Les orangers à nouveau de sortie au Château de Freÿr: « Nos plus vieux orangers ont entre 270 et 310 ans »

Sébastien Conil est architecte paysagiste. Il a également suivi une formation en Histoire de l’art. "C’est nécessaire pour travailler dans des jardins historiques, commente-t-il. Par exemple, récemment, on a fait des tranchées et on est retombés sur les anciens aqueducs d’évacuation d’eau, des ouvrages datant du 18ème siècle. On avait un plan donc on savait où ils se trouvaient mais pas à quelle profondeur, et ce plan s’est révélé être exact. On a retrouvé ces ouvrages en parfait état. Ils fonctionnent toujours."

A partir du 17ème siècle, les châteaux disposent régulièrement d’une orangerie, un bâtiment à plusieurs fenêtres (de plus en plus larges au fil des ans), parfois légèrement chauffé, où l’on stocke les plantes pour l’hiver. Peu à peu, ces orangeries deviennent un signe de prestige pour le châtelain.

Au château de Freÿr, les orangers sont mentionnés pour la première fois dans les comptes de la seigneurie de Freÿr. On peut y lire en date du 11 octobre 1710 que Raymond, un valet, a reçu une rétribution de 12 sols pour "avoir porté les orangers dans le jardin par ordre de Mr le baron de Freÿr". Les orangeries de Freÿr sont les plus anciennes des Pays-Bas.

Le jardinier sort les orangers, un à un, de l’endroit où ils ont passé l’hiver. "La période dans les orangeries, c’est quand même une période compliquée pour les plantes. C’est comme un frigo. C’est donc une grande joie de les sortir parce qu’elles retrouvent le grand air, les précipitations… c’est leur place d’être dehors. Ça fait partie du rythme du jardin. La sortie des orangers, c’est l’élément principal du printemps et le jardin est un peu nu sans eux ; donc là, on habille le jardin."

Il faut disposer chaque caisse – numérotée – à sa place. "Elles sont numérotées au moins depuis le début du 20ème siècle." Un tableau de 1836 les montre dans la même configuration que la configuration actuelle, autour de deux étangs du domaine. "Au 19ème siècle, des femmes venaient récolter les fleurs des orangers de Freÿr. Ensuite, il y a eu la concurrence du bassin méditerranéen qui a fait que c’est devenu obsolète."

Une gravure datée de 1740 (environ) les montre au contraire regroupés, serrés contre les orangeries.

La majorité des orangers des jardins de Freÿr sont des bigaradiers, qui produisent des oranges amères dont on fait de la marmelade. "La particularité de nos oranges, c’est qu’elles produisent un jus assez sucré, ce qui est assez rare."

Difficile de connaître l’âge exact des plus vieux orangers. "Pour connaître leur âge exact, il faut faire une coupe et compter les cernes quand ils sont morts", explique Sébastien Conil. C’est ce qui a permis de dater quelques spécimens, il y a quelques années. "On a des dates de 270, 290 et 310 ans. C’est la fourchette dans laquelle se place une quinzaine d’orangers qu’on a ici."

Le Château de Freÿr ouvre ses portes au public tous les week-ends et jours fériés d'ici fin juin.