Economie

Les toutes-boîtes vont-ils disparaître en 2023 ?

Le marché matinal

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Pour eux, le toutes-boîtes papier est bien mort : en France, plusieurs enseignes ont annoncé la fin de la distribution de folders toutes-boîtes. Chez Cora France, c’est déjà fait. Louis Delhaize va suivre. Et ce sera effectif en septembre 2023 pour E.Leclerc.

Chez E.Leclerc, l’annonce est doublée d’une campagne sur les propres outils de communication de l’enseigne française, mais aussi des spots sur les grands médias de l’Hexagone. C’est donc plusieurs mois de préparation, de transformation d’habitudes, pour les clients accoutumés à feuilleter leur folder hebdomadaire et surtout pour les basculer en douceur vers les solutions digitales telles que les sites internet, les applications de magasins ou de cartes de fidélité.

Campagne de E.Leclerc, à propos de la suppression des folders 

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Une indispensable stratégie d’accompagnement

Voilà une stratégie intelligente mais indispensable pour ne pas mettre le client devant le fait accompli, car un client désarçonné peut facilement devenir un client perdu. Dans le secteur de la grande distribution, la concurrence est particulièrement forte et notamment en Belgique où la concentration des enseignes est importante. La pédagogie vers le consommateur est donc un travail indispensable pour les grands magasins.

On verra que, en Belgique, les suppressions de folders ne sont pas encore la norme mais le secteur est en pleine réinvention : moins de papier, des envois plus ciblés géographiquement, des applications plus performantes, etc.

Pourquoi se passer du papier ?

Se passer du papier ? Les raisons sont multiples. Les grandes surfaces mettront en avant l’aspect écologique : moins de papier, moins de déchets, moins de transports, plus de bénéfices pour la planète. Et pas mal de consommateurs affublent désormais leur boîte aux lettres de l’autocollant STOP PUB.

Mais l’argument économique est décisif. Le prix du papier a flambé, les frais d’impression et de distribution ne font plus le poids par rapport au coût de production et de diffusion d’un folder électronique.

D’autant que, en Belgique, la distribution du folder dans les boîtes aux lettres, de façon non adressée, fait l’objet d’une taxe communale, qui peut représenter un tiers du budget, une charge qui n’existe pas dans les autres pays européens et dont se serait bien passé le secteur en plein chambardement.

D’où l’importance d’embarquer les clients, tous les clients, vers un monde sans papier.

2 milliards de folders

En Belgique, la société BD Media est le distributeur le plus important, il assure 75% de la distribution des folders en Belgique. Et le nombre d’exemplaires pour cette société est loin d’être insignifiant : 2 milliards de pièces annuelles. Un chiffre qui reste impressionnant mais en diminution constante, puisqu’il était à près de 5 milliards il y a cinq ans. " On a connu une assez grande chute des volumes, reconnaît Raf Lambix, le CEO de BD Media, à cause notamment de la crise du coronavirus et du développement de l’e-commerce. Ça se marque surtout sur le secteur non-food et de l’électroménager où plusieurs magasins ont arrêté leur production de folders. "

Les clients le plus importants aujourd’hui sont les grandes surfaces de l’alimentaire et du bricolage.

On utilise surtout le digital quand on sait ce qu’on veut vendre et pour les biens qui ont plus de valeur, commente Raf Lambrix. Là, on va chercher sur l’internet. Mais pour les achats quotidiens, on va comparer les folders."

Et certaines périodes restent fastes pour les folders, notamment la fin d’année (avec la Saint-Nicolas, et les fêtes de fin d’année), ainsi que le début du printemps, en particulier pour les enseignes de bricolage.

Le Belge attaché à son toutes-boîtes

Malgré une diminution du nombre de publications, le Belge reste attaché à son folder. Chaque année, BD Media sonde les clients et évalue l’impact des folders, une enquête menée sur un millier de personnes. Comme on le voit dans le graphique ci-dessous, les versions digitales progressent mais ceux qui ne consultent que des folders digitaux restent très minoritaires (4%).

