L'atelier des muses

Louise Farrenc, la plus prolifique des compositrices de l’histoire de la musique classique

Louise Farrenc peinte par Luigi Rubio (1835)

© Domaine public

Par Hélène Michel via

Le Paris musical du XIXe siècle a vu naître une grande musicienne. L’une des plus grandes compositrices du romantisme, qui se place à la pointe de l’innovation musicale de son temps. Louise Farrenc, certainement la plus admirée, et la plus prolifique des compositrices dans l’histoire de la musique.

Et pourtant son enfance est ordinaire. Aucune légende merveilleuse d’enfant prodige n’accompagne ses premiers pas dans le monde musical. En revanche, elle a eu la bonne fortune de naître dans une famille éclairée, cultivée, et ouverte au monde artistique. Le père, le frère et le grand-père étaient tous les trois sculpteurs. Quant à sa marraine, elle était pianiste, ancienne élève de Clémenti, et c’est elle qui va lui offrir ses premières leçons. La petite Louise reçoit aussi l’enseignement d’Ignaz Moscheles et Johann Nepomuk Hummel.

Pianiste, soliste et compositrice…

À 15 ans, elle souhaite approfondir ses connaissances musicales, et connaître tous les secrets de la composition, et tous les procédés de l’orchestration. Elle prend des cours d’harmonie au conservatoire de Paris, auprès du compositeur tchèque naturalisé français, Antonin Reicha.

À la Sorbonne, des soirées musicales sont organisées, elle s’y produit en récital, et c’est lors d’une de ces soirées qu’elle rencontre à 17 ans, celui qu’elle allait très vite épouser : le flûtiste Aristide Farrenc, qui va tomber en admiration de son talent. Pour preuve, cette lettre qu’il envoie à Hummel :

Mme Farrenc a eu beaucoup de succès dans toutes les sociétés où elle s’est fait entendre. Je ne crois pas me tromper en assurant qu’elle a réussi comme aucune femme n’a réussi de nos jours. Pendant notre séjour en Angleterre, nous avons placé quatre manuscrits de sa composition à un prix tout à fait convenable.

Il était tellement conscient des dons exceptionnels de sa jeune épouse, qu’il va aller jusqu’à abandonner ses activités musicales pour devenir son imprésario et son éditeur, en fondant les Éditions Farrenc.

La naissance de la fille unique du couple, Victorine, en 1826, va ralentir un peu les activités de Louise Farrenc, qui continue cependant à publier ses œuvres.

… Professeure au Conservatoire et militante pour l’égalité salariale des femmes

A 38 ans, un événement fait date, elle est nommée professeur au Conservatoire de Paris, et pendant les trente années qui vont suivre, elle va diriger au Conservatoire les études d’une nombreuse génération de pianistes. Autre fait notable, durant ses années au conservatoire, elle va militer pour la reconnaissance des droits des femmes au point d’obtenir après 8 ans de lutte acharnée, l’égalité salariale avec ses collègues masculins. Elle va aussi obtenir que les vieux académiciens, d’ordinaire plutôt réactionnaires, acceptent le mot "compositrice" et l’introduisent dans le dictionnaire !

En 1845, ses Trente études op. 26 sont adoptées par le Conservatoire de Paris comme méthode officielle pour les classes de piano ; des études qui vont devenir un ouvrage pédagogique de référence.

La musicologie Catherine Legras, qui a beaucoup étudié l’œuvre de Louise Farrenc, distingue trois périodes de composition : des œuvres écrites majoritairement pour piano dans un premier temps, puis à partir de 1840 et de la musique de chambre et symphonique, enfin des œuvres à nouveau exclusivement pour piano jusqu’à sa mort en 1875 à l’âge de 71 ans. Au sein de sa très grande production, ses trois symphonies occupent une place particulière, leur première singularité étant d’avoir été écrites par une femme.

La première des trois, composée à l’âge de 37 ans, est une partition qui fut créée non pas à Paris, mais à Bruxelles, sous la direction de François-Joseph Fétis. Il reste un joli témoignage de cette soirée dans la presse musicale belge, on pouvait lire notamment dans le journal la Belgique musicale : "Il résulte pour nous de l’audition de la symphonie de Madame Farrenc que, par exception à ce qui s’était vu jusqu’à ce jour, il peut être donné à une femme de marcher avec succès dans l’épineuse et sérieuse voie des Haydn, des Mozart et des Beethoven…"

Episode 2

Episode 3

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