Cette semaine, dans " Le temps d’une histoire ", Patrick Weber vous propose le documentaire " Princesse de Belgique. Onze destins entre ombre et lumière ", une plongée au cœur des difficultés et tragédies parfois rencontrées au sein de la famille royale belge.

Malgré leur naissance, certaines de nos princesses ont eu une vie parfois peu enviable. Nul n’est à l’abri du malheur. Un exemple parmi les plus tragiques : Charlotte de Belgique (1840-1927). Fille unique de Léopold Ier, elle sera l’éphémère Impératrice du Mexique par son mariage avec l’archiduc Ferdinand Maximilien d’Autriche… Rentrée en vain en Europe pour plaider la cause du Mexique, l’exécution de son époux lui sera cachée. En Belgique, elle s’installera finalement au château de Bouchout où, alitée pour une grippe, elle mourra dans un état de dérangement psychique avancé.

2 - 22 novembre 2022, Buckingham Palace, le roi Charles III entouré de son épouse, Camilla portant la parure de saphirs et diamants, et du président sud-africain Cyril Ramaphosa.

Un fait d’actualité permet d’approcher une autre princesse de Belgique au destin… compliqué. En novembre dernier, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa, effectue une visite d’État au Royaume-Uni, une première pour le nouveau couple royal britannique. Comme il se doit, c’est à Buckingham Palace que Charles III et Camilla donnent un banquet d’État en l’honneur de leur hôte. À cette occasion, la reine consort porte un diadème en saphirs et diamants provenant de l’écrin de feu la reine Élisabeth… Une forme d’hommage aux origines familiales, les Saxe-Cobourg-Gotha…

20 octobre 2015, Buckingham Palace, la reine Elizabeth II portant sa parure de saphirs et diamants, accompagnée de Xi Inping, président de la République populaire de Chine et de son épouse Peng Liyuan.

Avec l’aide précieuse de l’historien de l’art Christophe Vachaudez, spécialisé dans l’histoire du bijou, voici ce qui peut être dit de la parure portée par Camilla : l’ensemble s’est constitué en deux époques. Le collier et les boucles d’oreilles sont un cadeau de son père, fait à l’ancienne souveraine lors de son mariage.

Par ailleurs, c’est en 1963 - selon Leslie Field (The Jewels of Queen Elizabeth II, éd. Abrams, 1992) - qu’Elizabeth achète un collier ayant appartenu à Louise de Belgique (1858-1924) ; il sera raccourci sans être modifié afin de devenir le diadème de la parure, le surplus du bijou original étant employé pour réaliser au moins un bracelet.

Louise de Belgique portant le collier de saphirs et diamants.
Le collier transformé en diadème pour Elizabeth II.
La princesse Louise de Belgique.

La princesse Louise de Belgique a eu une existence quelque peu… désordonnée. Il est vrai que, premier enfant de Léopold et Marie-Henriette, elle ne fait pas le bonheur de son père qui attendait un héritier ! L’enfance de Louise sera d’une tristesse désespérante. En 1875 ses parents décident de la marier à son cousin Philippe de Saxe-Cobourg-Gotha (1844-1921), un prince érudit, écrivain et collectionneur... mais aussi particulier dans ses goûts d’ébats sexuels. Le jeune fille n’étant pas au courant de cette dernière caractéristique, pour elle, le mariage est une véritable délivrance...

Louise et Philippe, à l’occasion de leur mariage.

La nuit de noce tout comme le mariage seront un échec ! Philippe souhaite initier Louise à des jeux sexuels qu’elle n’accepte pas, de ce fait, elle renâcle à accomplir ses devoirs conjugaux. Le couple s’installe à Vienne, au palais Cobourg. Si l’immense bâtisse est aujourd’hui un accueillant et luxueux hôtel, Louise découvre une résidence qu’elle trouve froide et lugubre, manquant des installations de confort moderne qu’elle a connues à Bruxelles.

Le palais Cobourg, à Vienne, de nos jours…

Le couple se dispute sans cesse. Pour s’évader, la princesse se lance dans une valse de dépenses extravagantes : robes, bijoux, accessoires de mode… Louise dépense sans compter la fortune de son époux et s’endette. Par ailleurs, dégoûtée par Philippe, elle ne tarde pas à commettre l’adultère.

