Le teasing de PLK est recherché, le storytelling soigné, l’image au top. Bref, PLK vient de placer l’art du teasing à un autre niveau. Et ça marche, à l’annonce de cette idée d’EP collaboratif la curiosité des médias tout comme celle de la fan base qui n’a eu que quelques jours pour se décider ou non ou à intégrer l’équipe de PLK, a bel et bien été piquée. Son teasing emprunte pas mal à l’univers du gaming avec l’idée des lives chaque soir un peu comme si la communauté de PLK se retrouvait sur Twitch et c’est une stratégie qui peut fonctionner car elle ressemble à l’artiste. D’après plusieurs personnes interrogées par TARMAC, c’est là l’élément clé. Et c’est vrai que PLK est habitué à faire des lives Insta autour de sa création musicale. Ça colle.
Mais si PLK a tapé fort, il n’est évidemment pas le seul à teaser en ce début d’année. Hamza a lancé son compte à rebours énigmatique sur Instagram dès le début de cette année alors que le rappeur est en général assez discret sur ses réseaux. D’ailleurs, le compte à rebours prend fin ce jeudi à 18h. En début d’année c’est aussi du côté du très discret groupe PNL que la curiosité est montée avec un extrait de son inédit entendu sur une story d’Ademo. Bref, plusieurs artistes ont joué avec nos nerfs et notre curiosité en ce début 2023. Preuve en est que le teasing d’un projet ne doit pas être pris à la légère.
Un jeu créatif
La définition de ce qu’est un teasing est assez large. On peut considérer que poster un visuel peut être un teasing mais ça peut (et parfois ça doit) être un peu plus poussé. "Dans les versions les plus poussées, on peut penser à des choses comme ce que fait PNL avec des lives Youtube qui tourne pendant plusieurs jours d’affilée, Damso qui fait ses QR codes sans aucune autre information. D’une certaine manière, ce qu’à fait Stromae au JT de TF1, ce n’est pas forcément un teasing mais c’est un bon coup de com' pour amener un projet", explique Nathan Soret, fondateur de l’agence Nonante Cinq. Le teasing, "c’est avant tout une stratégie de promotion d’un projet ou d’un album", ajoute-t-il.
Teaser c’est à la fois créer du mystère, créer une attente le tout dans un esprit ludique. Les termes "jeu", "énigmes", "secret", "mystère", reviennent souvent quand on parle de teasing. C’est pour cela que l’on retrouve régulièrement la technique du jeu de piste chez les artistes. Un indice par ci, par là, un compte à rebours, un QR code, un extrait sonore inédit…
Mais dans la jungle du teasing, il faut pouvoir se démarquer et être créatif. "Selon moi, c’est impossible de teaser sans imaginer une opération créative à part entière", dit Nathan Soret.
Un teasing, une identité
"Chaque artiste doit avoir une manière de teaser qui est différente. Et il y en a certains pour qui c’est ancré dans les valeurs de l’artiste et de comment le public l’identifie mais il y en pour qui ça ne fonctionnera pas du tout. Par exemple, un groupe comme PNL ou un artiste comme Damso, leur fan base s’est presque construite sur ce côté un peu mystérieux, secret, indices cachés etc. Mais par exemple, l’Algérino qui fait des millions de vues, lui s’il commence à poster des trucs mystérieux […] je pense que son public s’en fout un peu", détaille Nathan Soret. Et d’ajouter, "la question pour un artiste c’est de savoir, est ce que mon public s’est construit dans une relation avec du jeu, du secret, du mystère et je crois que ça ne correspond pas à tous les artistes".
Effectivement, la stratégie de teasing dépend de l’identité de l’artiste et de sa relation avec sa communauté de fans. Et aussi de sa stature. Un artiste émergeant aura du mal à faire sans une stratégie de teasing quand une Beyoncé, par exemple, peut se permettre de droper un son sans crier gare. Mais ça reste rare. Faire l’impasse sur un bon teaser, aujourd’hui ça semble compliqué pour les artistes.
"Il y a très peu d’artistes en France qui peuvent se permettre de sortir quelque chose sans teasing ou juste l’annoncer quelques jours avant. Tu as PNL, Jul, Nekfeu, Damso… Ce sont les grosses têtes. Mais sur des artistes en développement, c’est inenvisageable", détaille Maxime Girot, chef de projet pour la maison de disques Elektra.
L’idée c’est de lancer des petites graines à droite à gauche pour ensuite faire un beau champ.
Par ailleurs, un teasing c’est un des éléments d’une stratégie globale de communication dont le but reste le même : faire connaître le projet d’un artiste. Pour ça les réseaux sociaux sont évidemment indispensables. "Twitter et Instagram pour faire démarrer un peu l’étincelle, surtout pour les artistes en développement et après c’est l’identification de l’artiste pour que les gens voient qui il ou elle est. Puis, il faut essayer d’être relayé par des médias, d’abord les médias plus petits, puis les plus importants. Et en étant relayé par des pages et des comptes. L’idée c’est de lancer des petites graines à droite à gauche pour ensuite faire un beau champ", explique Maxime Girot.
A propos de réseaux sociaux, tous s’accordent à dire qu’aujourd’hui il est quasiment impossible de faire l’impasse sur Tiktok, dont on sait que l’impact dans l’univers musical est important. "Aujourd’hui, un artiste a besoin de TikTok en raison de la vitesse de diffusion de cette application. […] Il suffit que le titre s’emballe avec un nombre de vidéos contributrices important pour que les gens veuillent écouter le son entier, puisque sur Tiktok on a le droit qu’à 15 ou 30 secondes. Donc les gens vont aller ensuite sur une plateforme d’écoute pour l’écouter en entier", explique Marving, le fondateur de l’agence Monsieur Darmon, spécialisée dans les stratégies de communication sur TikTok.
Mais pour certains encore, Tiktok ne s’insère pas dans la stratégie de teasing mais après, une fois que le son est sorti. Or, pour Marving, les choses sont en train d’évoluer. "C’est très rare que l’on intervienne dans la stratégie de teasing, en amont de la sortie du titre. […] Mais c’est important de commencer avant la sortie du projet. Au moins une semaine avant, pour faire monter l’extrait", analyse le fondateur de l'agence Monsieur Darmon.
Une question de timing
Enfin, un bon teasing, c’est aussi une question de timing. Quand est-il opportun de teaser ? Par exemple, s’il y a des projets disponibles en pré-commande, commencer à teaser à peu près un mois avant ça peut être pas mal. En effet, puisque les articles vendus en pré-commande sont comptabilisés dans les chiffres de la première semaine de sortie officielle, une semaine importante pour analyser le début de succès ou non d’un projet.
Donc pour s’assurer que cette première semaine de vente soit un succès, le teasing doit être balancé au bon moment et distillé via plusieurs canaux pendant cette période.
Enfin, un bon teasing s’évalue aux répercussions que cela peut avoir pour l’artiste. "Les répercussions au niveau de la fan base, des réseaux sociaux, des pages spécialisées etc. Et aussi au niveau des médias […] c’est ça que tu vas chercher aussi, ce n’est pas juste faire plaisir aux personnes qui te suivent, c’est que ça fasse parler. […] Il n’y a pas de bon teasing que l’on puisse recopier, le bon teasing, c’est celui que tu arriveras à créer pour ton image et ton identité en tant qu’artiste. Et cela doit correspondre à qui tu es en tant qu’artiste, à ta musique et à ce que ton public connaît de toi", analyse Nathan Soret.