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Permis de détention d’animaux en Wallonie : fin de la période dérogatoire et déjà des crises

Depuis le 30 septembre, la période de transition pour le permis de détention d’un animal de compagnie est terminée. Beaucoup de clients l’ignorent encore. Des vendeurs de poissons et de poules, principalement, sont en difficulté.

Dans la circulaire, la définition de l'animal de compagnie sert d'exemple pour justifier qu'un poisson ou une poule ne rentrent pas dans cette catégorie.

Patrick voulait acheter deux guppys, de petits poissons tropicaux d’eau douce, mais il n’a pas de permis : "Je ne savais pas. Pourtant je suis les informations tous les jours. On doit avoir un permis pour tenir des petits poissons d’aquarium ?", s’étonne-t-il. Fabrice Bronckaert, le patron d’Eautrement aquarium à Naninne confirme : "Vous devez aller à la commune pour le demander. Désormais le permis est valable un an plutôt qu’un seul mois au départ (la Wallonie a déjà adapté certaines règles pour des animaux qui s’achètent en nombre et sans identification) mais des communes ne suivent pas encore, continuent d’émettre des permis d’un mois et pas de moyen de l’avoir en ligne". Fabrice se désole.

Les clients ne sont pas au courant, certaines communes font payer quelques euros pour le précieux sésame. Résultat : "J’ai des gens qui appellent pour se renseigner et quand ils apprennent l’exigence de ce document, ils renoncent. Tout ça pour un animal qui n’est pas de compagnie selon moi. Un chien, un chat, vous avez des interactions… Ici… Non !".

Ce magasin a déjà perdu 35 à 40% de sa clientèle en un trimestre (la période dérogatoire allant du 1er juillet au 30 septembre) et Fabrice est très inquiet pour l’avenir. Face aux prix de l’électricité, des charges et de la nourriture, un autre magasin namurois arrête d’ailleurs les frais à la fin de l’année.

Didier Denis considère qu’une poule est un animal à vocation économique. Il fait signer un papier où le client accepte les exigences demandées pour l’acquisition d’une poule et son bien-être.
Didier Denis considère qu’une poule est un animal à vocation économique. Il fait signer un papier où le client accepte les exigences demandées pour l’acquisition d’une poule et son bien-être. © Tous droits réservés

Aberration administrative et géographique

Même son de cloche chez Didier Denis de l’élevage de Limal. D’ailleurs, ici, pas de permis demandé. Si le revendeur de volailles sait qu’il risque des ennuis, il profite d’un flou juridique, pour l’instant : "Ce ne sont pas des animaux de compagnie. J’ai des collègues qui viennent vendre sur le marché en signalant que l’animal est à vocation économique. On s’en sert pour produire des œufs qu’on consomme. Je ne dis pas pour une petite poule d’ornement mais mes rousses ne sont pas un animal de compagnie."

Remonté, Didier Denis déplore toutes les incohérences depuis l’idée même de ce permis : "Un permis ça devrait être comme un permis de conduire. Vous l’avez et on vous l’enlève quand on a constaté que vous avez déconné, que vous ne soigniez pas bien vos animaux. Si j’avais dû passer par le permis depuis le lancement de la période de transition le premier juillet dernier, j’aurais connu une baisse insoutenable et pas les 10% que j’ai constatés".

Pour le vendeur, proche de la frontière linguistique, le fait que la Wallonie avance seule le condamne à perdre tous ses clients du nord du pays et de Bruxelles "où rien n’est exigé" et avec 50.000 poussins vendus par an, administrativement, la démarche n’a aucun sens : "Les gens doivent aller chercher un document pendant leurs heures de travail… Ils paient dans plusieurs communes et moi je devrais garder une copie du document pendant deux ans ? Allez soyons sérieux !".

Plein de nouvelle paperasse pour les vendeurs et l’obligation de conserver une copie : "Vivable que vous vendez 10 à 15 chiens par an… Pas quand vous vendez 50.000 poulets", selon Didier Denis.
Plein de nouvelle paperasse pour les vendeurs et l’obligation de conserver une copie : "Vivable que vous vendez 10 à 15 chiens par an… Pas quand vous vendez 50.000 poulets", selon Didier Denis. © Tous droits réservés

Permis anti récidive mais aussi anti achats compulsifs

Du côté des refuges animaliers par contre, pas de diminution du nombre d’adoptions à ce stade. Mais c’est justement dans cette optique que le permis reste particulièrement bien accueilli.

En première ligne lorsque des maltraitances sont détectées, le but de ce document n’est pas seulement de détecter les soucis et d’empêcher la récidive mais aussi d’éviter, au préalable, d’en arriver là : "Déjà, nous ne sommes pas d’accord avec l’argument qu’un poisson, un oiseau ou un lapin devraient être considérés différemment d’un chien ou d’un chat, explique Sébastien de Jonge, le président de l’ASBL "Sans collier" à Perwez. Ce sont des animaux qui ont tout autant de besoins physiologiques, qui peuvent vivre longtemps et quand on nous dit qu’on ne va pas dépenser quelques euros dans une commune pour obtenir ce permis afin d’acheter un animal qui ne vaut lui-même que deux ou trois euros, j’aurais tendance à dire que ça ne devrait pas être si peu cher et qu’entretenir cet animal en eau, électricité nourriture etc, signifie déjà que non, ça ne coûte pas que quelques euros…".

L’ASBL veut lutter contre cette perception erronée et justifie l’existence de ce permis pour ce type d’animaux justement parce que ce sont les oiseaux, les poissons ou les petits animaux qui sont le plus souvent victimes de négligence et que si une simple petite démarche administrative et deux euros suffisent pour faire passer l’envie de posséder un animal, "peut-être que ce n’est pas plus mal de ne pas en posséder tout court".

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