Le front commun syndical de Brussels Airlines a envoyé jeudi un préavis de grève à la direction de la compagnie aérienne, et ce pour une durée indéterminée, à la suite de l’échec de la réunion de conciliation de jeudi dernier, annonce-t-il lundi matin.
Les syndicats se plaignent depuis un certain temps de ce qu’ils considèrent comme une charge de travail excessive pour le personnel de cabine, avec des problèmes de combinaisons de vols, de gestion de la fatigue et de planification du personnel. C’est, par exemple, "signer à 4h30 du matin, faire deux vols puis, refaire encore deux vols, rentrer tard en début de soirée, dormir un petit peu, refaire un vol vers une capitale européenne et avoir 4 ou 5 heures de repos sur place et puis revenir", explique Didier Lebbe, secrétaire permanent de la CNE, secteur aviation.
Ce sont, ajoute-t-il, "des prestations qui n’existaient pas auparavant". "Après trois ou quatre jours, vous êtes épuisé", commente de son côté Olivier Van Camp, secrétaire permanent du Secta Aviation. "Le personnel n’en peut plus. Cela risque d’être dangereux pour la sécurité", ajoute Olivier Van Camp.
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La direction a déjà proposé le recrutement de vingt équivalents temps plein, mais cela ne suffit pas aux yeux des organisations syndicales. Une réunion de conciliation a eu lieu jeudi, mais elle n’a donné aucun résultat. A propos du recrutement de vingt équivalents temps plein, Didier Lebbe, de la CNE, explique que la direction "n’avait pas le choix". Ce recrutement, "ce n’est pas pour soulager les gens qui travaillaient déjà. C’est parce que s’ils n’engageaient pas, ils ne pouvaient pas opérer et devaient annuler les vols", ajoute le permanent CNE.
Des actions possibles après le 26 août
Les organisations syndicales (CNE/ACV Puls, BBTK/Setca et ACLVB/CGSLB) et leurs délégués vont à présent prendre le temps d’informer le personnel et consulter leurs affiliés, explique Didier Lebbe, secrétaire permanent du syndicat chrétien. Il fustige la situation actuelle, avec "un personnel qui est sous pression depuis le début de la période estivale et ce, après une longue période de chômage économique qui a vu son pouvoir d’achat diminuer de façon drastique".
Le but n’est pas de punir les passagers
Ce n’est qu’à l’issue de cette consultation qu’il sera décidé de la nature des actions à venir. Celles-ci, qui ne pourront pas avoir lieu avant ce jeudi 26 août, pourraient prendre la forme d’une grève, même si ce n’est pas l’option privilégiée à ce stade par les syndicats.
"Le but, ce n’est pas d’ennuyer les passagers. On verra avec le personnel. Mais c’est possible", commente Didier Lebbe, permanent CNE. "On va expliquer au personnel que tous les moyens de négociation ont été épuisés, qu’on est face à un mur et qu’on doit voir comment faire pour faire pression sur Lufthansa et peut-être aussi sur les autorités belges qui ont mis 290 millions d’euros dans cette entreprise".
Pour son alter ego du Setca, la grève n’est pas non plus la solution privilégiée. "Il y a beaucoup d’actions qu’on peut faire au sein de l’entreprise qui touchent un peu le portefeuille de Lufthansa, c’est-à-dire qu’on ne vend plus rien à bord, on travaille comme il faut, les gens vont signer à temps avant leur vol, et cela, ça va faire des retards, peut-être qu’il y aura des retards pour les passagers dans les prochains jours, mais pas d’annulations", poursuit Olivier Van Camp, du Setca.
La raison de la grève : la convention collective de travail
Cet échec est, selon les trois organisations, "dû au refus catégorique de la direction de négocier des solutions structurelles pour améliorer les conventions collectives de travail qui ont été imposées par la Lufthansa", maison mère de Brussels Airlines, en 2020 et qui définissent le régime de travail du personnel de cabine.
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Les syndicats disent regretter cette situation et demandent au groupe aéronautique allemand, "seul responsable de cette situation", de prendre ses responsabilités et de faire preuve de plus d’écoute et de respect vis-à-vis du personnel de Brussels Airlines.
Du côté syndical, on critique la manière dont la direction de Lufthansa applique la convention collective de travail. Celle-ci avait été négociée lorsque la compagnie allait mal. "Avant le Covid, la compagnie était presque en faillite. Les personnels de cabine et de vol ont fait un effort en renégociant les conditions de travail à la baisse", explique Olivier Van Camp, du Setca. "La nouvelle convention collective est déjà une dégradation des conditions de travail, mais la direction de Lufthansa va encore plus loin", fustige Olivier Van Camp pour qui il y a "une limite à la flexibilité" et pour qui "il faut penser à la santé des gens". Du côté syndical, Didier Lebbe, de la CNE reproche à Lufthansa de s’en tenir "au minimum minimorum des réglementations européennes" et d’ignorer ce que la Convention collective de travail négociée avec les syndicats de Brussels Airlines.
Dès lors, puisque la convention collective de travail n’est pas appliquée, les syndicats demandent une renégociation. Ils veulent éviter que les conditions de travail rencontrées cet été ne se reproduisent lors de la saison 2021-2022.
L’annulation de la convention collective de travail n’est cependant pas une option, a d’ores et déjà prévenu vendredi la compagnie. "La compétitivité de l’entreprise est cruciale pour créer un avenir durable pour l’entreprise et son personnel. Brussels Airlines condamne toute action sociale susceptible de nuire à ses clients, d’affecter la charge de travail des autres membres du personnel et de mettre en danger la progression de l’entreprise et sa stabilité financière. La direction reste déterminée à mettre en œuvre des solutions permettant de réduire la charge de travail actuellement élevée du personnel de cabine et continue à soutenir un dialogue social ouvert et constructif", avait-elle alors communiqué.
La rédaction de la RTBF a sollicité une réaction de Brussels Airlines. Celle-ci estime qu’il est un peu tôt pour commenter le préavis de grève des syndicats. Brussels Airlines dit vouloir donner la priorité et toutes les chances aux discussions en cours.