L’emploi demeure un marqueur essentiel de l’action d’un gouvernement. L’accord signé le 30 septembre 2020 entre sept partis politiques et porté par un exécutif fédéral dirigé par Alexander De Croo précisait : " D’ici 2030, l’objectif consiste à atteindre un taux d’emploi de 80%. Il faut pour cela aussi travailler sur le taux d’inactivité, qui s’élève pour le moment à 22,8% dans la catégorie des 25 à 64 ans. "
Au passage, on notera que prendre un engagement pour 2030 avec un gouvernement dont la date de péremption est fixée au 26 mai 2024, ne constituait pas un risque politique démesuré…
Bras-de-fer
Il n’en reste pas moins qu’il faut également souligner une ambition qui dépasse le cadre d’une législature ; un cap a été fixé et les politiques pour y mener doivent désormais y tendre.
En outre, il est vrai que la situation évolue : le taux d’emploi en Belgique grimpait à 72,3% fin 2022, un chiffre jamais atteint dans notre pays.
Cela a valu un communiqué triomphant du ministre fédéral de… l’Emploi, Pierre-Yves Dermagne : " Si cette tendance vient à se confirmer et se renforcer, l’objectif d’un taux d’emploi de 80% en 2030, que tous les niveaux de pouvoir soutiennent, est à portée de main ", déclare le ministre… socialiste. Et forcément, si un PS se réjouit il y a rapidement un MR pour doucher son enthousiasme (l’inverse est tout aussi fréquent). Pour le ministre Clarinval et son président de parti, tout cela n’est que poudre aux yeux et autosatisfaction, une extrapolation sans base concrète, Il n’y a pas de quoi se réjouir, […] Au contraire, le pays sera la lanterne rouge européenne si une réforme du marché du travail n’est pas menée.
Et interprétation des chiffres
C’est le débat que tente de forcer le MR : lier réforme de la fiscalité et des pensions (en discussion actuellement au sein du gouvernement fédéral) avec une réforme du marché du travail.
Cela fait suite notamment aux propos de Nouvel An de Bart De Wever sur le record du faible plus taux d’emploi européen détenu par la Wallonie.
Comme bien souvent, tout cela est à relativiser. Les chiffres sont bons mais pourraient être meilleurs, surtout dans la perspective d’un taux d’emploi à 80% en 2030.
Il y a ainsi une réalité arithmétique : pour atteindre cet objectif, il faudrait créer 655.000 emplois en sept ans, sachant que la Belgique compte actuellement environ 300.000 demandeurs d’emploi ! Sachant en outre qu’il y a déjà près de 200.000 emplois vacants, où va-t-on dès lors trouver des travailleurs qui n’existent pas ? Qui va créer les centaines de milliers d’emplois nécessaires pour atteindre l’objectif fixé ? La remise au travail des malades de longue durée de plus en plus nombreux (500.000 !) ne constitue pas une solution suffisante ni pérenne.
Au-delà de la recherche du taux d’emploi perdu, il y a aussi une réalité sociale et humaine à prendre en compte, enjeu de la prochaine campagne électorale.