Belgique

Plan alcool : les jeunes consomment mais commencent à prendre conscience des risques

© Getty Images Jutta Klee

Les autorités fédérales et régionales viennent d’approuver le premier plan alcool interfédéral. Il prévoit toute une série de mesures pour lutter contre les risques liés à la consommation d’alcool. Les jeunes sont au cœur des mesures prises.

Du côté des jeunes, la consommation d’alcool reste une réalité. Cependant, il y a de plus en plus une prise de conscience. C’est ce que l’une de nos équipes de reportage a constaté en allant à la rencontre de jeunes dans le milieu estudiantin.

L’alcool, une réalité du milieu estudiantin

Attablés à la terrasse d’une taverne proche de l’ULB, quatre autres jeunes sirotent des cocktails. "Notre TP s’est fini un peu plus tôt que prévu. Donc, on a décidé d’aller boire un petit verre", explique Maelys, étudiante en science éco.

Le responsable du bar, Théo, le reconnaît, son établissement est très fréquenté des étudiants et la consommation d’alcool y est une réalité. "Le soir, on a vraiment beaucoup d’étudiants. La terrasse est remplie et tous les soirs, ça consomme vraiment beaucoup, beaucoup de cocktails".

Ces étudiants du supérieur, a priori âgés pour la plupart d’au moins 18 ans, ne sont pas directement ciblés par certaines mesures du plan alcool interfédéral, en particulier celles qui visent à interdire la publicité et le marketing pour l’alcool envers les moins de 18 ans. Néanmoins, ces mesures et d’autres qui permettront de conscientiser les plus jeunes aux risques de l’alcool pourraient porter leurs fruits. "C’est à cet âge-là qu’on prend des mauvaises habitudes", reconnaît Thomas, étudiant, futur ingénieur de gestion, conscient du risque, même si consommer de l’alcool fait partie de ses habitudes, comme d’autres étudiants.

Des initiatives pour conscientiser les jeunes aux risques de la consommation d’alcool

Un peu plus loin sur le campus de l’ULB, en plein mardi après-midi, une partie de bière-pong est organisée aux abords d’un cercle. Ici, la bière fait aussi partie de la vie estudiantine. Pourtant, depuis quelques années, les choses ont quelque peu changé et l’on a plus pris conscience des dangers de l’alcool.

C’est la conséquence d’un travail mené par les autorités de l’ULB avec différents acteurs de l’université dont les cercles estudiantins. Une "charte alcool" et des balises ont été mises en place pour interdire certaines pratiques et en encourager d’autres, comme la consommation d’eau et de softs. "On a travaillé sur les tarifs, que ce soit de la pils, des bières spéciales ou de l’alcool plus fort, mais aussi sur la teneur en alcool de ces boissons qui sont vendues et sur les horaires auxquels on peut consommer et vendre ces boissons dans les cercles", explique Marie Gilles, chargée de projet en promotion de la santé à l’ULB. "On travaille à la réduction des risques en milieu festif estudiantin", précise Marie Gilles.

Cette convention entre les autorités de l’université et les cercles s’est avérée nécessaire vu l’importance de l’alcool pour les jeunes. "On le sait, cela fait partie des activités et de la prise de risque, que ce soit chez les adolescents ou les jeunes adultes. On sait que la consommation d’alcool est assez forte. Donc, c’est évidemment pertinent", explique Marie Gilles.

Conscientiser, promouvoir des bonnes pratiques en matière de consommation d’alcool, c’est aussi prévenir les risques à plus long terme. "Les activités, les habitudes qui sont prises avant 26 ans peuvent rester plus longtemps dans le temps", ajoute Marie Gilles à propos des mesures visant à prévenir la consommation excessive d’alcool.

Alors, les cercles étudiants ont été mis à contribution pour jouer leur rôle dans la prévention. "Il y a des formations sur la safe zone, sur la gestion des risques, sur les personnes trop alcoolisées, la gestion des premiers soins qui sont donnés par des professionnels et par ULB Santé", explique Louis, étudiant en psychomotricité et "délégué bar" dans un cercle.

L’organisation des soirées a aussi évolué ces dernières années. "Auparavant, les soirées estudiantines sur l’ULB, les TD [thés dansants, ndlr], ne vendaient que de la bière. Maintenant, depuis plusieurs années, on vend des softs, mais aussi il y a de l’eau gratuite. On a mis des robinets d’eau dans la salle des fêtes", explique Marie Gilles, chargée de projet en promotion de la santé à l’ULB.

D’autres pratiques ont aussi été interdites. C’est le cas des "challenges" organisés par des marques d’alcool. "C’est une pratique qui était bien connue depuis des dizaines d’années, mais maintenant, c’est interdit de participer à ces concours où il fallait vendre le plus de fûts pour gagner des séjours. Les cercles ne sont plus censés le faire", explique Marie Gilles.

Ce travail semble commencer à payer. "Il y a pas mal de jeunes qui prennent la parole et qui disent, moi je ne bois pas d’alcool du tout ou qui disent, oui, je bois mais j’essaie de faire attention à ma consommation", explique Marie Gilles. "C’est intéressant. C’est quelque chose qu’on ne rencontrait pas auparavant", ajoute-t-elle.

Chez les 12-18, des chiffres à la fois encourageants et interpellants

Chez les plus jeunes, les 12-18 ans, quelques études plus ou moins récentes permettent de mesurer la réalité de la consommation d’alcool dans cette tranche d’âge.

L’étude la plus récente concerne la Flandre et s’est penchée sur la consommation d’alcool, de tabac et de cannabis chez les 12-18 ans au cours de l’année 2021-2022. 7500 jeunes ont été interrogés.

Globalement, les jeunes flamands de 12 à 18 ans déclarent consommer moins d’alcool, moins de tabac et moins de cannabis. Pour l’alcool, la baisse de consommation d’alcool serait importante au cours des vingt dernières années.

Toutefois, ces résultats sont à nuancer. Parmi les jeunes qui reconnaissent consommer de l’alcool, le groupe de ceux qui en consomment chaque semaine est en augmentation. En 2017-2018, 10% des jeunes reconnaissant boire de l’alcool le faisaient chaque semaine. En 2021-2022, cette proportion est passée à 14%.

En Fédération Wallonie-Bruxelles, on ne dispose pas encore de chiffres aussi récents. Les derniers chiffres sont ceux d’une étude de 2018. À l’époque, plus de 40% des élèves, garçons et filles de 4e, 5e et 6e secondaires avaient reconnu avoir consommé de l’alcool au moins un jour au cours du mois précédant l’enquête.

Plus de 40% des garçons et plus de 20% des filles de 6e ou 7e secondaire expliquaient consommer de l’alcool chaque semaine. Plus de 30% des garçons et 20% des filles de cette catégorie avouaient avoir été ivres au moins une fois au cours des trente derniers jours. Un garçon sur cinq et près d’une fille sur dix étaient adeptes du binge drinking, cette pratique qui consiste à boire au moins quatre verres d’alcool en moins de deux heures.

Il faudra attendre les chiffres de la prochaine étude réalisée en Fédération Wallonie-Bruxelles pour savoir si les jeunes francophones suivent la même tendance que leurs semblables du nord du pays.

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