Comment le Maroc vient faire du lobby au Parlement européen pour tenter d’influer sur une résolution, et tout cela en une période troublée par un énorme scandale de corruption ? C’est ce que narrait Sandro Calderon dans Matin Première ce jeudi.
Monde Europe
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Comment le Maroc vient faire du lobby au Parlement européen pour tenter d’influer sur une résolution, et tout cela en une période troublée par un énorme scandale de corruption ? C’est ce que narrait Sandro Calderon dans Matin Première ce jeudi.
Avant le Qatar et les affaires de corruption liée à Pier Antonio Panzeri, on savait que le Maroc était aussi très présent dans le lobbying auprès des eurodéputés. On aurait pu croire que la monarchie du Maghreb se ferait discrète après les révélations sulfureuses qui touchent les institutions européennes…
Et bien, ça ne semble pas être le cas, comme l’a constaté notre journaliste à Strasbourg.
Une petite délégation marocaine serait très présente lors des sessions du parlement. Et tenterait même, via des courriels, de convaincre certains groupes politiques, comme Renew Europe (l’alliance des députés libéraux - démocrates du Parlement européen) ou les Verts de changer d’avis ou de se forger une opinion sur des résolutions discutées à Strasbourg. Notamment en ce qui concerne les Droits de l’Homme.
Un élu du parti au pouvoir au Maroc a accepté de nous rencontrer pour expliquer son point de vue. Hicham Aït Menna balaie d’un revers de la main les accusations de tentatives de corruption, mais justifie sa présence pour avoir " des accords plus équitables. Car pour le moment on pense qu’aujourd’hui ils (les eurodéputés, ndlr) sont en défaveur du Royaume ".
Est-ce que ce député marocain est venu à l’Europe pour tenter d’influer (empêcher ou affaiblir le texte d’) un vote qui devrait avoir lieu cet après-midi en faveur de journalistes incarcérés par Rabat ? C’est ce que pensent des eurodéputés que Sandro Calderon a pu interroger. Des élus verts ou rouges qui trouvent que la présence d’élus étrangers dans ce cadre est scandaleuse.
En effet, disent-ils, des organismes comme Amnesty ou des défenseurs de journalistes emprisonnés ne peuvent, eux, pas accéder au parlement. " Il s’agit donc d’une asymétrie inacceptable qui ne se produit pas dans d’autres cas. Et tout cela, au milieu d’une affaire de corruption, d’ingérence excessive apparemment, prétendument – il faut toujours le dire – du Maroc au Parlement européen " souligne Miguel Urban Crespo, député européen espagnol de la gauche radicale.
Une asymétrie inacceptable
D’un autre côté, les élus marocains ont le droit de rentrer dans les institutions européennes. Ils bénéficient en effet d’une " accréditation protocolaire ". Ils sont donc présents physiquement. Mais ce qui interpelle, c’est que des courriels sont aussi envoyés, en grand nombre, aux députés. Et le journaliste de la RTBF de mentionner qu’un de ceux-ci, concernant une proposition de résolution pour les Droits de l’Homme au Maroc, initiée par le groupe Renew, aurait même été envoyé avant même que le texte ne soit envoyé à l’ensemble des députés européens. Ce qui ferait penser qu’une " taupe " politique européenne aurait communiqué le mail aux élus Marocains…
Concernant cette affaire, chez Renew, on n’a pas répondu à notre demande d’explications, et du côté marocain, on dit qu’il doit s’agir d’une erreur.
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Qu’à cela ne tienne, certains députés pensent qu’il faudrait interdire au Maroc l’accès au Parlement européen. La suspicion étant plus que de mise.
Le député marocain Hicham Aït Menna affirme, lui, que ça présence se justifie par la volonté de donner des éclaircissements sur les droits de l’Homme au Maroc aux députés européens, et pas à " influencer ces mêmes élus ".
Que pèse l’influence marocaine au sein du Parlement européen ? On pourra peut-être se faire une idée ce midi lors du vote de la résolution en plénière sur les Droits de l’Homme au Maroc à Strasbourg… (une question qui n’avait plus été abordée depuis 25 ans dans l’hémicycle européen).
Une question qui interroge encore et toujours sur la frontière - ténue — entre corruption et lobbying, entre pression et tentative de corruption…
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