C’est le COC, l’Organe de contrôle de l’information policière, qui a enquêté sur cette affaire. C’est en participant à un groupe de travail d’Europol, à la Haye, aux Pays-Bas, que deux policiers de la Police judiciaire fédérale ont eu l’occasion de tester le logiciel Clearview. C’était entre le 14 et le 25 octobre 2019, "dans le cadre d’un dossier coordonné à l’échelle internationale, à savoir le National Center of Missing and Exploited Children le NCMEC", peut-on lire dans le rapport du COC. Le NCMEC est un service répressif américain auquel collabore le FBI. "La police judiciaire fédérale belge apporte également son concours aux dossiers du NCMEC", explique le COC dans son rapport d’enquête.
L’objectif du NCMEC est de rassembler des photos et images d’auteurs et victimes potentiels de violences sexuelles à l’encontre de mineurs d’âge. Il s’agit en l’occurrence d’auteurs et victimes potentiels qui n’ont pas encore été localisés.
Lors de la réunion du groupe de travail à laquelle les policiers belges ont participé, les possibilités du logiciel Clearview ont été démontrées, devant les représentants des services de police de 24 pays.
Selon les conclusions de l’enquête menée en Belgique par le COC, l’Organe de contrôle de l’information policière, "c’est dans ce contexte qu’un membre présent de la police judiciaire fédérale a utilisé pour la première fois la technologie de reconnaissance faciale, durant la taskforce en octobre 2019".
"Il apparaît en outre que la police judiciaire fédérale a également utilisé la technologie de reconnaissance faciale de Clearview après la taskforce d’Europol sur des photos et images dans le cadre d’enquêtes portant sur des abus sexuels potentiels à l’encontre de mineurs d’âge". "Ils l’ont fait là-bas, à La Haye, mais ils l’ont aussi fait à la maison, au bureau de la police fédérale", explique aujourd’hui Franck Schuermans, le patron du COC, l’Organe de contrôle de l’information policière.
Le COC a aussi pu établir, se basant sur les informations communiquées par Clearview, que le logiciel de reconnaissance faciale a ainsi été utilisé jusqu’au 10 février 2020, "après quoi les comptes ont été clôturés à l’initiative de Clearview", explique le COC.
Ce sont, au total, 78 utilisations du logiciel Clearview qui sont reprochées aux deux policiers de la police judiciaire fédérale.
"Ce n’est pas acceptable", explique Franck Schuermans, du COC. "Ils l’ont fait comme des tests dans la lutte contre les abus sexuels de mineurs, ce que je comprends de façon opérationnelle, mais ça n’empêche que la loi belge, pour l’instant, ne le permet pas", souligne Franck Schuermans, même si, ajoute-t-il, "je suis relativement sûr que les enquêteurs en question étaient de bonne foi". Cela reste problématique car le recours à ce logiciel implique l’usage de "non seulement des données personnelles, mais aussi de données biométriques".
Il n’est pas encore établi que les deux policiers seront sanctionnés. C’est à leur hiérarchie d’étudier la question.