Sciences insolites

Les réalités scientifiques de la série The Last of Us : un champignon pourrait-il un jour infecter les humains ?

© Getty Images

La série The Last of Us, dérivée du jeu vidéo du même nom, présente une pandémie fongique mortelle. Mais est-il possible qu’un jour le scénario de The Last of Us devienne réalité ?

Dans le troisième épisode de The Last of Us, on apprend les origines de la pandémie. Joel explique que le cordyceps existait déjà (ça on le savait), qu'il a muté puis infecté un ingrédient universel comme la farine ou le sucre, distribué partout dans le monde. Plus les gens en ont mangé, plus vite ils ont été infecté, le champignon a ensuite pris le contrôle du corps des hôtes et s'est répendu.

Après avoir établi qu’il existe bel et bien des champignons capables de prendre le contrôle de leurs hôtes (insectes), que le champignon star de la série, le cordyceps, existe dans les forêts tropicales et qu’il existe des maladies qui peuvent prendre le contrôle de notre comportement, voyons ce que les experts pensent du scénario et s’il est possible qu’un jour un champignon puisse prendre le contrôle des êtres humains et les transformer en zombies.

David Hughes, professeur de sécurité alimentaire à Penn State, directeur de PlantVillage et expert en champignons zombies qui a été consultant sur le premier jeu The Last of Us, a déclaré à Forbes qu’il n’est "pas si fantaisiste" d’imaginer une infection fongique se propager chez l’homme mais il souligne que ce champignon perdrait ses pouvoirs de contrôle de l’esprit dans le processus de transfert entre espèces.

L’infection fongique chez l’homme est un phénomène relativement moderne, des espèces de champignons pouvant attaquer le corps humain comme la mérule (les poumons) ou les mycoses. Il y a peu d’exemples jusque dans les années 1980 ce qui n’a pas encore beaucoup permis d’étudier du phénomène et il n’y a, à ce jour, pas de programmes de recherche sur les vaccins antifongiques…

Le scénario de The Last of Us pourrait-il devenir réalité un jour ?

Selon Donald Vinh, professeur agrégé, Département de médecine, Division des maladies infectieuses à la McGill University de Montréal, le danger des maladies fongiques pour l’humain sont réels : "La combinaison du changement climatique, des progrès de la médecine et des antifongiques limités est la recette parfaite pour un fléau fongique."

"Les champignons s’adaptent déjà à des températures plus chaudes et étendent leur emplacement, ce qui entraîne davantage d’infections."

"Pendant ce temps, les progrès de la médecine conduisent à des patients plus sensibles et les médicaments antifongiques disponibles perdent leur efficacité. Le fléau fongique n’est peut-être pas aussi flagrant qu’une pandémie virale, mais à travers les infections croissantes chez les humains à risque et la destruction subtile des cultures et de la faune, les ramifications pourraient être tout aussi dévastatrices."

 

  • L’humain meurt déjà aujourd’hui à cause des pathogènes fongiques

"Il existe de nombreux champignons infectant le cerveau des êtres humains partout sur la planète, souvent avec des résultats dévastateurs", a déclaré à Sky News le professeur Elaine Bignell, leader mondial dans le domaine de la recherche sur les pathogènes fongiques humains. "Un certain nombre d’espèces fongiques sont des agents pathogènes assez importants et tuent des centaines de milliers de personnes chaque année, c’est juste que le public n’en est pas bien conscient."

Cependant, même si un champignon nous infecte, nous ne deviendrons pas un zombie pour autant. Une idée soutenue par la Professeure Elaine Bignell, leader mondial dans le domaine de la recherche sur les agents pathogènes fongiques humains à Sky News : "Certains champignons peuvent être transmis d’une personne à l’autre – et dans l’environnement, nous y sommes exposés tout le temps – mais il faudrait une variante très importante pour pouvoir provoquer le genre d’événement d’extinction d’espèces qu’ils dramatisent [dans la série]."

 

  • Infection oui, zombie non

Mais on ne devrait pas arriver à un scénario catastrophe équivalent à celui de The Last of Us où la majorité de l’humanité est décédée ou transformée en zombie.

Comme Charissa de Bekker, experte en champignons parasites et professeure adjointe à l’Université d’Utrecht aux Pays-Bas, dans un article de le NRC Handelsblad, l’explique, le champignon qui pourrait un jour nous infecter n’aura pas les "outils pour aller manipuler notre cerveau". Ces champignons ont effectivement développé des stratégies pour manipuler des insectes hôtes spécifiques mais ce processus à durer des millions et des millions d’années. Chaque espèce ne sait infecter qu’un seul insecte en particulier.

Dans le jeu et la série, les cordyceps (champignons) envahissent le cerveau de l’hôte ce qui n’est pas du tout le cas dans la nature où, comme l’explique David Hughes, professeur de sécurité alimentaire à Penn State, "les champignons zombies évitent en fait le cerveau et manipulent le comportement avec des signaux chimiques". Une découverte est assez récente et qui n’a été publiée qu’après la sortie du premier jeu et soutenue par Charissa de Bekker pour Vox : "Nous pensons que ce champignon sécrète certains produits chimiques qui peuvent se lier ou interagir avec des récepteurs ou d’autres types de protéines qui sont liés au système nerveux, et donnent normalement lieu à différents comportements."

 

  • Le changement climatique pourrait-il avoir un impact ?

Il existe quelque 150.000 espèces de champignons identifiées dans le monde, (on estime qu’il en existerait des millions), et très peu ont les capacités pour faire face à la température de 37 °C ainsi qu’aux autres conditions imposées par le corps humain (système nerveux, physiologie, …).

Cependant, comme le soutient William C. Beckerson, chercheur postdoctoral qui étudie les Ophiocordyceps à l’Université d’Utrecht, à Inverse : "une des conséquences indirectes du réchauffement climatique est en effet l’émergence de nouveaux pathogènes fongiques". En effet, selon l’expert, à mesure que les températures environnementales se rapprochent de 37 degrés (la température corporelle des humains), les humains deviennent de plus en plus probablement un candidat hôte pour les agents pathogènes fongiques, "les micro-organismes comme les champignons sont particulièrement bons pour s’adapter à l’augmentation des températures et à un rythme étonnamment rapide".

Il ne faut donc jamais dire jamais, "peut-être que certains [champignons] pourraient potentiellement faire cette transition d’un mode de vie à un autre et devenir pathogènes dans un contexte auquel nous n’avions pas pensé auparavant", conclut le professeur Bignell.

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