Vaste accord au Fédéral sur la migration et l’asile. Les partenaires de la Vivaldi sont parvenus au milieu de la nuit à débloquer un dossier en souffrance depuis des mois.
Entre le gouvernement flamand noyé dans l’Azote et le gouvernement Bruxellois perdu dans la friche Josaphat, le gouvernement fédéral apparaît, désormais presque comme un havre de gouvernance. Presque et surtout pour l’instant. Qui oserait parier que la dynamique entamée avec l’accord sur le budget et les salaires fin de l’année passée, qui s’est poursuivie avec l’accord sur la TVA et l’électricité se poursuive encore jusqu’aux élections ? Pas grand monde sans doute. Et pourtant, si on devait faire un polaroïd de la politique belge. On verrait deux gouvernements régionaux paralysés, une fédération Wallonie-Bruxelles fatiguée qui repousse les échéances, une Wallonie empâtée qui tente surtout de ne pas faire de vague, et un Fédéral, coalition la plus branquignolle de toutes, qui produit malgré tout des accords.
Équilibre
C’est un vaste accord qui reprend la plupart des points concernant la migration et l’asile qui figure dans l’accord de gouvernement. C’est donc le gros dossier de Nicole de Moor et du CD&V, avec la réforme fiscale.
On y retrouve un compromis entre aile gauche et droite. Il y a d’abord des mesures qui visent à limiter, restreindre et contrôler l’accueil et la migration. Par exemple, une nouvelle procédure d’accueil d’asile plus courte, des politiques de retour plus "proactive" (on va "aider" ceux qui n’ont pas obtenu l’asile à rentrer, plus qu’aujourd’hui), des nouvelles règles de regroupement familial censées lutter contre les abus.
Il y a ensuite des mesures présentées comme étant plus humaine. Par exemple, une loi sur l’interdiction d’enfermer des enfants, des solutions pour les apatrides, pour les femmes victimes de violence ou pour les parents de réfugiés mineurs.
Blocage
Ce vaste compromis était bloqué par Ecolo et le PS faute de solution dans la gestion de la crise de l’asile. Depuis des mois et des mois la crise perdure. Des milliers de décisions de justice ont été ignorées et des gens dorment dans la rue. Ecolo en particulier, mais le PS aussi endurent de très lourdes critiques d’une partie de leur base.
Tout accord général était donc lié à une solution pour Ecolo et le PS à "un retour à l’Etat de Droit". Les deux partis annoncent ce retour. Comment ? Le Premier ministre annonce près de 2000 nouvelles places (via entre autres des conteneurs). D’autres vont être libérées grâce à une nouvelle procédure, on arrive à 4000 places, toujours selon le Premier ministre.
On notera qu’il n’y a ni régularisation massive ni de plan de répartition dans les communes.
Guerre de com
L’accord étant tout frais, on restera bien sûr prudent. Place à la guerre de com, chaque parti va tenter de démonter ce qu’il a obtenu. Le CD&V en particulier va insister sur un durcissement de la politique migratoire, une immigration plus contrôlée et plus équitable. Le slogan est déjà connu.
Mais une lourde question se pose. PS et Ecolo qui ont accepté la réforme au nom du retour de l’État de droit mais sans garanties que la crise de l’accueil soit sous contrôle. La création de places va mettre du temps, des semaines, voire plus. Des demandeurs d’asile qui ont reçu une décision négative vont devoir quitter l’accueil dans les 30 jours pour laisser la place à d’autres. Mais où vont aller ces gens et dans quelles conditions ? Si des demandeurs se retrouvent à nouveau à la rue, la crise reviendra comme un boomerang au sein de l’exécutif. On attendra donc, pour triompher sur le retour de l’État de droit.
Pour le reste, Alexander De Croo et son gouvernement avancent. Ce qui aujourd’hui, en Belgique, relève quasiment du miracle.