Tendances Première

Météo, lumière, température… Quel impact sur la productivité et le bien-être au travail ?

Tendances Première: Les Tribus

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Bien plus qu’un sujet de conservation au travail, la météo influe considérablement sur la productivité dans le monde professionnel. Zoom sur les effets, souvent méconnus, d’une journée pluvieuse ou ensoleillée au boulot, et les astuces pour une meilleure concentration, avec Jean-Olivier Collinet de Jobyourself dans Tendances Première.

Avec le télétravail généralisé lors du confinement en 2020, combiné au printemps radieux qui s’offrait aux travailleurs, on avait tendance à penser que le soleil boostait la motivation et la productivité. Un constat, à première vue, logique, car le soleil est généralement associé à la bonne humeur, et par extension, à l’efficacité.

Toutefois, la réalité est bien plus complexe que cette première analyse.

La productivité en baisse… en été !

Pour ses recherches, Francesca Gino – professeure associée à la Harvard Business School – a étudié la productivité des employés d’une banque japonaise pendant deux ans et demiElle a ensuite corrélé ses données avec des statistiques météorologiques sur la même période.

Le résultat est sans appel : l’été, la productivité fond comme neige au soleil. Plus les journées étaient maussades, le temps couvert et la visibilité réduite, plus les employés de bureau étaient productifs.

À l’inverse, plus la météo était clémente, le ciel clair et ensoleillé, moins les travailleurs étaient efficaces. De là à penser qu’on est plus actif en Norvège qu’à Espagne, il n’y a qu’un pas. Pourtant on dit que l’abondance de lumière naturelle et de vitamine D est bonne pour le moral.

Malheureusement pour l’entreprise, cette motivation exacerbée n’est pas compensée par les doux travers de la période estivale : pauses déjeuner plus longues, distractions extérieures, pression collective moins forte… D’ailleurs, une étude de Robert Half indique que le manager n’est pas dupe : 45% d’entre eux pensent que leurs équipes sont un peu ou beaucoup moins productives l’été.

Alors pourquoi se sent-on pourtant moins productif en hiver ? Ce phénomène serait davantage lié aux saisons et à la luminosité, qu’à la météo elle-même.

En effet, les recherches en chronobiologie soutiennent l’idée qu’en hiver, nos besoins et nos préférences en matière de sommeil changentOr, les contraintes de la vie de bureau sont particulièrement inadaptées pendant ces mois : il faudrait dormir plus, et travailler moins, comme le faisaient nos ancêtres. Ce mode hivernal 'soporifique' joue effectivement sur notre motivation et sur notre état de santé de manière générale.

Couvrez ce fond d’écran ensoleillé que je ne saurais voir…

Les recherches de Francesca Gino vont plus loin. Afin de vérifier ses résultats en laboratoire, la chercheuse a réalisé quelques expérimentations sur ses élèves d’Harvard. L’équipe a ainsi recruté 136 étudiants, invités à remplir plusieurs questionnaires avec la promesse qu’ils seraient récompensés en fonction de la rapidité et de la précision avec lesquelles ils auraient terminé le travail. Certains ont été conviés sur des jours ensoleillés, d’autres sur des jours de pluie. Une partie de ces derniers a également dû regarder des images de scènes ensoleillées et d’activités extérieures avant de commencer le travail. Ceux-ci se sont révélés (presque) aussi improductifs que le groupe convié un jour de beau temps.

La conclusion des chercheurs ? Plus que la météo elle-même, c’est surtout la distraction créée par la tentation des activités extérieures qui entraîne une diminution de la productivité.

L’impact de la lumière au bureau

Il est connu qu’en période hivernale, un certain nombre de personnes souffre d’une baisse d’énergie et de motivation, doublée d’un besoin excessif de sommeil et d’une attirance pour les aliments sucrés : c’est le 'trouble de l’humeur saisonnier', mis en évidence en 1982 par des chercheurs du National Institute of Mental Health (États-Unis), également appelé dépression saisonnière.

Ces chercheurs ont alors mis au point une technique de soins basée sur l’exposition à une lumière proche du spectre solaire.

Quelles sont les conséquences sur la santé de l’absence prolongée de lumière naturelle sur le lieu de travail ?

  • La lumière régule l’humeur
  • La lumière augmente la vigilance
  • La lumière régularise le sommeil
  • La lumière donne de l’énergie
  • La lumière renforce la solidité des os et le système immunitaire

Et si je travaille sans lumière naturelle ?

