Belgique

Pas de base légale pour les mesures Covid, alors "pas de base pour les amendes", estime Olivia Venet: "Pas besoin de sanction si les mesures ont du sens"

Coup de tonnerre ce mercredi 31 mars, suite à un recours déposé en urgence par la Ligue des droits Humains (LDH) et son équivalent néerlandophone, le tribunal de première instance de Bruxelles a ordonné à l’Etat Belge d’adopter un cadre légal pour encadrer les mesures sanitaires.

Les autorités ont désormais 30 jours pour inscrire leurs décisions dans des textes de loi réglementaires. Si cette échéance n’est pas respectée, l’Etat devra payer une astreinte de 5000 euros par jour.

Un cadre légal

Quelle était la démarche de cette action en justice ? Olivia Venet, présidente de la Ligue des droits Humains (LDH) souligne qu’il ne s’agit pas de lever les mesures sanitaires, mais bien d’obtenir un cadre légal adéquat.

"Ce qu’on demandait c’est qu’il y ait un véritable débat au Parlement, pouvoir législatif. Un débat public sur les mesures de confinement avec un véritable contrôle démocratique". Cette demande, la présidente de la LDH rappelle qu’elle date du début de la crise sanitaire. C’est un peu en désespoir de cause que ce recours a été déposé.

Une brèche

Dans ce contexte, les opposants aux mesures pourraient y trouver une validation. Un coiffeur, par exemple, pourrait introduire en référé en produisant cette ordonnance du tribunal de première instance de Bruxelles pour obtenir la réouverture de son salon ? La présidente de la LDH rappelle que tout le monde peut introduire un recours. C’est aussi un juge, un tribunal qui a pris cette décision : "il ne lie pas l’ensemble des juges nécessairement".

L’Etat a d’ailleurs saisi la cour d’appel concernant les accusations d’illégalité des mesures Covid. "On verra ce que dira la cour d’appel, mais c’est bien sur une décision importante".

Olivia Venet en convient, il s’agit là, tout de même, d’une brèche dans le dispositif actuel. "Mais c’est une brèche qui, pour moi, était déjà une évidence auparavant. On le disait depuis longtemps qu’il n’y avait pas de base légale suffisante. Alors le Conseil d’Etat a adopté une autre position, en suspension et aussi dans des décisions urgentes, mais on n’était pas les seuls à le dire. C’était quand même assez unanime dans la communauté juridique et académique pour dire qu’il n’y avait pas de base légale suffisante. Pour moi, c’était relativement attendu cette décision".

Impact de la décision – les amendes pénales ?

Quel sera l’impact de cette décision prise par le tribunal de première instance de Bruxelles sur le quotidien des citoyens ? Pensons à d’éventuelles amendes pénales au cours des 30 jours qui viennent. "A mon sens, s’il n’y a pas de base légale suffisante, il n’y a de base pour les amendes", estime Olivia Venet. "Et il n’y a certainement pas de rétroactivité".

La présidente de la Ligue des droits Humains note que même si une loi : "vient réparer la situation des mesures Covid et créer une base légale, elle ne peut pas agir rétroactivement en matière pénale". Et elle précise qu’il existe des matières pour lesquelles on peut rétroagir, mais cela n’est pas le cas en matière pénale.

"Pas de peine sans loi". Cela est un grand principe de liberté "on ne peut pas être condamné pour des choses qui ne sont pas des illégalités au moment où elles sont commises. Si ce n’est pas une infraction, on ne peut pas être condamné".

Pour elle, que des sanctions pénales puissent être appliquées est très discutable aujourd’hui et elle recommande d’ailleurs aux autorités d’être prudentes par rapport aux poursuites à l’encontre des personnes. Enfin, elle rappelle qu’en ce moment les mesures existent bien : "et il faut les respecter, parce que c’est important de réduire la propagation du virus et c’est important de nous assurer que nos hôpitaux ne soient pas saturés".

Respecter les mesures, pas seulement parce qu’il y a des sanctions

Olivia Venet souhaite insister sur le fait que s’il faut respecter les mesures sanitaires actuelles, ce n’est pas seulement parce qu’il y a des sanctions pénales. "Moi je pense que les libres citoyens que nous sommes, n’ont pas besoin de sanctions pénales pour respecter les mesures, si ces mesures ont du sens. Et ces mesures : porter le masque, se laver les mains… ont clairement du sens".

Pour autant, la décision du tribunal de première instance de Bruxelles pourrait amplifier la méfiance vis-à-vis des mesures sanitaires. Pour la présidente de la LDH, c’est là qu’il y a un paradoxe. "Si on avait commencé le débat démocratique plus tôt, il y aurait moins de méfiance et plus d’adhésion. Parce que les citoyens ont besoin de respect".

Et elle poursuit : "on n’a pas besoin du bâton. On n’est pas des sujets, on est des citoyens responsables. Si ces mesures ont du sens on va les respecter".

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