"Je préfère vous le dire toute suite, je suis vacciné!" avertit Bernard Baudaux d'entrée de jeu. Dans le hall d'entrée de la salle de spectacle, le directeur du Poche Théâtre de Charleroi donne le ton. "Je ne suis pas un antivax, mais je refuse de me transformer en outil de l'Etat dans le but de vacciner un maximum de personnes".
"Ce n'est pas de la désobéissance civile, c'est remettre l'église au milieu du village. Sommes-nous vraiment l'outil adéquat pour imposer une vaccination plus conséquente?"
On ne veut pas se transformer en police locale à l'entrée de notre bâtiment
Bernard Baudaux le sait, cette position l'exposera peut-être à des sanctions. Mais il n'en a que faire. "On produit de la culture. On est là pour contrôler si les gens ont bien acheté leur ticket mais c'est tout. On n'est pas là pour vérifier leur état de santé, qui est une donnée privée".
"Je préfère une jauge réduite qu'un pass sanitaire"
Le directeur du Poche Théâtre lance un appel aux pouvoirs publics : "Il faut que les autorités compétentes prennent leurs responsabilités. S'il faut étendre la vaccination, elles doivent alors l'imposer. Mais ce n'est pas aux théâtres de rentrer dans cette procédure de contrôle".
Le Poche Théâtre continue par ailleurs à appliquer les mesures sanitaires, telles que le port du masque lors des déplacements. "Je préfère fonctionner avec une jauge réduite de moitié par rapport à ma capacité maximale que d'imposer le Covid Safe Ticket. Ce qu'on demande, c'est que les théâtres aient le choix".
En tant que comédiens, on est habitués à jouer des rôles, mais celui-là n'est pas très gratifiant
Au Théâtre Marignan, la position est moins catégorique, mais les arguments sont les mêmes. "Si on doit l'appliquer, on le fera, mais pas de gaïeté de coeur" explique Jacky Druaux, comédien et co-directeur du théâtre.
"En tant que comédien ou bénévole, on n'est pas assermenté pour demander aux gens un pass sanitaire. Va-t-on renvoyer les gens chez eux? Humainement, ce n'est vraiment pas sympa à gérer. C'est gênant."
"A nouveau, on n'est pas contre le vaccin mais contre le principe de contrôle". Au Marignan, la crainte est aussi de voir chuter le nombre de spectateurs. "On sent déjà qu'il y a beaucoup moins d'abonnés, et beaucoup de gens nous appellent en posant des questions autour du Covid Safe Ticket".
Un manque de clarté qui génère des tensions
A la Ferme de Martinrou, le ressenti est totalement différent. Le Covid Safe Ticket y est déjà d'application pour les spectacles accueillant plus de 200 spectateurs. "Jusqu'à il y a quelques jours, tout se passait très bien. Cela fait un bien fou de pouvoir remplir toutes les places, sans masque ni distanciation, et même boire un verre après le spectacle" explique Patrice Mincke, directeur du théâtre.
Je veux juste dire aux responsables politiques : prenez une décision claire !
Mais la cacophonie qui règne tant au niveau bruxellois que wallon a changé la donne. "Au départ, le Covid Safe Ticket était imposé pour les événements de plus de 200 personnes. Puis on a évoqué le chiffre de 500 à partir d'octobre. Maintenant on parle de 50 à partir du 15 octobre. Plus personne ne s'y retrouve et cela crée de l'agressivité !" déplore Patrice Mincke.
"Le ton des spectateurs a fort changé car la règle n'est pas claire. Cela crée de l'animosité. Je voudrais juste dire aux politiques : prenez une décision claire, et on la suivra. Mais pas des décisions qui changent toutes les trois semaines".