Cela pourrait être le scénario d’un film. Et pourtant, point de science-fiction à la "Invasion Los Angeles" de John Carpenter ici mais bien une réalité scientifique relatée par le prestigieux magazine Science. Depuis plusieurs décennies, deux étranges masses titanesques de plusieurs milliers de kilomètres profondément enfouies au cœur de notre planète Terre intriguent les géophysiciens du monde entier. Proches du noyau terrestre, plus denses et plus chaudes que les roches environnantes, ces superstructures à la composition inconnue seraient capables d’absorber et de ralentir les ondes sismiques ainsi que de perturber le champ magnétique terrestre.
2900 kilomètres sous terre
Baptisées superpanaches, cryptocontinents ou encore LLSVP (pour Large Low Shear Velocity Provinces), ces masses à l’origine inconnue, sont respectivement enfouies sous l’Afrique et l’Océan Pacifique, à environ 2900 kilomètres dans les tréfonds de la Terre, une distance beaucoup trop importante pour pouvoir les atteindre et percer leurs secrets. Qu’à cela ne tienne, lors de la très sérieuse 52e Conférence sur les sciences lunaires et planétaires qui s’est tenue à Houston il y a quelques jours, une équipe de chercheurs de l’Arizona State University a présenté un modèle susceptible d’expliquer l’origine de ces étranges superstructures.
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Un cataclysme vieux de 4,5 milliards d’années
S’il ne fait aucun doute que ces masses sont présentes au cœur de la Terre depuis très longtemps, Qian Yuan et ses collègues ont émis l’hypothèse qu’elles seraient les vestiges de Théia, une protoplanète extraterrestre (embryon de planète formé de divers corps célestes attirés entre eux) de la taille de Mars entrée en collision avec la Terre il y a 4,5 milliards d’années. Un impact cataclysmique qui aurait donné naissance à la Lune et au cours duquel Théia aurait pu faire pénétrer une grande quantité de roches denses au plus profond de la Terre.
Le modèle suggère en effet qu’après la collision, le noyau de Théia aurait rapidement fusionné avec celui de la Terre. Quant au manteau de la protoplanète, il aurait survécu et aurait fini sous forme "d’éclats" incrustés dans le manteau de la Terre, moins dense. Eclats dont les plus importants seraient les deux crypto-continents.
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D’autres planètes miniatures
Une hypothèse renforcée par l’analyse des roches ramenées lors des diverses missions Apollo de la NASA. Celles-ci renfermaient beaucoup d’hydrogène léger, très peu présent dans les roches terrestres. Or cela n’est possible que si Théia était effectivement très massive, tout comme… les superstructures. Les futures missions lunaires de la NASA et de la Chine devraient d’ailleurs récolter des échantillons afin de valider cette hypothèse.
S’il s’agit effectivement des restes de Théia, l’impacteur géant, les autres petites poches de matière ultra-dense détectées au fil des années par les scientifiques pourraient s’avérer être des noyaux riches en fer d’autres planètes miniatures ayant également frappé la Terre primitive, faisant du sol sous nos pieds, un cimetière extraterrestre dont les deux cryptocontinents seraient les deux plus grandes tombes.