"Ils sont sans pitié. Pour eux, on dirait que la vie humaine n’a pas de valeur." Cédric – nom d’emprunt – joint au téléphone par la RTBF ce vendredi 9 décembre, témoigne le calvaire qu’a vécu la population de Kishishe, un village situé dans le territoire de Rutshuru, à environ 70 km au nord de Goma, la capitale provinciale du Nord-Kivu.
Les rebelles du M23 qui contrôlent la zone, sont accusés d’avoir "massacré" des centaines de civils fin novembre. 272 d’après le gouvernement congolais et au moins 131, selon une enquête préliminaire des Nations-Unies.
Tout était calme quand soudain, des coups de feu ont paniqué tout le village. "J’étais chez moi quand j’ai entendu des cris", poursuit Cédric. D’après lui, "plusieurs balles étaient tirées en désordre et chacun essayait de se sauver. Avec quelques voisins, on a réussi à fuir le village", ajoute Cédric qui rapporte que la localité entière et ses environs sont "terrifiés" alors que dans sa fuite, il a tout abandonné derrière lui.
Le Mouvement du 23 mars (M23), est une rébellion à dominance Tutsi que Kinshasa accuse d’être soutenue par le Rwanda et le régime de Paul Kagame. Le mouvement a conquis plusieurs localités du Nord-Kivu depuis cet été après avoir repris les armes il y a un an, reprochant au gouvernement congolais de non-respect des accords de leur réintégration.
Se débarrasser des preuves
Les Nations-Unies ont publié un premier rapport d’enquête et affirmé que le M23 a "massacré" au moins 131 civils dans ce village "à l’aide d’armes à feu et armes blanches". Parmi les victimes, 102 hommes, 17 femmes et 12 enfants, aux côtés de "60 personnes enlevées et au moins 22 femmes et 5 filles violées".
"Des éléments du M23 auraient enterré eux-mêmes les corps des victimes, dans ce qui pourrait être une tentative de destruction des preuves", souligne le rapport du Bureau conjoint des Nations-Unies aux droits de l’homme.
La société civile congolaise salue cette enquête, mais en veut plus. "Nous pensons que l’ONU devrait aller jusqu’au bout. Et arriver jusqu’à Kishishe pour toucher les réalités. Mais, nous pensons que ce travail préliminaire est bon et il faut vite le présenter à la Cour pénale internationale pour arrêter tous ces commandants du M23", analyse Placide Nzilamba, membre de la société civile du Nord-Kivu dans un entretien avec la RTBF.
La République démocratique du Congo a déjà saisi la CPI afin d’établir les responsabilités massacre. La ministre de la RDC en charge de la justice a appelé mercredi dernier, la CPI à se saisir du dossier pour que d’après elle, "les auteurs des crimes de guerre, crimes contre l’humanité, crimes de génocide et crimes d’agression ne restent pas impunis".