Où puis-je voyager en train avec mon vélo en Europe?

Des voitures de la compagnie hongroise MAV équipées depuis longtemps pour le transport des vélos

© JFH

Monter dans le train avec son vélo. Beaucoup de navetteurs belges connaissent les avantages de ce que l’on appelle l’intermodalité dans les transports. Les longs trajets en train, le ou les derniers kilomètres en pédalant.

Aujourd’hui beaucoup de trains belges acceptent les deux-roues, presque tous et tout le temps (comme nos collègues d'On n'est pas des Pigeons viennent de le montrer, voir vidéo en dessous du texte). Mais qu’en est-il des voyages à l’étranger ? Des longs trajets, à grande vitesse ou de nuit ? Et dans les autres pays européens ?

Un jeu de piste compliqué

La réalité est difficile à cerner : chaque pays, et chaque société de chemins de fer dans les pays où plusieurs compagnies opèrent comme le Royaume-Uni, a ses propres règles. Les règlements sont rarement aisés à trouver sur le net, parfois peu clairs et pas toujours traduits dans une langue internationale. Et combiner les exigences de différentes compagnies est un casse-tête : rien n’est harmonisé au niveau tarif ou démontage ou non du vélo.

Des rames équipées à la SNCB
Un plan incliné à la gare d'Anvers

Pouvoir emporter son vélo, est une chose, mais il faut aussi en être informé, pouvoir le faire à un prix raisonnable, en réservant facilement en ligne, accéder facilement aux quais et aux rames (plans inclinés, ascenseurs), trouver les espaces destinés au transport de vélo, les fourgons, parquer dans les gares…

La mobilité fait pourtant partie des compétences européennes, mais l’actuel Règlement européen sur les droits et les obligations des passagers du rail est laxiste et assez flou :

Article 5
Bicyclettes
Les entreprises ferroviaires autorisent les voyageurs à emporter leur bicyclette dans le train, si elles sont faciles à manipuler, si cela ne porte pas préjudice au service ferroviaire spécifique et si le matériel roulant le permet, et moyennant un paiement éventuel.

Mais ce texte est en passe d’être refondu d’ici octobre.

Parlement, Commission et Conseil des ministres européens se penchent dessus depuis plus de deux ans et des eurodéputés manifestent leur volonté de fixer un cadre favorable aux déplacements à vélo. Huit places pour des vélos (non démontés) dans chaque train circulant en Europe, c’est la proposition du Parlement européen.

Les Etats semblent frileux : ils portent pour beaucoup la parole de leurs compagnies ferroviaires. Et elles semblent peu pressées à s’équiper pour le transport de vélo, dit Luc Goffinet du GRACQ (Les cyclistes quotidiens). Leur argument pour ne pas transporter les deux roues est souvent celui de la sécurité à bord.

Alors pour se faire entendre, des députés européens menaient une action ce jeudi à la gare de Bruxelles-Luxembourg : "Tout le matériel roulant neuf ou rénové pour les passagers comporte, au plus tard deux ans après l’entrée en vigueur du présent règlement, un espace désigné bien indiqué pour le transport des véhicules assemblés vélos avec un minimum de 8 espaces."

Peu ou pas de places vélo sur les TGV

Commençons ce tour d’Europe à grande vitesse : où peut-on transporter sa bicyclette en Europe sur des connexions rail rapides et directes ?

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La réponse fournie par la Fédération européenne des cyclistes dans le graphique ci-dessus est décevante : en dehors de l’Allemagne, la Pologne, l’Autriche, et quelques ramifications surtout en Europe centrale, il y a peu de possibilités. 53% des liaisons directes et rapides entre grandes villes européennes refusent les vélos à bord. Dans le meilleur des cas, il faudra basculer sur le réseau régional, plus lent avec des correspondances.

La Belgique n’est ni bonne ni mauvaise élève. Des solutions existent et son expliquées sur le site de la SNCB.

Certaines lignes passent par Bruxelles, comme l’Eurostar pour Londres qui prend les deux roues sans réservation (et donc sans garantie de disponibilité) pour 25 euros par trajet ou normalement sur réservation pour un prix plus élevé équivalent à celui d’un billet passager (entre 38-64 euros, le prix pour des vélos emballés dans une boîte s’élève généralement à environ 44 euros), mais ce service assuré par Eurodespatch ne fonctionne plus à cause de la crise sanitaire et son retour n'est pas programmé.

Des prix élevés, la solution du vélo pliant est également offerte dans le cadre des deux bagages compris par passager ou pour des suppléments allant de 34 à 46 euros, mais il faut bien entendu le replier et l’emballer dans un sac, un étui ou une valise. C’est souvent le cas ailleurs en Europe.

En France où beaucoup de touristes belges à vélo voyagent, l’information donnée en ligne par la SNCF aux cyclistes est l’exemple à suivre selon la Fédération européenne des cyclistes.