Enquête "Door to Door Impact Survey" 2022 (BD Media) 

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Autre chiffre intéressant : le temps consacré à lire ou parcourir le dépliant publicitaire. Pour ceux qui s’en saisissent, le temps moyen qui y est consacré est de 21 minutes hebdomadaires.

"Les études montrent que le folder est un médium qui fonctionne, argumente le patron de BD Media, c’est un moyen non intrusif, on le lit quand on le souhaite. L’étude montre également le lien fort entre le folder et l’achat : 47% des personnes qui ont répondu à l’enquête utilisent "presque toujours" le folder pour dresser la liste des courses. Et le lien avec le bon de réduction, dont le Belge est particulièrement friand, est également très clair : 62% des bons de réduction proviennent des folders, 36% sont imprimés depuis un site internet.

L’avenir, c’est certain, passera par la combinaison des moyens. "Le folder est aujourd’hui encore et toujours un des médias principaux de notre media-mix, confirme Julien Wahieu, le porte-parole de Lidl. Mais la forme digitale prend de plus en plus d’importance. Nos clients s’informent de plus en plus 'on line', via notre site web ou notre application. Nous envoyons encore 1,8 million de folders par semaine."

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Le papier, c’est fini à Anvers et Bruxelles pour Carrefour Belgique

Chez Carrefour Belgique, on teste depuis cinq ans différentes formules pour observer le comportement des clients face à une diminution ou une suppression des folders. "On a supprimé les folders sur certaines zones, dans des petites villes, comme Louvain-La-Neuve ou Malmedy, mais aussi à Bruxelles et Anvers, décrit Syrin Stambouli, porte-parole de Carrefour. On s’est rendu compte qu’on continuait à vendre de la même façon en magasin, que ce n’était pas un problème pour notre clientèle. Nous avons du coup supprimé les folders à Bruxelles et à Anvers."

Le constat est semblable chez Lidl. "Nous avons réduit le nombre de folders dans les grandes villes, confirme le porte-parole, car nos clients s’informent plus via les canaux online."

Les clients des centres urbains sont clairement plus enclins à accepter une relation digitale avec leur(s) grande(s) surface(s). "En fonction des endroits, on diminue parfois la fréquence des folders, poursuit Syrin Stambouli, on encourage les courriers plus personnalisés, qui sont aussi plus petits en termes de pages. Et le folder reste disponible dans les magasins.

En 5 ans, Carrefour Belgique a diminué son volume de folders de 15%.

Toutes les enseignes ont embarqué dans le train du folder digital ou de l’application personnalisée. Et 2023 pourrait marquer une accélération. Début janvier, Cora Belgique rattrapait son retard en annonçant le lancement de son application avec, comme pour d’autres magasins, des offres personnalisées, la possibilité de commander en ligne ou d’établir sa liste de courses.

Chez Delhaize, on semble de plus en plus miser sur le digital, en encourageant ses clients à se procurer le folder en magasin s’il n’arrive pas dans la boîte aux lettres. Dans sa dernière newsletter, l’enseigne au lion, qui a récemment sondé ses clients via une enquête en ligne, donne une primeure à ses consommateurs digitaux, qui peuvent désormais découvrir les promos de la semaine avec trois jours d’avance. Elle pourrait opérer des changements importants en ce début 2023.

Et les entreprises spécialisées dans la distribution des folders, elles aussi, se transforment. BD Media, qui a développé il y a plusieurs années, l’application MyShopi, se diversifie en proposant des pistes digitales et, en matière de distribution papier, des distributions plus ciblées, plus géolocalisées.

Et les entreprises spécialisées dans la distribution des folders, elles aussi, se transforment. BD Media, qui a développé il y a plusieurs années, l’application MyShopi, se diversifie en proposant de nouvelles pistes digitales et logistiques et, en matière de distribution papier, des diffusions plus ciblées, plus géolocalisées, plus saisonnières.

D’ailleurs, Raf Lambix, son CEO, croit toujours en l’avenir du papier. "Je suis convaincu que le papier va rester, avec volumes plus bas, d’une autre manière. On voit qu’Aux Etats-Unis, le papier commence à remonter, notamment sous forme de catalogue, pas chaque semaine, mais destiné à inspirer les gens."

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