Le Conseil des droits de l'homme des Nations unies va à nouveau se pencher sur des situations lourdes comme le Tigré ou la répression en Biélorussie. Les Etats seront réunis dès lundi en ligne depuis Genève pour près d'un mois. La grogne contre la Suisse pour un retour en présentiel monte.
"Les sujets se précipitent et se multiplient", affirme un diplomate européen. Du coup d'Etat en Birmanie à la situation au Xinjiang, en Chine, en passant par l'impact humanitaire des violences au Tigré, en Ethiopie, ou de la situation en Biélorussie, au Nicaragua ou en Syrie, ils ne manqueront pas lors de cette réunion, 15 ans après la première de l'instance onusienne. Pour la première fois, une session de juin se rapprochera d'un mois de travaux.
Parmi les composantes les plus attendues, le rapport de la Haute Commissaire aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, sur le racisme systémique et les violences policières sera discuté. Il aura un impact sur les activités de l'instance onusienne sur cette question, a dit à la presse la présidente du Conseil, l'ambassadrice des Fidji, Nazhat Shameem Khan.
Les Etats devront décider s'ils veulent ou non un suivi. De même, Bachelet devra rendre un nouveau rapport sur la pandémie. Sur l'Ethiopie, l'ONU a estimé cette semaine que la famine au Tigré pourrait s'étendre à tout le pays. Deux projets de résolutions doivent porter sur cette situation.
Vers une résolution sur la situation au Tigré ?
Les Etats vont chercher à ne pas avoir d'approche trop agressive pour protéger les investigations sur les accusations de violations, menées notamment par l'ONU. Une résolution sur le Tigré pourrait être lancée, selon le diplomate européen.
De même, un projet sur la Birmanie devrait être à nouveau sur la table. Une déclaration conjointe, portée par le Canada, est attendue sur la situation au Xinjiang. Le directeur exécutif de l'ONG Human Rights Watch (HRW), Kenneth Roth, en attend lui davantage de Mme Bachelet sur cette question.
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La Chine avait déjà été épinglée dans une précédente déclaration par des dizaines de pays, dont la Suisse, pour l'internement de plus d'un million d'Ouïghours dans la région. Elle accuse ceux-ci d'interférence dans ses affaires.
Le sommet de Genève entre le président américain Joe Biden et son homologue russe Vladimir Poutine devrait se refléter dans les discussions, notamment sur le Bélarus où la répression est considérée comme des crimes contre l'humanité par les ONG. Plus largement, la session permettra notamment d'identifier "plus en détail le positionnement des Etats-Unis, qui sont candidats pour un siège au sein du Conseil", a dit à l'agence Keystone-ATS l'ambassadeur suisse auprès de l'ONU à Genève, Jürg Lauber.
"La direction est claire", selon lui. Alors que Biden a démarré sa conférence de presse après la réunion avec Poutine en abordant les droits humains. De son côté, le directeur de HRW est "déçu" de l'approche du président américain sur cette question avec la Russie.
Un débat devrait également avoir lieu sur le lancement ou non d'un mandat de rapporteur spécial sur le changement climatique. Problème, le financement du système onusien manque de plus en plus pour établir de nouveaux mécanismes. Un tel mandat peut coûter de 20.000 à 100.000 francs par an.
Réunion à distance ou pas ?
Autre difficulté, la session du Conseil des droits de l'homme sera à nouveau organisée en ligne en raison de la pandémie de coronavirus. Certains estiment que "la Suisse ne fait aucun effort" et que la situation sanitaire ne demande plus de se réunir à distance. Un responsable propose même de délocaliser en France voisine la prochaine réunion en septembre si la situation ne change pas. "Il faut que ce soit en présentiel", dit-il.
Et la présidente de l'instance onusienne affirme que tous les Etats membres ont validé le format par consensus. "Je n'ai entendu de personne une demande de relocaliser" la session, a encore dit Shameem Khan. Et elle s'en remet aux autorités suisses.
"Les Nations unies décident la mise en place du dispositif de protection contre la pandémie en fonction des règles sanitaires établies par la Suisse", rétorque Lauber. Selon lui, elles "n'aimeraient probablement pas une délocalisation des travaux" de leur instance et aucun site n'offre de "meilleures conditions" que le Palais des Nations genevois.
Des Etats ou des ONG ont pu participer en plus grand nombre grâce aux vidéos, ajoute la présidente, même si elle admet qu'une discussion en présentiel serait préférable. La Fidjienne souhaite même qu'un format hybride soit maintenu à l'avenir, de quoi garantir davantage l'accès des petits pays insulaires.