Coronavirus

Pour Marius Gilbert l’absence d'assouplissements à Bruxelles est "une manière de mettre la population face à ses responsabilités"

L'épidémiologiste Marius Gilbert.

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Par Aline Delvoye, Estelle De Houck

Alors que des mesures d’assouplissements attendent la Flandre et la Wallonie, Bruxelles reste sur le carreau. En cause ? Le taux de vaccination jugé trop bas, ainsi que la reprise des contaminations. La Région restera donc en "pause", jusqu’à ce que le contexte sanitaire s’améliore. Mais la situation sanitaire bruxelloise est-elle si inquiétante ? Est-ce que cette absence de mesure peut réellement changer les choses ?

Selon l'épidémiologiste Marius Gilbert, cette hausse des contaminations n’est pas propre à Bruxelles. Certes, la Région bruxelloise présente des taux de positivité en augmentation, aux alentours de 6%. "Mais cela n’a rien d’unique à Bruxelles puisqu’on a aussi une situation avec une augmentation de la transmission dans la province de Liège et du Luxembourg, où on a des taux de positivé qui sont un peu analogues", rassure l’épidémiologiste de l’ULB.

Le potentiel de dégâts en termes d’infections sévères et d’hospitalisations à Bruxelles est forcément plus important

Par contre, Bruxelles présente une population nettement moins vaccinée. "Selon les catégories d’âge, il y a entre 10 et 15% de personnes vaccinées en moins à Bruxelles. Et du coup le potentiel de dégâts en termes d’infections sévères et d’hospitalisations à Bruxelles est forcément plus important."

Quid des hospitalisations ?

Une fois encore, l’augmentation des hospitalisations ne serait pas propre à Bruxelles. "Cela augmente légèrement un peu partout. Mais à Bruxelles, ça augmente plus qu’ailleurs. Cela est vraisemblablement en lien avec le fait qu’une proportion plus faible de la population y soit vaccinée et donc qu’il y ait moins de personnes protégées", analyse Marius Gilbert.

La vaccination

Le cœur du problème, c’est donc la vaccination.

Du côté des plus de 65 ans, on observe une couverture vaccinale qui s’élève à 80%. "C’est assez bon, mais cela reste inférieur à ce qu’on observe en Flandre et en Wallonie", tempère l’épidémiologiste. En Flandre, 95% des plus de 65 ans sont vaccinés, contre 87% en Wallonie. Une différence de presque 10%, donc. "Or on sait que c’est dans cette population qu’il y a potentiellement le plus de personnes qui peuvent contracter des formes sévères."


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Et si l’on se penche sur l’ensemble de la population de plus de 18 ans, "on est à 60% de personnes entièrement vaccinées, alors qu’en Flandre on est à presque 88% et en Wallonie presque à 77%. Donc là on a un retard plus important."

Il est donc tout à fait naturel que les contaminations se déplacent vers les catégories d’âge plus jeunes, puisque la vaccination y est plus faible.

Disparités entre communes

S’il existe une disparité entre Régions ou groupe d’âges, il existe également une disparité entre communes. Et comme le précise Marius Gilbert, "cela n’a rien de nouveau."

"On sait que Bruxelles est une ville très internationale, qu’il y a différents quartiers avec des niveaux socio-économiques, d’éducation et des cultures différentes. On a déjà vu ça au niveau des transmissions avec des transmissions différentes d’une commune à l’autre. Ce n’est donc pas surprenant qu’on ait des différences aussi au niveau de la couverture vaccinale."

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Le signal du Codeco

Au vu de toutes ces données propres à Bruxelles, la Région a décidé d’appuyer "sur le bouton pause." Il n’y a donc pas de mesures d’assouplissements en vue pour le moment. Un geste symbolique pour encourager la vaccination ? D’après Marius Gilbert, c’est en tout cas "une manière de mettre la population face à ses responsabilités."

"La situation à Bruxelles est plus tendue qu’ailleurs, et donc si on veut pouvoir avoir tous les bénéfices d’une réouverture complète, il faut se mobiliser collectivement et convaincre autour de soi." Voici quel serait le message des autorités.

Il faut dire que "dans un contexte comme celui-là, ça paraîtrait injustifié de lâcher encore plus, parce que ça pourrait relancer un peu les choses."

La course à la couverture vaccinale

Mais même dans l’hypothèse où la vaccination susciterait un nouvel engouement, les choses prendraient du temps. La couverture vaccinale ne s’atteindra pas en un claquement de doigts.

Il y a tout d’abord le délai entre la première et la deuxième dose. "En particulier face au variant delta, on sait que le fait d’avoir fait ces deux doses, et d’attendre un certain temps après la deuxième, est important pour avoir une efficacité vis-à-vis des formes sévères."

"C’est pour ça qu’il faut faire l’effort maintenant, anticipativement par rapport à une situation de rentrée et aussi par rapport à l’automne et l’hiver. On le sait, l’hiver est une période plus tendue par rapport à la transmission. Il faut anticiper cela, et la meilleure manière d’anticiper est de mettre le possible de barrières de protections et de prévention que peut être la vaccination."

Risque-t-on un pic d’hospitalisations ?

Et dans l’hypothèse contraire, si la couverture vaccinale n’est jamais atteinte, risque-t-on un pic de contaminations et d’hospitalisation dans le courant du mois de septembre ?

"Le fait qu’il y ait 60% des plus de 18 ans vaccinés est déjà une grosse protection. On n’a pas le risque d’avoir un pic aussi important que ce qu’on a connu l’hiver passé. Mais il reste une fraction importante et qui peut localement mettre les choses sous tensions", relativise Marius Gilbert.

Convaincre des bénéfices de la vaccination

L’objectif, désormais, c’est donc de convaincre les populations non-vaccinées. "Le défi c’est donc d’essayer de convaincre, à la fois les plus jeunes mais aussi les plus âgés des bénéfices de la vaccination. Et avant tout des bénéfices pour elles-mêmes", insiste Marius Gilbert.

"On a beaucoup mis l’accent sur les bénéfices en termes d’immunité collective, de transmission, etc. Mais là avec le variant Delta, c’est un petit peu remis en question puisque l’efficacité vaccinale vis-à-vis de la transmission est plus faible que ce qu’on avait avec les variants précédents."


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Par contre, les bénéfices en matière de protection individuelle vis-à-vis des formes sévères sont très élevés d’après l’épidémiologiste. "Quand on est vacciné, c’est un peu comme si on rajeunissait de 15-20 ans par rapport aux risques qu’on peut avoir. Il faut donc convaincre les gens qu’il y a un réel bénéfice, à la fois vis-à-vis des formes sévères mais aussi du covid long."

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