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Marc Tarabella en larmes : "La pire période de ma vie, je n’ai rien à voir avec tout ça"

Par Anne Poncelet, Benjamin Verpoorten

Marc Tarabella a donné une conférence de presse ce mercredi matin, au lendemain de sa libération sous conditions. Son avocat s’était régulièrement exprimé mais le député européen avait refusé jusqu’alors de s’exprimer directement.

Marc Tarabella a d’abord retracé ce qu’il lui est arrivé depuis la mi-janvier. Avant de réaffirmer avec force et émotion son innocence.

"Je pensais à une erreur", a d’emblée déclaré Marc Tarabella, revenant sur la journée où le scandale a éclaté. "Je suis surpris, je tombe des nues, je fais mes courses et je regarde le match de foot. Puis arrive l’impensable : des policiers arrivent à la maison pour une perquisition. Je suis abasourdi, ma famille sous le choc. Je tiens à souligner le tact et le professionnalisme des policiers qui ont effectué la perquisition."

On a tous un jour été déçu par un ami qui vous a menti, mais heureusement très peu à payer ce mensonge par plusieurs mois de prison.

Marc Tarabella est au bord des larmes quand il évoque la trahison de celui qui est son désormais ancien ami, celui qui l’a accusé, Pier Antonio Panzeri. "On a tous un jour été déçu par un ami qui vous a menti, mais heureusement très peu à payer ce mensonge par plusieurs mois de prison."

Et il réitère son innocence.

On ne peut pas faire saigner une pierre. Je n’ai rien à voir avec tout ça, je n’ai pas reçu d’argent.

"La prison n’est pas facile, pour un coupable et encore pire pour un innocent…

Malgré la détention, je n’avais rien d’autre à leur donner que la vérité. On ne peut pas faire saigner une pierre. Je n’ai rien à voir avec tout ça, je n’ai pas reçu d’argent ni de cadeau en échange de mes opinions politiques. Je ne veux pas commenter l’enquête. J’ai intérêt à ce que la vérité soit connue.

Après 5 mois, la pire période de ma vie, j’accueille la décision d’hier très favorablement ; 5 mois durant lesquels beaucoup de gens m’ont soutenu, je n’en veux pas à ceux qui se sont détournés. Je ne suis pas dans la rancoeur.

Le combat continue, l’enquête continue, je ne ferai pas d’autres déclarations."

 

A ce stade, Marc Tarabella reste inculpé jusqu’à la fin de l’enquête. Le dossier du juge d’instruction maintient des éléments de culpabilité à son égard mais ne nécessitant plus la détention, a précisé son avocat.

© RTBF

Une attitude et des déclarations qui n’ont jamais varié

"Pendant cette période, je n’ai rien commenté, raconte Marc Tarabella. Pendant deux mois, j’ai refusé des centaines d’interviews, je vois mon visage à la Une du JT, mon nom est partout, le nom que porte ma famille, ma maman, ma femme, ma fille, mon fils, qui eux non plus n’ont pas mérité ça. Tout ça sur la seule base des dires d’un homme qui aurait par la suite admis être à la tête d’une organisation criminelle et qui a jeté mon nom en pâture, pour espérer ne pas être dévoré."

Pendant deux mois, Marc Tarabella s’est tu. Et d’expliquer pourquoi : "Je respecte le travail d’enquête. J’y ai d’ailleurs tout intérêt. Plus vite ils découvrent la vérité, plus vite je pourrai reprendre une vie normale."

Depuis le début de l’affaire, la défense de Marc Tarabella n’a pas varié d’un pouce : le député-bourgmestre d’Anthisnes "n’a jamais monnayé son éthique, son travail" avait déclaré son avocat, dès les premiers interrogatoires. Maxime Toller, son avocat, avait alors ajouté : En réalité, un repenti, ce n’est pas du tout quelqu’un qui a une parole sainte ou qui, d’un coup, commence à devenir quelqu’un de crédible. Au contraire, c’est quelqu’un dont il faut vraiment se méfier. Et la loi, d’ailleurs, prévoit que la parole d’un repenti ne peut être prise en compte que si elle est corroborée par d’autres éléments. Donc même la loi prévoit de prendre des pincettes avec ce type de déclarations".

Lors de cette conférence de presse, Marc Tarabella a tenu à rappeler ses demandes d’être entendu par les enquêteurs et le juge d’instruction, en demandant à ses collègues de ne 'surtout pas' s’opposer à sa levée d’immunité qu’il votera lui-même.

Marc Tarabella libéré sous conditions: conférence de presse du 10/05/23

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Hier, le bourgmestre d’Anthisnes avait été libéré sous conditions. Le parquet fédéral a annoncé que le député-bourgmestre ne devait plus porter le bracelet électronique. La mesure s’applique également à Francesco Giorgi, le compagnon de l’ancienne vice-présidente du Parlement européen Eva Kaili. "Leur détention préventive n’était plus justifiée", a reconnu le parquet, qui a ajouté approuver la décision du juge d’instruction.

Il y a près d’un mois, le 13 avril, Marc Tarabella avait été autorisé à sortir de prison et à rejoindre son domicile, à Anthisnes, pour y poursuivre sa détention sous surveillance électronique.

Depuis plusieurs mois, le parquet fédéral mène une vaste enquête sur des tentatives du Qatar et du Maroc d’influencer les décisions économiques et politiques du Parlement européen. Les deux pays auraient tenté d’en influencer les décisions et les résolutions par l’intermédiaire de l’ancien député européen italien Pier Antonio Panzeri et de son organisation à but non lucratif 'Fight Impunity'.

Dans ce dossier, outre Pier Antonio Panzeri, avaient également été interpellés le 9 décembre son bras droit Francesco Giorgi, Eva Kaili, la compagne de ce dernier et ex-vice-présidente grecque du Parlement européen, le lobbyiste italo-bruxellois Niccolo Figa-Talamanca, le père d’Eva Kaili et le syndicaliste Luca Visentini.

Ces deux derniers avaient été relâchés après interrogatoire mais Francesco Giorgi, Eva Kaili, Pier Antonio Panzeri et Nicolo Figa-Talamanca avaient, eux, été placés sous mandat d’arrêt.

Le 11 février, le député européen belge Marc Tarabella avait, à son tour, été arrêté. Depuis lors, le lobbyiste Niccolo Figa-Talamanca a été remis en liberté par le juge d’instruction, qui a placé les quatre autres individus sous surveillance électronique à domicile. Eva Kaili a été la dernière à quitter la prison, le 14 avril dernier.

© Belga

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