Alors que les gilets jaunes manifestent à Paris la veille du second tour des élections présidentielles, ce mouvement citoyen protestataire apparu fin 2018 risque-t-il de départager Macron et Le Pen ? Réponse avec le docteur en sciences politiques Vincent Laborderie.
Arrivé en Belgique il y a une vingtaine d’années, le maître de conférences invité à l’UCLouvain originaire du Périgord estime que le mouvement des gilets jaunes avait déjà sapé les résultats du parti d’Emmanuel Macron lors des élections municipales de 2020.
Pour ce second tour des présidentielles, les gilets jaunes pourraient soit renforcer le camp Marine Le Pen en raison de son discours sur le pouvoir d’achat, soit augmenter le taux d’abstention, analyse le politologue français : "Les actions des gilets jaunes ont renforcé le sentiment de déconnexion entre Macron et le peuple."
D’où viennent les Gilets jaunes et qu’est-ce qui les caractérise ?
Vincent Laborderie : "C’est un mouvement populiste qui a émergé fin 2018. La taxe carbone est un des éléments de fond : certains citoyens ont eu (et ont toujours) peur de la hausse du prix des carburants. À cela, s’ajoute un sentiment de déconnexion entre les élites parisiennes et les territoires français qui a atteint son paroxysme sous Macron qui était vu, ou est toujours vu, comme la personnification extrême de cette élite déconnectée."
Comment le mouvement a-t-il évolué au fil des années ?
"Les gilets jaunes sont le mouvement le plus long de manifestations que la France a connu. Même si ce mouvement s’estompe avec le temps, il reste de fond. Je vois par ailleurs une continuité entre les gilets jaunes et les manifestations anti-pass sanitaire : ils ne sont pas issus de partis politiques, l’extrême droite tente de les récupérer et la cible reste la même : la politique de Macron."
Les actions de ce mouvement citoyen ont-elles changé la manière de faire de la politique en France ?
"Durant son quinquennat, Emmanuel Macron a connu trois grandes crises : les gilets jaunes, le Covid-19 et l’Ukraine. Il n’y a que les gilets jaunes qui sont significatifs politiquement. Les deux autres proviennent d’une cause extérieure."