Son premier amant se nomme Daniël d’Albaing de Giessenburg, leur relation débute en 1883. Louise a jeté son dévolu sur l’attaché militaire de son époux ! Le scandale éclate au sein de la famille, tant du côté Saxe-Cobourg-Gotha que Belgique, " heureusement ", Daniël meurt en 1888. Son successeur auprès de Philippe, le baron Nicolas Döry de Jobahàza, plaira à Louise… " heureusement ", il se marie en 1893 et cesse sa relation avec la princesse.  

Le comte Géza Mattachich.

Philippe demeure très épris de Louise, le couple se rabiboche passablement mais deux ans plus tard, la princesse rencontre le comte Géza Mattachich. Un amour et une passion réciproques ne tardent pas à éclater, nouveau scandale, cette fois au niveau européen. Il est vrai que Philippe de Saxe-Cobourg s’est vu accorder le prédicat d’altesse royale et a reçu la Toison d’or des mains de l’empereur François-Joseph. Le couple ne va pas tarder à voler en éclat.

Louise est convoquée chez l’Empereur qui lui rappelle qu’elle a un époux, lui conseille de retrouver le droit chemin et de voyager quelque temps, histoire de se faire oublier ! Avec ses enfants, Léopold et Dorothée, elle part pour le Midi de la France… De son côté, Philippe provoque Géza en duel, revolver puis sabre. Le prince s’en sort légèrement blessé à la main tandis que l’amant rejoint sa belle à Nice ! La princesse continue de dépenser sans compter, jusqu’à ce que Philippe décide de ne plus régler les factures…

La princesse est déclarée folle ! Léopold II, son épouse Marie-Henriette et François-Joseph s’entendent avec Philippe : Louise à le choix entre s’enfermer au palais Cobourg ou l’internement. Elle choisit : ce sera la maison de santé. D’abord à proximité de Vienne, mais rapidement, afin de ne pas entacher son rang, Philippe décide de placer son épouse hors de l’Empire, direction une institution en Saxe… Elle n’y recevra aucune visite.

« Folle pour raison d’État », mémoires de Géza Mattechich, originellement publiés en 1904 à Leipzig.
« Folle pour raison d’État », mémoires de Géza Mattechich, ebook, éd. Le Cri, 2021.

En 1904, alors qu’il vient de publier ses mémoires, Folle par raison d’État, c’est à l’occasion d’une cure thermale que Géza parvient à enlever Louise… Ils vivent leur amour, en 1906, le divorce de la princesse et de Philippe est prononcé… En 1916, Mattachich est arrêté pour conspiration contre l’Empire. À la fin de la guerre, Louise étant considérée de nationalité hongroise, ses biens belges sont placés sous équestre !

Pierre tombale de Louise de Belgique, cimetière du Sud, Wiesbaden.

Louise et Geza continuent une existence d’apatrides. Louise rédige ses mémoires publiées en 1921, intitulées Autour des trônes que j’ai vus tomber. Elle ne peut rentrer en Belgique. En octobre 1923, alors que le couple est à Paris, Géza meurt, il a 55 ans. Louise s’installe alors à l’hôtel Nassau, à Wiesbaden, ou elle décède le 1er mars 1924. Aucun membre de la famille royale belge n’assistera à ses obsèques, préférant envoyer Auguste Goffinet, fils de l’un des hommes de confiance de Léopold II, le baron Adrien Goffinet. Elle est inhumée à Wiesbaden.

Conseils lecture :

 

" Autour des trônes que j’ai vu tomber ", par Louise de Belgique, éd. pixL, 2014.

" Louise de Saxe-Cobourg. Amour, argent, procès ", par Olivier Defrance, éd. Racine, 2000.

" Patrick Weber raconte les princesses de Belgique ", Kennes éditions, 2021.

" Bijoux des reines & princesses de Belgique ", par Christophe Vachaudez, Racine, 2004

À voir " Princesses de Belgique. Onze destins entre ombre et lumière ", dans " Le temps d’une histoire ", ce vendredi 16 décembre à 20h50, sur La Une.

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