjà provoqué des tensions avec Israël.

Les autorités israéliennes ont classé DCI-P, comme d’autres ONG palestiniennes, comme organisations soutenant le terrorisme. Elles ont demandé aux gouvernements américains et européens de mettre fin aux financements accordés à ces organisations. Après examen du dossier, les pays européens et les États-Unis ont rejeté les accusations israéliennes et repris leurs financements.

L’Association belgo-palestinienne interprète les appels à l’interdiction de l’exposition comme "une tentative de plus de réduire au silence les défenseurs des droits humains en Palestine". L’ABP publie à cette occasion un communiqué commun avec deux organisations progressistes juives, l’UPJB et l’EAJS. Elles contestent la prétention du CCOJB et du Forum néerlandophone à parler au nom de l’ensemble des associations juives, qui nourrirait "l’amalgame détestable entre défenseurs du colonialisme israélien et population juive dans son ensemble".

L’exposition sur les arrestations d’enfants palestiniens avait été inaugurée jeudi dernier au parlement, en prévision de la Journée internationale des droits de l’enfant du 20 novembre. Elle était visible durant une semaine. Elle sera donc démontée ce 24 novembre comme prévu.

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