La nouvelle commission d’enquête autour des inondations a entamé ses travaux à partir de 9 heures ce vendredi matin au Parlement wallon. Les députés vont procéder à une série d’auditions, à commencer par la secrétaire générale du Service public de Wallonie (SPW), Sylvie Marique, également commissaire spéciale chargée de la reconstruction des zones sinistrées.
Dans un premier temps, celle-ci a dressé un état des lieux très théorique et souvent fastidieux de l’état de la législation sur la gestion des inondations, de la répartition des compétences entre Etat fédéral et Région, provinces et communes, "une répartition complexe, avec d’innombrables intervenants", et la manière théorique dont les informations comme les prévisions météo et les alertes devaient circuler.
Dans un deuxième temps (après déjà 2h30 d’audition et de questions), Sylvie Marique a livré un état des lieux cette fois de la situation sur le terrain dans les 209 communes touchées sur 262 par les inondations de juillet ("9673 hectares soit 13.548 terrains de football"), reprenant cette fois sa casquette de commissaire à la reconstruction. Un bilan actualisé et toujours provisoire qui est transmis chaque semaine au gouvernement régional.
7 chantiers majeurs pour le Commissariat
La commissaire, au-delà des chiffres – 31.564 logements touchés répertoriés à ce stade, 58 bâtiments administratifs, 2624 bâtiments d’entreprises, 185 infrastructures sportives, 203 opérateurs touristiques, 53 campings, 265 ponts régionaux ou communaux, ou encore 2550 hectares de terres agricoles impactées pour 694 producteurs, 12.000 voitures noyées, 8 kilomètres de berges en zones urbaines totalement détruites, 119 écoles -, a détaillé ses missions essentielles depuis sa désignation. En 7 chantiers majeurs toujours largement en cours et pour des semaines encore.
Premièrement, il s’agit d’assurer aux sinistrés la réponse à toutes leurs demandes en besoins primaires : alimentation, chauffage (8700 ménages étant toujours privés aujourd’hui de gaz), hygiène, sanitaire, relogement… Au lendemain des inondations, c’étaient quelque 56.000 clients de Resa, le gestionnaire énergétique liégeois, 50.000 clients de Proximus et près de 34.000 clients de la société wallonne des eaux qui étaient touchés.
Deuzio, assurer le retour progressif de tous les services publics fonctionnels à commencer parfois par la relance de certaines administrations communales et CPAS touchés par les flots.
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Tertio, assurer aussi en parallèle un vrai dispositif de soutien psychosocial avec l’aide de l’Aviq et l’Action sociale.
Quatrièmement, restaurer les infrastructures, garantir leur sécurisation (voiries, berges, ponts et autres ouvrages d’art) et la fourniture d’eau, de gaz par les différents opérateurs et ce, avant l’hiver.
Cinquièmement, poursuivre le recueil et l’évacuation des déchets et encombrants (155.000 tonnes !) et leur traitement avec l’aide de la SPAQUE.
Sixièmement, assurer la relance tant de l’économie que du tourisme.
Enfin, garantir aux sinistrés la meilleure communication sur les décisions prises et sur les aides qui peuvent leur être octroyées. Autant de chantiers toujours en cours deux mois plus tard et dont le coût total n’est toujours pas définitif.
A suivi ce vendredi en termes d’auditions, à partir de 14 heures, Aline Thiry chargée de recherches et assistante au centre de recherche Spiral de l’ULiège pour une présentation sur la gestion de crise et les planifications d’urgence ; elle a notamment encouragé les députés à réévaluer certaines réformes comme celle de la protection civile ou celles des zones de police et des zones de secours… qui ne couvrent pas toujours les mêmes périmètres, ce qui rend la coordination complexe pour les crises étendues. Elle a aussi pointé le fait que la Défense n’était pas un service d’urgence, et que personne ne coordonnait vraiment les offres de services notamment des citoyens par rapport aux besoins. Autre conclusion selon elle, "les crises récentes montrent que la législation 'situation d’urgence' prévue pour des 'catastrophes' n’est pas suffisante pour gérer des crises de longue durée, avec des partenaires institutionnels plus nombreux".
Dans l’après-midi encore, les explications de plusieurs professeurs de l’Université de Liège dont Michel Pirotton et Alain Dassargues, spécialistes en hydrogéologie et géologie de l’environnement et notamment de la gestion des bassins-versants – sont également venues éclairer les commissaires. Le premier est notamment venu expliquer comment sont élaborés les modèles de prévisions hydrologiques avec la conversion pluies/débits des cours d’eau et comment fonctionnent théoriquement les barrages. Les passages prévus ce vendredi de Xavier Fettweis, directeur du laboratoire de climatologie de l’ULiège, et d’un autre expert liégeois, Aurore Degré, ont finalement été reportés en raison de problèmes d’agenda.
Tous les vendredis (au minimum) auront lieu des auditions, même si la liste de personnes appelées n’est pas encore définitive. La semaine prochaine, il est question d’entendre des représentants de l’EFAS (le système européen de prévention des crues qui avait adressé à la Région wallonne un certain nombre d’alertes avant et pendant les jours de pluies), de l’IRM, et la direction des voies hydrauliques du SPW (qui a reçu ces alertes). Là, la commission d’enquête parlementaire entrera vraiment dans le vif du sujet.
Les parlementaires devraient aussi auditionner les administrations régionales concernées, le centre de crise ou encore les services de secours et les gestionnaires de barrages.
La commission d’enquête se donne un trimestre pour aboutir à des conclusions et des recommandations.