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Prix des carburants : "J’ai pris un congé maladie parce que je ne sais plus payer l’essence pour aller travailler"

© Belga

On n’arrête pas de parler de la hausse du prix des carburants. Le diesel par exemple passe de nouveau le cap symbolique des 2 euros ce jeudi. Les sommes à débourser deviennent impayables pour beaucoup de gens, y compris pour ceux qui travaillent. Certains en sont même réduits à des solutions extrêmes...

Cet ouvrier travaillant dans le secteur alimentaire a souhaité rester anonyme. Nous l’appellerons Jérôme. Chaque jour, il parcourt plus de 100 kilomètres aller-retour avec sa vieille petite voiture pour aller travailler. Avec la hausse du prix du carburant, son budget a explosé. "Pour aller travailler, ça me coûte entre 120 et 130 euros par semaine. Donc quand on fait le total sur un mois, on est à 400, 500 euros, plus l’usure du véhicule parce que par mois, je fais 2500 kilomètres."

"On n'y arrive pas"

L’entreprise de Jérôme indemnise en partie seulement les frais de carburant, et n’a pas augmenté son tarif. "On est payé pour les frais de déplacements, mais ce n’est pas suffisant, et mon entreprise ne veut pas augmenter l’indemnité. "
Fin du mois de février, il s’est retrouvé devant un énorme dilemme : "Une bonne semaine avant d’être payé, il me restait moins de 200 euros sur le compte. C’était soit 140 euros pour le plein, soit il me restait un peu d’argent pour finir le mois et manger tous les jours, donc le choix a été vite fait."

Jérôme n’a donc pas hésité : il est allé voir un médecin. "Je lui ai expliqué ma situation, il a compris et il m’a mis une semaine de maladie". Ces jours de "maladie", c’est son entreprise qui va les payer. Jérôme en est bien conscient : "je sais bien que c’est eux qui paient ma semaine mais je pense qu’ils ont sûrement de meilleurs moyens que nous ouvriers… J’ai jamais fait ça auparavant, je ne suis pas du genre à prendre des maladies mais là, je n’ai pas le choix !".

Ce trentenaire l’avoue : il vit très mal cette situation : "On se sent un peu bête. On travaille mais on n’y arrive pas. Même en travaillant à deux on n’y arrive pas."

Sur le même sujet: extrait du JT du 24 mars 2022

"L’avenir, ça ne sera pas terrible"

La voiture de Jérôme a quelques années au compteur. "C’est une voiture ancienne, c’est un petit diesel, je ne consomme pas trop mais c’est vrai qu’une nouvelle consommerait moins. Mais acheter une nouvelle voiture, hybride ou autre, c’est juste impensable". 

La compagne de Jérôme est aussi ouvrière. Ils ont deux jeunes enfants et viennent d’acheter une petite maison. L’avenir, notre témoin ne parvient pas à le voir de façon positive : "On se dit que ça ira mieux plus tard mais ça ne fait que se dégrader tous les mois. Le diesel n’arrête pas de remonter, et on parle même de 3 euros. L’avenir, ben ça ne sera pas terrible. Depuis quelques mois, il n’y a plus d’extras, mais là, il n’y aura plus rien du tout."

Cette situation est loin d’être isolée nous confirme Julie Vincke, de la centrale générale de la FGTB Charleroi Sud-Hainaut : " On a des coups de fil de travailleurs nous disant qu’ils ne savent plus finir leur mois, qui ne savent plus mettre du carburant pour aller travailler, et certains n’ont pas d’autre choix que de se mettre en maladie malheureusement. Même si on a l’habitude de travailler avec des secteurs très fragiles, des travailleurs pauvres, ici on arrive dans des cas extrêmes, où la situation est vraiment très très grave. Ils veulent continuer de travailler, quand on travaille on a un contact social, et dont ce sont des travailleurs au bord de la détresse". 

Jérôme avoue redouter de devoir encore utiliser ce procédé, mais entre travailler ou nourrir sa famille, il n’hésitera pas.

Le diesel augmente à nouveau (CVQLD du 23/03/2022)

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