Tendances Première

Les femmes, vieilles à 50 ans ? Comment renverser ce cliché qui a la peau dure

Notre société cultive la jeunesse et impose un modèle toxique qui rend les femmes esclaves du temps qui passe. Dans son ouvrage "Et si les femmes avaient le droit de vieillir comme les hommes ?" (Ed. L’Iconoclaste), Amanda Castillo pousse un cri de colère et se demande : "À quel âge une femme devient-elle 'un objet périmé' ?"ronique Thyberghien et Cédric Wautier reçoivent Amanda Castillo, journaliste suisse pour le magazine Elle.

Vieillir n’est pas une fatalité ni forcément négatif. Les deux sexes vivent la même difficulté de la perte d’énergie qui va de pair avec l’âge mais l’homme ne subit pas la même stigmatisation. Pour les femmes, l’âge est plus problématique.

Etre réduite à un corps désirable ou pas, pousse les femmes à mentir sur leur âge. Ça commence très tôt. Ainsi, cette jeune fille de 14 ans qui se questionne sur le fait de sourire ou non, en prévision de ses futures rides. "Il s’agit de décoloniser nos esprits des clichés véhiculés via la publicité́, le cinéma, la littérature, … Il y a quelque chose de très toxique de réduire la valeur sociale d’une femme à l’image qu’elle projette" souligne Amanda Castillo, également journaliste à Paris Match, et à Le Temps.

Je me fous de la publicité et de ses clichés. Je suis vieille, je prends ma vie en main et je la vis bien.

Témoignage d’une auditrice de Tendances Première.

Augmenter la visibilité des femmes épanouies 'malgré leur âge'

Pour Amanda Castillo : "La publicité où l’on voit quasi uniquement les femmes de 50 ans parler de leurs prothèses auditives ou de leurs pertes urinaires est en net décalage avec la réalité. Beaucoup de cinquantenaires sont en pleine forme et ne vivent pas du tout ce qui est montré".

Pourquoi ce décalage et comment persiste-t-il ? Selon l’auteure, 8000 ans de patriarcat sont passés par là. Les hommes détiennent majoritairement le pouvoir et dirigent ces industries de l’image. On a vraiment intériorisé ce modèle où la valeur d’une femme est corrélée à sa jeunesseAu cinéma, on nous abreuve, sans que cela soit remarqué, de femmes jeunes, minces, 'pas de rides, pas de mou' au bras d’hommes plutôt âgés et qui pourraient être leur père. Heureusement, certains films font progresser le débat mais ils sont peu nombreux. Plus une actrice vieillit, plus les rôles se font rares comme le témoigne Blanche Gardin par exemple, qui vit une vie de femme épanouie et qui à 46 ans, s’interroge sur ce fameux tunnel où les femmes de la cinquantaine disparaissent des écrans.

Que mettre en place pour sortir de ce cliché ?

"Il faudrait davantage de scénarios avec des femmes plus âgées. Beaucoup d’histoires réelles et inspirantes existent dans lesquelles la femme n’est pas cantonnée à des représentations d’impuissance et de passivité. Eduquer ses enfants avec des films, des livres et autres produits culturels où le féminin est valorisé. Renforcer l’estime de soi et renverser les clichés, comme le fait Florence Foresti, fraîchement cinquantenaire cette année, qui avec humour, parle de son amant de seize ans de moins qu’elle" précise Amanda Castillo.

Trouver des contre-exemples dans l’Histoire

© Getty Images

Amanda Castillo observe qu’au cours de l’Histoire des contre-exemples existent. Quatre femmes remarquables, telles Lou Andreas Salomé, Georges Sand, Benoîte Groult et Dominique Rolin, assument la responsabilité de leur propre bien-être et ne se laissent pas définir par les standards sexistes de la culture patriarcale. Elles sont l’inverse de la femme qui n’existe qu’à travers le regard de l’homme. Elles sont l’exemple que l’âge venant nous veut aussi du bien.

Dominique Rolin, romancière belge décédée à l’âge de 99 ans, toute sa vie durant, a puisé sa joie dans son travail. Elle s’est exclamée à 87 ans : "Quand donc cesserais-je d’être jeune ? Le temps n’existe pas !"

En conclusion, l’auteur refuse d’être enchaînée par un chiffre qui sert à se comparer en permanence. "Les gens ont besoin de vous situer dans une catégorie. Or, quatre âges coexistent : chronologique, biologique et sociétal mais aussi perceptif. Deux siècles plus tôt, avoir 40 ans, c’était le début de la vieillesse. Traverser tous les âges de la vie en savourant chaque étape est magnifique. Chaque âge a quelque chose à nous apprendre."

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