Monde

Peine de mort : 53% d’exécutions en plus en 2022, selon le rapport d’Amnesty International

L'invité dans l'actu : Philippe HENSMANS

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Par Sophie Brems, Anne Poncelet et Belga via

Le nombre d’exécutions enregistrées en 2022 a augmenté de 53% par rapport à 2021, indique Amnesty International mardi dans son rapport annuel sur la peine de mort. Au total, 883 personnes ont été exécutées dans 20 pays, ce qui correspond au nombre le plus élevé en cinq ans.

"C’est vrai qu’il y a une augmentation considérable et en même temps, c’est ça le paradoxe, le nombre de pays qui pratiquent la peine de mort globalement diminue d’année en année", commente le président de la section belge francophone d’Amnesty Philippe Hensmans.

Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ont enregistré 825 exécutions en 2022 contre 520 en 2021. L’Iran et l’Arabie saoudite sont responsables de 94% d’entre elles dans cette partie du monde. Elles ont augmenté de 83% uniquement en Iran, en une année, passant de 314 en 2021 à 576 en 2022 et la plupart d’entre elles concernent des meurtres ou des délits liés à la drogue.

L’Iran utilise la peine de mort comme moyen de répression et comme pression diplomatique

L’Iran n’hésite pas à utiliser la peine de mort pour faire pression sur les pays, pour un chantage aux otages.

L’Iran utilise la peine de mort pour plusieurs raisons, détaille Philippe Hensmans. La première, c’est évidemment la répression de ce qu’on a connu. Il y a eu plus de 50.000 personnes arrêtées, suite aux manifestations et le gouvernement essaie de faire pression sur l’opinion publique en exécutant certaines personnes, certains leaders du mouvement.

Par ailleurs, l’Iran utilise, et on l’a vu avec le professeur Djalali et avec d’autres détenus, qui sont des otages dans la diplomatie des otages, l’Iran n’hésite pas à utiliser la peine de mort pour faire pression sur les pays, pour un chantage aux otages, on l’a vu avec Monsieur Djalali, on l’a vu avec d’autres otages.

Et enfin, c’est très très important parce que ça représente une partie importante des motivations données par les pays qui pratiquent la peine de mort, ce sont les exécutions liées aux stupéfiants. Là, on remarque que ça peut représenter 37% des exécutions au total. Évidemment, le problème auquel on est confronté avec les exécutions pour des raisons de trafic de stupéfiants, c’est que ça touche de manière disproportionnée les milieux les plus défavorisés en général.

Les exécutions ont par ailleurs triplé en Arabie saoudite. Plus de 80 exécutions y ont d’ailleurs été enregistrées en une seule journée. L’Égypte a également exécuté 24 personnes l’année dernière.

Manifestation en Allemagne en avril 2023 après la condamnation à mort de l’Iranien d’origine allemande Jamshid Sharmahd
Manifestation en Allemagne en avril 2023 après la condamnation à mort de l’Iranien d’origine allemande Jamshid Sharmahd © Ying Tang/NurPhoto/Getty

Le paradoxe de l’Arabie saoudite

L’Égypte a également exécuté 24 personnes l’année dernière. Les exécutions ont par ailleurs triplé en Arabie saoudite. Plus de 80 exécutions y ont d’ailleurs été enregistrées en une seule journée.

L’Arabie saoudite révèle sa vraie nature à travers la peine de mort.

"C’est tout le problème avec l’Arabie saoudite, poursuit le président d’Amnesty, qui essaie d’améliorer son image en termes de droits humains. Elle a quand même fait découper un journaliste qui s’opposait, dans une de ses ambassades en Turquie. Mais il est évident que l’Arabie saoudite révèle sa vraie nature à travers la peine de mort. 81 décapitations en une journée. Ça montre la conception que MBS, comme on appelle le Prince qui règne sur l’Arabie saoudite, sa conception des droits humains et du respect de la vie humaine. C’est vrai que ça vise aussi, régulièrement en Arabie saoudite, des personnes qui ont commis des faits en étant mineures, ce qui est extrêmement grave bien entendu."

La Chine reste toutefois le pays qui a enregistré le plus grand nombre. Selon Amnesty, le nombre devrait même atteindre un nombre beaucoup plus élevé que celui enregistré, atteignant un millier, le pays étant réputé pour garder secret le recours à la peine de mort, comme la Corée du Nord et le Vietnam.

Les exécutions ont également augmenté aux États-Unis, passant de 11 à 18, soit une hausse de 64%. Par ailleurs, les exécutions pour des affaires liées aux stupéfiants ont drastiquement augmenté entre 2021 et 2022. Elles représentaient, à elles seules, 37% du nombre total d’exécution dans le monde.

6 pays ont aboli la peine de mort

Une lueur d’espoir dans ce rapport noir : 6 pays ont aboli partiellement ou totalement la peine de mort en 2022. Au Kazakhstan, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, à la Sierra Leone et en République centrafricaine, la peine de mort a été abolie pour tous les crimes. La Guinée équatoriale et la Zambie l’ont abolie pour les crimes de droit commun.

"C’est une tendance lourde qui se vérifie, confirme Philippe Hensmans. Lorsque nous avons commencé à mener campagne contre la peine de mort au milieu des années septante, on était dans une position totalement inverse. Il n’y avait qu’une vingtaine de pays qui l’avaient aboli. Tous les autres pratiquaient la peine de mort, en tout cas, pratiquant encore les condamnations à mort. Aujourd’hui, c’est l’inverse.

Et effectivement, six pays ont aboli l’année passée, totalement ou partiellement, la peine de mort. Et donc, c’est une bonne nouvelle. 125 États membres des Nations Unies réclament aujourd’hui un moratoire sur la peine de mort. Donc, ça montre qu’il y a une tendance générale avec quelques pays réfractaires et, malheureusement, l’analyse des droits humains montre que ça va dans la tendance lourde de la pratique en matière de droits fondamentaux dans ces pays."

Le rapport complet d'Amnesty international est disponible ici.

Extrait du JT du 16/05/2023 :

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma... Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous