C’est un procès très attendu qui démarre ce jeudi à Lille (France). Le groupe sucrier français Tereos comparaît devant le tribunal pour une pollution qui a durement touché l’Escaut en avril 2020, en plein confinement.
Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, après la rupture d'une digue de l'usine qui retenait les eaux de lavage de betteraves, 100.000 m3 de liquide noirâtre, essentiellement des matières organiques, s'étaient déversés dans la nature. Quelques jours plus tard, le désastre écologique touchait la Wallonie et notamment les communes de Brunehaut, Antoing et Tournai, avec à la clef des dizaines de milliers de poissons morts. " Les poissons se poussaient hors de l’eau pour s’échouer sur la berge en béton, se souvient Bernard Bauwens, bourgmestre d’Antoing. C’était vraiment impressionnant. "
Les Belges déplorent un manque de communication
La comme d’Antoing et ses voisines de Brunehaut et Tournai seront représentées sur le banc des parties civiles. Le bourgmestre d’Antoing espère une sanction exemplaire : "Il faut que ces gens prennent conscience de la gravité de leur négligence." La Ville de Tournai, elle, demandera au tribunal un dommage de 2500 €, "mais c’est surtout symbolique", précise Paul-Olivier Delannois, bourgmestre de Tournai. La volonté des communes est aussi que la justice reconnaisse que des erreurs de communication ont été commises ; les Belges accusant la France de n’avoir jamais signalé cette pollution. "Nous avons eu des conséquences catastrophiques. Si un signal avait été donné, nous aurions pu minimiser l’impact de cette pollution", ajoute M. Delannois.
Tereos risque 75000 euros d’amende
Aux côtés des villes belges, des Français défenseurs de l'environnement seront aussi au procès. Parmi eux, Jean-Claude Brunebarbe et son association " Iris Sauvage " basée à Flines-Lès-Mortagne, de l’autre côté de la frontière. "C’est vraiment désespérant de voir que la nature n’est pas prise en compte et passe derrière l’aspect financier, déplore-t-il. L’entreprise n’a pas pris les précautions nécessaires (…) Il va falloir des années pour que l’Escaut retrouve son état normal."
De son côté, l’entreprise Tereos avait assuré avoir "immédiatement mis en œuvre les actions nécessaires pour répondre à l'urgence de la situation" et "d'emblée alerté les autorités compétentes françaises en évoquant le point spécifique de l'Escaut". Pendant deux jours, elle devra s’expliquer devant le tribunal où elle sera poursuivie notamment pour déversement "de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer" et "rejet en eau douce ou pisciculture de substance nuisible au poisson", des infractions passibles de deux ans de prison maximum et 75.000 euros d'amende.