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Portrait : Franck Berrier, "le Petit général" s’en est allé pour une dernière mission

Portrait : Franck Berrier, "le Petit général" s’est en allé pour une dernière mission

© Belga

Il n’avait que 37 ans. Et pourtant, il nous a déjà quittés. Franck Berrier s’en est allé, foudroyé par une crise cardiaque en pleine séance de sport. Retour sur la carrière de ce personnage atypique, haut en couleurs et devenu, au fil des ans, une véritable icône des pelouses belges.

La démarche chaloupée, le cuir cramponné à son pied droit et le regard toujours vissé vers l’avant, Franck Berrier était un oiseau rare dans le monde, parfois trop aseptisé du football.

Un gars pas forcément loquace à l’interview mais qui avait la punchline facile une fois qu’il était lancé. Un joueur, d’une rare élégance balle au pied, qui dénotait de par son physique plutôt frêle (1m75, 65kgs) qui l’aurait fait passer sans souci pour un discret courtier en assurances. Il le disait d’ailleurs lui-même, il détestait cet univers du ballon rond, fait de strass et de paillettes : "Je déteste ce milieu, ses combines, tous ses agents qui rôdent autour de vous… et vous les journalistes, qui ne venez nous voir que quand on fait des résultats" nous expliquait-il, sourire en coin, dans un Gril y a quatre ans.

C’était ça aussi Berrier, ce sempiternel sourire en coin, illustration d’une certaine nonchalance qui a failli lui jouer des tours en début de carrière, lui le jeune gamin au caractère bien trempé : " "Je l’ai déjà vu frapper du rond central sur la transversale comme je l’ai déjà vu faire des catastrophes. Il ne parlait pas beaucoup mais, sur le terrain, il ne laissait pas indifférent. Il était capable de prendre un ballon dans les pieds d’un adversaire dans ses 18 mètres et de remonter tout seul jusqu’aux 18 mètres adverses" se souvient Bruno Roux, son premier entraîneur au micro de Ouest-France.


►►► À lire aussi : Retrouvez le Gril d'Erik Libois avec Franck Berrier 


Dépité par la saison en demi-teinte de son club l’AS Cannes en 2008, Berrier tente alors le grand saut vers la Belgique. Il n’a que 22 ans mais veut donner un nouvel élan à une carrière qui patine. "C’est une étape" explique-t-il alors. Ce qu’il ne sait pas encore, c’est que pour plusieurs raisons, Berrier ne va plus jamais quitter la Pro League. Au contraire même, l’étape va durer plus longtemps que prévu. Et il va devenir l’un des plus fiers représentants de notre championnat.

A Zulte-Waregem pour s’inscrire dans la "Dury"

Franck Berrier, ancien joueur du Standard.

Débarqué dans l’anonymat le plus total à Zulte-Waregem, Berrier ne met que quelques semaines avant de devenir le relais de Franky Dury. Parce que si l’inusable coach flandrien a pris l’habitude de s’époumoner depuis sa ligne de touche, il a très vite compris que le maestro, sur la pelouse, se nomme Franck Berrier. A la baguette, le Français se complaît dans ce rôle de chef d’orchestre-régulateur, chargé de donner le tempo et d’anticiper des brèches que certains coéquipiers ne voyaient même pas. Très vite, les deux hommes forment un détonnant binôme et se tirent vers le haut (19 assists pour Berrier !).

Et très vite aussi, ce tempérament de leader assumé vaut à Berrier le doux surnom de "Petit Général". Un surnom qu’il colportera fièrement jusqu’à la fin de sa carrière en 2018. Mais de fin de carrière, il n’est pas encore question en 2010. Grâce à ses prestations trois étoiles au Essevee, Berrier tape alors dans l’oeil de plusieurs grandes équipes. Malheureusement pour lui, il se casse le genou au pire des moments. "Avant de signer au Standard, mon contrat était prêt… au Borussia Dortmund" expliquait-il au micro d’Erik Libois.

C’est donc à Sclessin qu’il pose ses valises. Mais son corps chancelle déjà un peu (trop) et lui coûte de précieuses minutes de jeu. Le périple liégeois tourne finalement au vinaigre au moment où José Riga, alors en charge des Rouches, lui donne son bon de sortie. Après 22 petits matches et deux saisons mitigées avec le Standard, il quitte donc Sclessin par la petite porte, assommé par son propre genou et des choix tactiques en sa défaveur. Le résumé d’une carrière qui aurait sans doute mérité mieux au vu du talent intrinsèque du bonhomme et qui gardera sans doute un léger goût de trop peu au moment de faire le bilan.

4 saisons à Ostende pour boucler la boucle

Franck Berrier sous le maillot d'Ostende.

Mais Berrier ne se laisse pas démonter. Retour à la casa Zulte-Waregem donc, dans le club qui l’avait fait décoller. Des Waregemois qui, à la surprise générale, s’immiscent en PO1 et passent à un petit but de chiper le titre à Anderlecht en 2013. Le Saint-Graal effleuré du bout des doigts par Berrier&Co.

A 30 ans, alors que les années défilent et que sa pointe de vitesse s’estompe, il signe avec Ostende. L’objectif est clair, se lancer un nouveau avant de définitivement quitter le milieu.

Chez les Côtiers, Berrier occupe un rôle (encore) plus reculé, à la Pirlo (joueur qu’il adore) avec le jeu devant lui et donc l’occasion de pallier son manque de vitesse par son incroyable vision du jeu. Dépositaire de tous les ballons, il devient incontournable dans ce KVO cher à Marc Coucke.

Après quatre saisons sur la Côte et de nombreuses roses distribuées depuis son rôle de sentinelle, Berrier n’est toujours pas rassasié et veut clore sa carrière en beauté du côté de Malines. Seulement voilà, on lui distingue une inflammation du muscle du cœur au moment des tests médicaux. "Mon coeur ne fonctionne qu’à 70%" confie-t-il alors au micro de la DH.

Pieds et poings liés, Berrier est donc contraint de raccrocher les crampons, alors que le dernier chapitre de sa carrière avait à peine été entamé. A 34 ans, il quitte les pelouses belges auréolé d’une coupe de Belgique avec le Standard, d’un sublime titre de vice-champion acquis avec Zulte et de 204 matches (45 buts, 103 assists).

Ce vendredi, son coeur qui avait déjà fait des siennes il y a 3 ans, a lâché pour de bon. Le "Petit Général" s’est donc envolé pour une dernière mission qu’il relèvera, on le sait, avec brio.

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