Les TER régionaux accueillent sans frais les deux roues. Le vélo est transporté non démonté sur les TGV pour 10 euros et sur réservation par téléphone ou en gare. Mais sur le populaire Thalys au départ de Bruxelles ou Anvers pour Paris, c’est impossible à moins de démonter son vélo ou de le plier. L'arrivée des TGV dans les années 80 a fait diminuer l'espace dédié aux bagages et aux vélos pour des raisons de rentabilité.

Sur les TGV Lyria vers la Suisse, il n’y a pas de réservation en ligne. Le site des chemins de fer suisses est bien conçu pour aider les cyclistes, note la Fédération européenne des cyclistes. Selon elle, la signalétique suisse, avec ses immenses logos vélos sur les voitures est un bon exemple, que l’on retrouve déclinée ailleurs : Danemark, Hongrie, République tchèque, Slovaquie, Pays-Bas, France… Les chemins de fer helvétiques autorisent la plupart du temps les vélos.

Pour se rendre au Luxembourg, la liaison directe la plus rapide de Paris ne dure que 2h14, c’est un énorme 11h48 (+ 528%) avec 3 changements lorsque vous voyagez à vélo. C’est le pire exemple que la Fédération européenne des cyclistes ait identifié. Par contre, le Luxembourg est un des seuls pays à accepter gratuitement tous les vélos sur ses trains, imité pour l'instant jusqu'à la fin 2020 à cause de la crise sanitaire par la Belgique. Pour la Fédération européenne des cyclistes, un billet vélo ne devrait pas excéder 10 euros en trafic intérieur et 15 en trafic international. La Fédération recommande aussi les forfaits journaliers et les abonnements.

En France, les règlements sont faciles à comprendre pour les Belges, mais quid des autres pays européens ?

L’Allemagne traduit tout en plusieurs langues sur le site de la Deutsche Bahn, une référence absolue en matière de voyages ferroviaires en Europe. Les vélos sont admis sur certaines lignes (IC et EC) moyennant un billet vélo et une réservation.

Le gouvernement allemand croit à l’alliance du rail et du vélo dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique et il s’engage concrètement.

Résultat, depuis une dizaine d’années, le transport de vélo par train progresse bien en Allemagne, avec une alternative bon marché en pleine croissance, les bus interurbains acceptant les vélos (Flixbus : +24% en 7 ans)

Mais pas de chance, seuls les nouveaux ICE 4 sont équipés de 8 places vélos, comme le souhaitent les eurodéputés, et ce ne sont pas ceux qui desservent Bruxelles. Une traversée de l’Allemagne en ICE, un Bruxelles-Vienne par exemple prend une dizaine d’heures avec une correspondance seulement pour un tarif économique de moins de 50 euros, mais pour le même passager accompagné de son vélo, pas question d’aller aussi vite : il faudra prendre une ribambelle de tortillards, minimum 4, et dans la plupart des cas payer plus cher…

Il en va de même en Pologne, preuve donc pour le GRACQ que c’est possible techniquement parlant.

Comme au Japon, en Hongrie, les endroits où embarquer son vélo sont clairement indiqués sur les quais.

L’Autriche (site très utile, app, service de transport de vélo non accompagné et nombreuses options de voyages, vélo presque toujours autorisé), la Hongrie (bon site, transport de bicyclettes sur le RER de Budapest), la République tchèque (site bien conçu et bonne signalisation sur les quais) ainsi que la Slovénie (autre bon site) font également partie des bons élèves, où il est facile de voyager en combinant rail et vélo.

Des progrès à faire

Mauvaise nouvelle par contre pour ceux qui visent des voyages accompagnés de leur petite reine en Scandinavie et en Europe du sud.

De Copenhague à Stockholm, on ne peut emporter un vélo non démonté à bord. Les cycles ne sont autorisés que s’ils peuvent être démontés ou pliés et rangés dans un sac de vélo avant l’embarquement.

En Italie aussi, les trajets directs avec vélos sont impossibles. Comptez 3h10 pour un passager de Rome à Milan mais 8h33 (+ 120%) avec 2 changements, pour les cyclistes. Les vélos doivent être emballés et un opérateur n'accepte que les vélos pliés. Certains trains régionaux transportent les vélos gratuitement.

En Espagne, un train de 2h35 de Barcelone à Valence a plus que doublé à 5h55 avec un changement (+ 229%) pour les passagers avec un vélo. Les vélos ne sont que tolérés dans une housse et dans une voiture-couchette il faudra réserver tout le compartiment.

Une manière d’y voir plus clair est de lire certains blogueurs comme The Man in Seat 61 qui scrute tous les changements sur le rail ou ce site suisse.

Le retour des trains de nuit peut-il apporter des solutions au transport des vélos ? Pas encore, le NightJet des chemins de fer autrichiens relie Vienne à Bruxelles mais n’accepte pas (encore) les bécanes au contraire de ses liaisons vers Hambourg ou Zurich.

La Fédération européenne des cyclistes et le GRACQ concluent qu’il reste bien des progrès à faire. Au niveau européen, mais rien n’empêche les Etats et les compagnies de prendre les devants…

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