Dans Déclic, Julie Morelle accueille l’écrivain et dramaturge Antoine Rault pour son nouveau livre Monsieur Sénégal paru aux éditions Plon.
Comment nos préjugés racistes se sont-ils construits au fil de l’histoire ? Ce sont les questions auxquelles Antoine Rault tente de répondre à travers son dernier ouvrage Monsieur Sénégal.
En 1918, Amadou Lo est un jeune homme tirailleur "sénégalais" guinéen venant de vivre l’horreur de la première guerre mondiale. Il a été blessé et est donc démobilisé. Alors qu’il aspire à rentrer dans sa Guinée natale, le médecin-major qui l’a soigné décide de l’emmener chez lui, dans son village en Franche-Comté afin de le faire travailler à son service. Dans ce village isolé où personne n’a jamais vu de personne noire, Amadou Lo fera la rencontre d’une série de personnages qui vont tous, d’une manière ou d’une autre, profiter de son corps, de sa gentillesse ou du statut particulier qu’il a dans la société. Il est alors victime de racisme "bienveillant" et de préjugés où il reste un être prisonnier et exploité en quête d’émancipation, notamment à travers l’apprentissage de la langue française.
Cette thématique, cela fait un certain temps qu’Antoine Rault souhaite l’aborder.
Ça fait une vingtaine d’années que j’avais envie d’écrire un roman qui raconte la façon dont le regard qu’on va porter sur l’autre se construit en fonction de la société dans laquelle on est.
Dans Monsieur Sénégal, l’auteur incarne Amadou Lo. Interrogé sur la légitimité qu’un homme blanc se mette à la place d’un Africain du siècle passé, Antoine Rault avance le fait qu’un auteur est "quelqu’un qui se met dans la peau des autres". Pour lui, la définition de l’écrivain se rapproche de la citation de Baudelaire "Et je me couche fier d’avoir vécu et souffert dans d’autres que moi-même".