Belgique

Pour Ludivine Dedonder, "complémentarité" est le maître-mot de l’aide militaire belge à l’Ukraine

L'invité: Ludivine Dedonder, ministre de la Défense

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Par Anne Poncelet sur base d'une interview de Thomas Gadisseux

La semaine dernière, la Belgique annonçait la livraison d’un "package" à l’Ukraine : des missiles antiaériens, de l’armement de lutte antichars, des mitrailleuses, des grenades, des munitions mais désormais, l’Ukraine et son président lorgne aussi sur nos avions de combat, les F16.

Est-ce la prochaine étape dans l’aide à l’Ukraine ? Est-ce envisageable ? Pour Ludivine Dedonder, la ministre de la Défense (PS), la question ne peut pas se poser en ces termes. "Nos avions F 16 sont pleinement opérationnels, que ce soit pour assurer la couverture aérienne de notre propre territoire et de celui du Benelux ; que ce soit aussi dans le cadre de la défense collective et donc la sécurité aérienne des États baltes. Et quant aux avions qui seront amenés à les remplacer, les fameux F35, ils n’arriveront pas avant 2025."

En clair, les F16 belges ne sont pas disponibles pour l’Ukraine. Opérationnellement ou symboliquement ? "Nous n’avons pas eu de demande explicite par le président Zelensky de fournir des avions de combat, précise la ministre.

Mais il faut voir cela dans un cadre plus large : quand nous participons à permettre aux Ukrainiens de se défendre, c’est toujours en complémentarité avec ce que font les partenaires et les alliés. La France, par exemple, ne va pas livrer a priori d’avions, elle ne fournit pas de chars mais de l’artillerie. Dans toute opération militaire bien menée, il faut un équilibre des capacités, c’est dans ce sens-là que nous travaillons au sein du 'Contact Group Ukraine', pour que chacun apporte les capacités dont il dispose mais qui soient complémentaires.

C’est ça l’Europe de la défense. Si on veut être plus fort ensemble pour se protéger, il faut investir de façon juste et équilibrée ".

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Un budget de 226 millions

44 millions d’aides, rien que pour le carburant, et budget total de 226 millions, c’est le montant du soutien militaire de la Belgique à l’Ukraine depuis le début du conflit.

En comparaison avec d’autres pays, en regard du PIB, la Belgique ne figure pas parmi les états les plus généreux. La Belgique assume-t-elle cela politiquement, vu l’état des finances publiques ? "On regarde parmi les stocks disponibles au sein de la défense et en fonction de ce qui est possible au sein de notre industrie de défense et de sécurité, et on évalue en permanence, argumente Ludivine Dedonder. Aujourd’hui encore, il y a des analyses pour répondre aux besoins identifiés par les UKrainiens par rapport à ce qui se passe sur le terrain, en étant complémentaires."

Une opportunité pour les entreprises belges liées au secteur de la défense

Ce conflit est-il aussi une opportunité pour les entreprises belges liées à la défense et aux armements, des entreprises qui n’ont pas les mêmes capacités que certains de nos voisins ?

D’autres pays, comme l’Allemagne ou les Etats-Unis font aussi tourner leur industrie nationale quand ils fournissent à l’Ukraine. "Qu’on le veuille ou non, plaide Ludivine Dedonder, avec ce conflit, nous avons besoin de notre industrie de défense et de sécurité. Cette guerre a mis au jour toute notre dépendance, énergétique, en matière de défense, d’approvisionnement de composants électroniques, … Donc il y a la nécessité de renforcer notre industrie belge et européenne pour disposer de cette autonomie."

"Nous saisissons cette opportunité, insiste la ministre, et je l’avais déjà fait avant le conflit, en affectant un budget de 1,8 milliard dans le cadre du plan Star, le plan de reconstruction de la Défense, pour la recherche et le développement, pour soutenir les entreprises de défense et de sécurité, qui sont des fleurons et que nous devons épauler. Cela représente 16.000 emplois directs et l’objectif c’est de stabiliser puis de faire croire cet emploi." 

Un peu partout dans le monde, les pays relancent leur industrie d’armement, quels sont les fleurons belges sur lesquels mise la Défense ?

"Nous en avons énormément, se réjouit Ludivine Dedonder, dans le domaine du cyber, dans le domaine des satellites, dans l’aéronautique aussi. Dans la recherche médicale, on a envoyé par exemple en Ukraine dernièrement, on en a acheté également pour nous, des laboratoires mobiles, dans le cadre évidemment aussi de ce qui est armement, dans le cadre naval avec le déminage, des drones sous-marins. On a des pépites, c’est vrai en Belgique, et la défense belge doit être là pour pouvoir les épauler, pour financer avec elles des projets de recherche et pouvoir mener donc à terme des projets ambitieux de capacités du futur.

Un prochain redéploiement à l’étranger

La ministre confirme ce mercredi matin l’envoi prochain de troupes à l’étranger : C’est prévu ici, dans le cadre du plan Opérations 2023. Donc au deuxième semestre, nous aurons de nouveau une présence belge en Roumanie, donc celle sous la forme de rotations. Nous avions été remplacés par les Néerlandais et nous prenons la relève des Néerlandais au deuxième semestre. Nous serons également en Lituanie, à la fois avec la composante Air, mais aussi avec nos F-16.

Un conflit qui pourrait durer

On n’est pas en guerre contre la Russie, encore moins contre la population russe, mais on doit pouvoir aider les Ukrainiens à se défendre.

"On est malheureusement sur cette guerre d’attrition, constate la ministre. Les combats continuent pour le moment sans réelle avancée avec beaucoup trop de blessés et de tués. Et donc on s’attend malheureusement à ce que ces combats continuent, à cette mobilisation importante du côté russe, à une offensive également. Et c’est ainsi qu’aujourd’hui, il y a finalement cette période charnière pour que l’on puisse envoyer du matériel aux Ukrainiens, pour qu’ils puissent défendre leurs populations. On n’est pas en guerre contre la Russie, encore moins contre la population russe, mais on doit pouvoir aider les Ukrainiens à se défendre parce qu’au-delà de leur propre sécurité, c’est la nôtre et ce sont nos valeurs démocratiques qui sont en jeu."

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