Justice

Procès des attentats de Bruxelles : Ali El Haddad Asufi présente "des blessures au niveau de la région cervicale", la police dresse un PV pour rébellion

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Par Marie-Laure Mathot & Melanie Joris

L’audience du jour au procès des attentats de Bruxelles s’est déroulée en l’absence des accusés. Ils entendaient ainsi dénoncer leurs conditions de transfert et l’agression qu’aurait subie l’un d’entre eux ce matin. Il s’agit d’Ali El Haddad Asufi, l’un des cinq qui avaient décidé de ne pas assister à la séance d’hier pour cause de mauvais traitements. L’accusé a affirmé avoir été étranglé par un policier alors qu’il sortait de sa cellule à la prison de Haren. Ses blessures ont été confirmées par une médecin légiste. Une plainte a été déposée par son avocat. De son côté, la police fédérale a dressé un PV pour rébellion.

Il est presque midi lorsque la médecin légiste sollicitée par la présidente de la cour d’assises vient prêter serment en tant que témoin : "Je promets de dire la vérité, rien que la vérité". La présidente de la Cour lui demande : "Ali El Haddad Asufi est-il apte à comparaître sur le plan médical ? Avez-vous constaté des blessures ?".

La médecin légiste confirme : "Il présente des blessures cohérentes avec les faits qu’il décrit. Il m’a expliqué qu’il avait eu une clé de bras, un bras qui l’a serré au niveau du cou jusqu’au moment où il a perdu connaissance. Il n’est pas possible d’objectiver la perte de connaissance, mais je constate des érythèmes et ecchymoses dans la région cervicale. Il dit avoir été traîné sur le sol, il y a effectivement des abrasions sur ses genoux et une légère bosse à l’arrière de sa tête".

Elle confirme donc les blessures, mais conclut que l'accusé est apte physiquement à assister à l’audience. L’accusé Ali El Haddad Asufi a toutefois demandé à retourner en cellule. Tous les autres accusés du box ont suivi le mouvement, laissant le box complètement vide. Il ne restait à l'audience que les deux accusés qui comparaissent libres, les frères Farisi. 

Je ne peux pas faire comme si rien ne s’était passé

L’accusé Hervé Bayingana Muhirwa corrobore également les propos d’Ali El Haddad Asufi : "Je ne veux manquer de respect à personne, mais j’ai été témoin de cette agression. Quand il a repris connaissance, il a demandé un sac pour vomir. Je ne peux pas faire comme si rien ne s’était passé", annonce-t-il.

Me Delphine Paci, l’avocate de Salah Abdeslam, a demandé s’il était possible que les extractions soient refusées tant que la question des transferts n’est pas réglée. La présidente de la Cour a précisé que ce n’était pas possible.

Les accusés étant sous le coup d'une ordonnance de prise de corps, ils sont tenus de se présenter au Justitia où se tient le procès. Une fois devant la cour, ils peuvent demander à quitter l'audience et rejoindre leur cellule au sous-sol. C’est lors de l’extraction de sa cellule à la prison de Haren que les faits auraient eu lieu. "Mon client n’a rien vu venir, il sortait de cellule et il a été étranglé", précise Me De Taye.

Des plaintes de part et d’autre

À la sortie de l’audience, l’avocat Jonathan De Taye a annoncé qu’il déposerait plainte suite à cette agression de son client. Le parquet de Bruxelles nous confirme l’existence de cette plainte. Le parquet de Bruxelles est également en mesure de communiquer qu’un PV pour rébellion a été rédigé ce jour à l’encontre de l’intéressé et a été transmis au parquet. Cela laisse entendre que l’accusé Ali El Haddad Asufi se serait opposé à des injonctions de la police au moment de quitter sa cellule.

Les enquêtes sont en cours concernant ces deux dossiers et, dans l’intérêt de celles-ci, le parquet de Bruxelles ne fera pas d’autres commentaires.

Quant à la présidente de la cour d’assises, elle a lu la lettre qu’elle a adressée au ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne : "Je me permets d’attirer votre attention sur les doléances formulées par les accusés et leurs avocats sur les conditions de fouille et de transfert de la prison vers le Justitia. Avec en conséquence, le choix des accusés de ne plus assister aux audiences. L’évaluation de risques m’échappe…".

10 heures : séance suspendue

Plus tôt dans la matinée, la séance a été suspendue sur demande de Me Jonathan De Taye, l’avocat de l’accusé Ali El Haddad Asufi. "J’hallucine, je n’ai jamais assisté à un procès dans de telles conditions", commente-t-il alors que son client est couché sur son bras dans le box des accusés. Il s'interroge : "Nos amis policiers cagoulés dans le box ont-ils été formés à la prison d’Abou Ghraib ? Mon client a été étranglé si violemment qu’il en a perdu connaissance, il est marqué à la nuque, il n’est pas en état de suivre ce procès. Pourtant, c’est son but, il veut assister à ce procès."

J’hallucine, je n’ai jamais assisté à un procès dans de telles conditions

"Je veux qu’un médecin légiste constate la marque qu’il a sur son cou et je veux, séance tenante, qu’il voie un médecin. Je peux appeler le bâtonnier, mais il est hors de question que je représente un homme qui n’est pas en état de suivre son procès. Je vous demande une suspension et je veux participer à l’expertise médicale."

Demande acceptée par la présidente après une conversation avec l’accusé. "Je vais demander à Monsieur El Haddad de se lever. Monsieur, l’incident va être porté par votre avocat devant d’autres instances judiciaires, pas devant moi. En ce qui concerne ce procès, êtes-vous en état de rester dans ce box ?". "Non", répond l’accusé.

J’ai perdu connaissance

"Vous n’êtes pas en état médical et physique ou c’est un choix comme celui posé hier ?", demande la présidente. "J’ai perdu connaissance, j’ai la tête qui tourne", répond Ali El Haddad Asufi. "Je vais suspendre l’audience pour désigner un médecin légiste qui va venir vous examiner ici en cellule", conclut la présidente.

Pour l’avocat Me De Taye, si son client a été maltraité aujourd’hui, c’est parce qu’il a osé dénoncer leurs conditions de transfert hier.

Une épidémie de gastro dans le jury ?

La séance avait déjà mal commencé. Il y a un trou dans le jury : un des jurés suppléants souffre d’une gastro-entérite. C’est le 4e juré absent en moins d’une semaine. "On espère que ce n’était pas trop contagieux. S’il y a une épidémie de gastro, on suspendra", a alors annoncé la présidente de la Cour.

Sur le même thème : Extrait JT (07/12/2022)

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