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"Les lapins ne mangent pas de carottes" d’Hugo Clément, ou l’urgence de changer de regard sur le vivant

Le Mug d'ouverture

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Elevage intensif, chasse, maltraitance des animaux, le journaliste Hugo Clément dresse un constat sans appel sur notre rapport aux animaux et sur la nécessité de changer d’urgence notre regard sur le vivant dans Les lapins ne mangent pas de carottes. Car l’image que nous avons des animaux correspond rarement à la réalité. Il nous faut donc déconstruire les représentations et les pratiques que nous perpétuons de génération en génération.

Non, les lapins ne mangent pas de carottes, ils mangent de la verdure, rappelle Hugo Clément. Et si tout le monde le croit, c’est notamment à cause du dessin animé Bugs Bunny. Une idée fausse qui a été reprise dans tous les livres pour enfants.

"C’est un malentendu, parce que les lapins dans la nature mangent les fanes des carottes, mais pas la carotte elle-même, qui est même mauvaise pour eux, parce que c’est trop sucré."

L’auteur part de cette anecdote qui prête un peu à sourire pour décrypter toutes les idées reçues que l’on a sur les animaux, pour pointer notre anthropocentrisme, notre sentiment de supériorité, ainsi que le fait d’en manger, qui est une construction culturelle.

L’élevage intensif

Hugo Clément ne dit pas que nous devons tous être végétariens ou vegan, mais simplement qu’il faut réduire notre niveau de consommation, parce que l’élevage intensif cause énormément de dégâts sur l’environnement, fait souffrir les animaux, pose des problèmes pour notre santé.

La violence fait partie des écosystèmes, avec le rapport entre la proie et le prédateur, mais il faut se poser la question de savoir si la violence que l’on inflige aux animaux est nécessaire à notre survie.

La réponse est non : on n’a pas besoin de manger autant de viande, de chasser autant d’animaux, d’enfermer autant d’animaux sauvages derrière des barreaux.

D’autant plus que tout cela menace notre survie, puisque l’élevage intensif est la première cause de déforestation, pollue les rivières, dégage d’énormes quantités de gaz à effet de serre. Il y a donc urgence à revoir notre rapport aux animaux.

3 millions d’animaux sont abattus chaque jour en France. A cette cadence, il n’est pas possible de le faire correctement et sans infliger de souffrance. En France, la norme dans les élevages industriels de poulet de chair est de 22 poulets par m², soit une feuille A4 par poulet… "Donc, il ne peut pas y avoir de bien-être animal dans ces conditions."

 

Les responsables, c’est nous, les consommateurs. On consomme, en France, 86 kilos de viande par an et par personne. […] Cela suppose forcément de l’élevage intensif. Donc il faut absolument réduire cette masse de consommation, si on veut revenir vers un élevage plus paysan et plus respectueux des animaux et de l’environnement.

L’élevage intensif détruit aussi des emplois. La France compte beaucoup moins de paysans qu’il y a 30 ou 40 ans, alors qu’on produit beaucoup plus d’animaux. L’intensification de l’élevage a détruit des emplois paysans et de nombreuses fermes. Une personne seule suffit par exemple pour gérer un élevage de milliers de lapins.

Et on constate le même phénomène pour la pêche industrielle. Les gros chalutiers industriels, notamment hollandais, pêchent tellement de poissons qu’ils détruisent des petits emplois de pêcheurs côtiers.

Les conditions de vie dans les élevages industriels sont, par ailleurs, déplorables pour les animaux : nourriture de mauvaise qualité, beaucoup de stress, de médicaments, notamment d’antibiotiques, quand ce n’est pas du désinfectant pour l’eau de boisson…

L’élevage intensif, c’est un enfer pour les animaux, mais souvent aussi un enfer pour les éleveurs qui y travaillent, car ils sont pris au piège de leur dette.

La détention dans un zoo

Les zoos ne sont pas la priorité du combat pour les animaux, parce que ce n’est pas là où ils sont le plus mal, comparé aux élevages intensifs. Mais Hugo Clément rappelle que la détention d’espèces sauvages dans un espace restreint, aussi grand l’enclos soit-il, est une maltraitance en soi. Tout comme le fait d’imposer la cohabitation forcée avec d’autres espèces, de séparer les animaux de leur progéniture, de les empêcher de se déplacer librement.

"Et qu’est-ce qu’on apprend sur la vie des animaux en les observant derrière une vitre ?" questionne-t-il. Rien. C’est bien plus efficace et plus magique, d’aller en forêt rencontrer les animaux sauvages, même si c’est de façon plus fugace.

La chasse en question

22 millions d’animaux ont été abattus sur la saison 2013-2014, dont 80% sont des oiseaux et des espèces vulnérables. La chasse a donc sa part dans la disparition des espèces sauvages, la première cause restant l’agriculture intensive et les produits phytosanitaires qui font disparaître les insectes.
On continue, par exemple, à chasser les alouettes des champs dont la population a diminué de 30% en 30 ans.

On continue à exercer une pression de chasse sur des espèces qui, par ailleurs, sont déjà en déclin. […]
Et pire que ça : on chasse aussi des espèces d’élevage. En France, on a 5 millions de faisans et perdrix qui sont élevés en captivité, qui sont lâchés et sur lesquels on tire, comme si c’était du ball-trap sur un animal vivant. […]
Infliger ces souffrances aux animaux, juste pour s’amuser, ça, ce n’est plus acceptable.

La biodiversité, c’est comme une maison

Pour Hugo Clément, la question de la souffrance animale n’est absolument pas un combat secondaire, parce que se battre pour les animaux, c’est se battre pour les êtres humains. "On a besoin des autres animaux pour vivre, on a besoin qu’ils soient en bonne santé, dans une diversité."

La biodiversité, c’est comme une maison, chaque espèce est une brique, explique-t-il. Si on en enlève quelques-unes, il ne se passe rien, mais le jour où vous en enlevez des milliers, tout s’effondre et on meurt tous ensemble.

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