Pour éviter l’absence de lumière naturelle qui influe sur votre productivité, il existe différentes solutions :

  • Promenez-vous dès que possible à l’extérieur, ne serait-ce que lors de la pause déjeuner : même un ciel couvert, qui donne une luminosité d’environ 1 500 lux (unité de mesure de l’éclairement lumineux), a des propriétés bénéfiques sur le moral.
  • Sinon, l’utilisation de lampes halogènes, à raison de 3 heures par jour, peut aider : en se réfléchissant sur des murs clairs, leur lumière blanche favorise la resynchronisation des rythmes de l’organisme.
  • Ce 'manque de pêche' est pénible à supporter ? Tentez une cure de luminothérapie. "Cette technique s’avère efficace dans près de 85% des cas", affirme le Dr Patrick Lemoine, psychiatre et directeur de recherche au CHU de Lyon. "Une cure de luminothérapie doit agir comme un synchroniseur très puissant des horloges biologiques, à l’instar d’un jogging matinal… pas toujours facile à faire ! "
  • Pendant la journée, il s’agit de stimuler au maximum la vigilance pour que le sommeil soit récupérateur. "Par exemple, ­s’exposer à la lumière du matin et faire une activité physique", explique le Pr Damien Davenne, spécialiste en chronobiologie à l’université de Caen.
  • Une heure avant de vous coucher, éteignez les écrans de vos ordinateurs, téléviseurs et tablettes : ils sont éclairés par des diodes (Led) qui émettent une lumière stimulante ressemblant à celle du jour. On peut aussi changer la couleur de son écran avec le logiciel gratuit f.lux. Eteignez les lampes l’une après l’autre pour que l’ambiance lumineuse baisse doucement.
  • Si le sommeil ne vient pas, plutôt que de se retourner dans son lit, mieux vaut lire, en privilégiant une lumière douce et chaude à dominante rouge, propice à l’endormissement ; les ampoules fluocompactes à moins de 4 000 degrés kelvin (blanc chaud) conviennent aussi.

L’impact de la température sur notre productivité

A l’heure du 19° partout et de la maîtrise de nos consommations, quel impact a la température ? Non seulement le soleil impacte votre productivité, mais il n’est pas le seul.

Une autre étude révèle que les températures élevées entraînent également une baisse d’efficacité… et peut même entraîner des pertes économiques mondiales à large échelle.

Anant Sudarshan – directeur pour l’Asie du Sud à l’Energy Policy Institute de l’Université de Chicago – et son équipe ont analysé la productivité des travailleurs en Inde, troisième économie mondiale et l’une des plus exposées aux effets du changement climatique. Ils ont étudié des industries à main-d’œuvre importante, et des industries hautement automatisées.

Dans les premières, la productivité chutait jusqu’à 4% par degré lorsque les températures dépassent 27 °C. Dans les secondes, qui nécessitent un effort physique moindre, la productivité ne semble pas impactée par la température. Doit-on s’attendre aux mêmes effets en Occident ? Très probablement.

Par ailleurs, la chaleur n’impacte pas uniquement la productivité. Des recherches menées par Ayushi Narayan, docteur en économie de Harvard, révèlent que des températures plus élevées sont également corrélées à une augmentation de l’agressivité de manière générale, et notamment, de la discrimination et du harcèlement au travail.

Le froid serait la solution ?

La climatisation serait-elle une solution ?

D’un point de vue environnemental, non. D’un point de vue 'efficacité', partiellement. En effet, les mêmes chercheurs ont pu démontrer que si la climatisation limite la baisse de productivité, elle n’empêche pas l’absentéisme. Car une augmentation d’un degré de la température moyenne sur dix jours augmenterait la probabilité qu’un travailleur soit absent jusqu’à 5%. Et on peut décemment supposer que lesdits travailleurs ne cherchent pas à profiter de la plage… mais essaient surtout d’éviter les transports en commun, la promiscuité et les aisselles odorantes de leurs compatriotes.

Alors comment faire pour limiter les effets de la météo sur votre productivité ? Pour commencer, tout le monde n’est pas concerné de la même manière : certains y sont particulièrement sensibles, d’autres moins.

Que faire si vous faites partie des malchanceux particulièrement touchés par le blues de l’hiver ou que vous avez des difficultés à vous concentrer dès que le soleil pointe son nez ?

  • Essayez d’adapter vos tâches (voire, votre temps de travail) à la météo. Privilégiez les tâches les plus complexes sur des jours pluvieux, et les tâches plus créatives les jours ensoleillés.
  • Réfléchissez également à ce qui booste votre moral en hiver : télétravailler au chaud chez vous, ou voir et interagir avec vos collègues au bureau ?

Enfin, n’oubliez pas de remplacer votre fond d’écran exotique par un magnifique paysage écossais en plein automne. Voire, troquez la photo de votre conjoint et vos enfants rigolant aux éclats lors d’une belle journée de printemps au parc.

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma...Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous