1770, Wolfgang Amadeus Mozart a 14 ans, il entre dans la Chapelle Sixtine, on y donne le Miserere d’Allegri, œuvre jalousement gardée à l’époque par le Vatican, qui en interdisait toute reproduction ou diffusion hors de ses murs. C’était sans compter sur le jeune Mozart, qui après l’écoute, a retranscrit l’intégralité de l’œuvre sur du papier à musique. Tout est juste, chaque notre, chaque articulation, tout. A l’écoute, Mozart distinguait toutes les notes, jusque dans les quarts de tons.
Et à cette oreille absolue s’ajoutaient chez Mozart des dons annexes, tout à fait hors normes, comme rejouer de mémoire toute une sonate vers l’âge de 3 ans ou retranscrire la partition complète d’une œuvre après une seule écoute seulement… L’oreille absolue, dans ce cas, est utile, mais les capacités hors du commun du jeune Mozart étaient d’un autre ordre, son oreille absolue ne lui servant dans ces cas-là, qu’à intégrer la bonne tonalité de l’œuvre… sa mémoire prodigieuse a fait le reste !
Car l’expression "oreille absolue" au singulier est un peu imprécise. Cela désigne plusieurs types d’aptitudes. Toutes ont en commun la reconnaissance et l’association des sons à des noms de notes. Par exemple, certaines personnes sont donc capables d’identifier les notes par leur nom, mais seulement pour le son de leur instrument, donc en fonction d’un timbre bien précis. D’autres musiciens ayant l’oreille absolue peuvent vous chanter une note que vous leur demandez sur l’instant, sans aucune référence préalable, et ils vous la chanteront juste, c’est-à-dire naturellement accordée au diapason de référence, qui est la note "la" 440Hz. Certains encore peuvent reconnaître toutes les notes d’un accord jouées en même temps ! Enfin, d’autres peuvent vous donner la note que donne une porte qui grince ou un marteau-piqueur dans la rue ou encore un coucou qui chante dans le jardin !
Une chose pourrait nous paraître étrange, c’est que les absolutistes ne chantent pas toujours juste. C’est la différence entre oreille absolue passive et oreille absolue active.
Ceux qui ont l’oreille absolue passive peuvent reconnaître les notes sans référence mais ils sont incapables de les reproduire vocalement. Par contre, ceux qui ont l’oreille absolue active sont non seulement en mesure de nommer les notes mais ils peuvent également les chanter juste.
Vous voyez donc que le spectre de l’oreille absolue est large et chaque musicien qui en dispose en est plus ou moins encombré.