La cour d'assises de Bruxelles, qui juge les attentats du 22 mars 2016 dans le métro de Maelbeek et à l'aéroport de Zaventem, a entendu lundi un islamologue, qui a retracé les moyens déployés par l'organisation terroriste État islamique pour revendiquer ces attaques. Les enquêteurs ont ensuite détaillé le mode d'emploi du TATP, l'explosif utilisé par les assaillants et dont on a retrouvé des traces dans l'appartement de la rue Max Roos à Schaerbeek. Ils ont enfin commencé à présenter les premières constatations effectuées dans une des planques de la cellule terroriste située rue du Dries à Forest.
Avant son exposé, en début de matinée, la défense a signalé à l'ouverture de l'audience de nouveaux incidents concernant les conditions de transfert des accusés détenus. Me Vincent Lurquin a dénoncé des "erreurs de copié-collé" dans les justifications de la fouille à nu imposée à son client, Hervé Bayingana Muhirwa, insinuant que les motivations des fouilles ne sont pas écrites en fonction de la situation du jour.
De son côté, Me Delphine Paci, qui représente Salah Abdeslam, a souligné que "l'audition du policier qui a frappé M. Abdeslam mercredi ne présente aucun élément qui permette d'expliquer comment mon client a été blessé au visage". L'accusé franco-belge a indiqué mercredi dernier avoir été frappé par la police lors de sa fouille à nu.
Comment l'EI a revendiqué les attentats
L'audience s'est ensuite poursuivie par la suite de l'exposé de Mohamed Fahmi, islamologue pour la police fédérale. Le témoin a montré comment l'organisation État islamique (EI) avait revendiqué les attentats dès le 22 mars, via différents canaux, que ce soient des articles ou des vidéos de propagande dans plusieurs langues. Le propos exagère les faits, y mêle une partie de mensonges et entend célébrer les attentats tout en essayant de convaincre le public d'épouser l'idéologie de l'EI ou de perpétrer des attaques en son nom. L'objectif est aussi d'envoyer le message suivant à l'Occident: "cessez votre guerre contre nous ou bien nous continuerons à perpétrer des attentats".
Durant l'après-midi, un expert du Service d'enlèvement et de destruction d'engins explosifs de l'armée (Sedee) a détaillé le mode d'emploi des explosifs utilisés par les assaillants et dont on a retrouvé des traces dans l'appartement de la rue Max Roos à Schaerbeek. On y a notamment appris que la première bombe ayant explosé au sein de l'aéroport de Zaventem ne se trouvait pas sur un chariot à bagages au moment de son déclenchement. Elle avait en effet été préalablement posée au sol par le kamikaze Ibrahim El Bakraoui.
Le processus de production du TATP n'est pas considéré comme complexe, l'expert du Sedee estimant "qu'un enfant peut le faire en suivant les instructions à la lettre", mais demande une grande prudence lors des différentes manipulations. Le militaire a également confirmé, lors de sa présentation, que la bombe abandonnée par Mohamed Abrini aurait pu exploser si, par exemple, un secouriste l'avait poussée.
Selon les estimations, à Zaventem, les auteurs transportaient trois sacs de sport d'un volume respectif de 30 L chacun, chargés d'environ 90 kg d'explosifs en tout; tandis qu'à Maelbeek, ils étaient affublés de deux sacs à dos de 15 L avec un volume total d'explosifs estimé à 30 kg. Ce qui représente un total de 120 kg, auxquels il faut ajouter les 6 kg d'explosifs retrouvés dans l'appartement de Max Roos. Les experts estiment qu'il a fallu environ 10 jours pour produire ces dispositifs.
Rue Dries
En fin d'après-midi, les enquêteurs sont revenus sur la fusillade survenue rue du Dries à Forest, le 15 mars 2016, entre les unités spéciales et Mohamed Belkaïd, mort en protégeant la fuite des accusés Salah Abdeslam et Sofien Ayari. Cette affaire a déjà fait l'objet d'un jugement, qui a condamné le 23 avril 2018 Salah Abdeslam et Sofien Ayari à 20 ans de prison. Mais elle constitue pour les enquêteurs une "date pivot", un événement qui aura impacté les faits du 22 mars 2016, a expliqué la juge d'instruction Berta Bernardo Mendez. Ce volet a dès lors été présenté aux jurés pour leur compréhension de la suite des événements, soit l'arrestation de Salah Abdeslam et Sofien Ayari, le 18 mars, et les attentats quatre jours plus tard.
Une inspectrice de la section criminelle de la police judiciaire de Bruxelles a commencé à exposer l'enquête scientifique et tactique débutée juste après la fusillade. Elle a commencé par préciser les endroits où des traces ADN et des empreintes digitales ont été relevées dans la chambre de l'appartement, où Mohamed Belkaïd s'était retranché, et à qui elles appartenaient. Outre les kamikazes de Bruxelles et plusieurs accusés devant la cour d'assises pour les attentats du 22 mars 2016, des empreintes et de l'ADN appartenant à plusieurs assaillants de Paris ont été repérés sur divers objets, comme des livres. Ce témoignage se poursuivra mardi.