Depuis 30 ans, le pays édifie des barrages babyloniens dont Katse est la pièce maîtresse, ainsi qu’un complexe réseau de souterrains dans le cadre d’un accord avec l’Afrique du Sud : le Lesotho a fait de sa plus opulente richesse, l’eau, surnommée "l’or blanc", un produit commercialisable.
La nation de 2,2 millions d’habitants, parmi les plus pauvres de la planète, envoie 27 m³ par seconde vers Pretoria et Johannesburg (à 470 km au nord) contre une redevance qui a rapporté près de 60,8 millions d’euros l’an dernier, selon le gouvernement.
"Nous vendons de l’eau à l’Afrique du Sud mais nous n’en avons pas dans nos propres maisons", tempête Joshua Sefali, chef de la communauté de Lejone, un village du rivage où les maisons de pierres et de chaume n’ont souvent ni eau, ni électricité.
Plusieurs milliers d’hectares ont été noyés pour la réalisation des grands projets. Certains ont perdu leur maison et leurs champs, contre compensation.
Un bonnet enfoncé sur la tête, Machaka Khalala, 31 ans, piétine sur le bord de la route. Ils sont des dizaines à attendre obstinément dans le froid avec des seaux. Chaque semaine, une des fermes de poissons distribue des restes. "Les têtes et les arêtes", dit-elle. Son champ, où elle cultivait du maïs et des épinards, a été submergé. Elle a reçu 170 euros en contrepartie. Aujourd’hui, elle survit en vendant dans la rue des "fat cakes", beignets typiques, pour le petit déjeuner des travailleurs.